Chypre, une porte de l'Europe pour les migrants
«Un voyage aux sources de la foi apostolique et de la fraternité entre chrétiens de diverses confessions. L’opportunité également d’approcher une humanité blessée dans la chair de tant de migrants en quête d’espérance». Ainsi le Pape caractérise dans son message aux Grecs et Chypriotes le sens de son 35ème déplacement hors d'Italie.
Federico Ribechi, coordinateur du centre de migrants de Caritas Chypre, dresse un état des lieux de la situation dans le pays, et évoque les attentes des migrants devant cette visite apostolique.
Comment se déroule l’accueil et l’intégration des réfugiés sur l’île?
Chypre souffre pour le moment de flots importants de migrants, surtout par rapport à la capacité d’accueil de l’île. Elle a le plus haut taux de migrants par habitants en Europe. L’on dénombrait 1 000 migrants enregistrés à Caritas en 2018. Il y en a aujourd’hui 10 000, essentiellement des Camerounais arrivés par une route migratoire de l’Afrique à Chypre, en raison de l’éclatement de la guerre entre francophones et anglophones dans le pays en 2016. C’est une nouvelle migration pour les Chypriotes qui n’ont connu auparavant que celle de Libanais, Syriens, Jordaniens, ou Irakiens. Ces populations du Moyen-Orient sont proches des Chypriotes, il y a des liens historiques qui n’existent pas avec l’immigration africaine. Le gouvernement chypriote n’était pas prêt pour un énorme flux.
Il y a maintenant trois camps sur l’île: un petit, Kofinou, créé à l'origine pour les Syriens; un grand, Purnara, créé il y a deux ans, où se rendent tous ceux qui doivent demander l'asile; et un troisième, Limnes, dont on sait peu de choses, car aucun migrant n'en est encore sorti et les ONG ne peuvent pas entrer.
À Caritas, nous sommes une sorte de pont entre les droits des migrants et les autorités.
Le Pape va prendre part à une prière commune avec les migrants. Qu’espérez-vous de cette visite?
Cette visite du Pape François est une très bonne nouvelle, de nombreux migrants s’en réjouissent. Ils perçoivent un peu Chypre comme une île isolée et oubliée de l’Europe. J'ai appelé plusieurs personnes pour les inviter à la prière œcuménique que nous aurons ici vendredi après-midi, en l’église sainte-Croix de Nicosie, et certains n'arrivaient pas à y croire. Le Pape vient ici aussi pour envoyer un message aux gouvernements européens afin qu’ils revoient leur politique migratoire.
Personnellement, je vois un double message dans ce voyage à Chypre: rappeler aux chrétiens que la situation migratoire nous confronte au sérieux de notre foi, et dire aux institutions que l'humanité et l'accueil sont la seule réponse possible, à un moment où une partie de l'Europe réagit plutôt par la violence et les murs.
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