En France, la mobilisation des citoyens pour accueillir les Ukrainiens
Claire Riobé, Marine Henriot – Cité du Vatican
Depuis le village de Rieupeyroux, 1 949 habitants, situé au cœur de l’Averyon au sud-ouest de l’hexagone, Natalia Atamanchuk se mobilise avec ses proches pour aider ceux que la guerre a poussé sur les routes. «Je suis très surprise, j’habite dans un tout petit village, je ne pensais jamais que l’accueil serait si important», nous confie cette mère de famille ukrainienne, elle-même arrivée en France il y a 18 ans.
Lorsque la guerre a été déclarée par la Russie le 24 février, Natalia Atamanchuk et son mari ont tout de suite souhaité faire parvenir des vivres et biens de première nécessité aux Ukrainiens restés dans leur pays. Leur fourgon, conduit par le mari de Natalia, devait servir de locomotion pour le convoi.
De nombreux habitants de Rieupeyroux et des villages alentours ont spontanément soutenu le couple dans son entreprise de solidarité. «Quand j’ai lancé le projet, je pensais que mon mari et moi ne ferions qu’un seul fourgon tous les deux», avoue Natalia. Le premier convoi, composé finalement de trois fourgons, est parti il y a deux semaines. Un second convoi, composé cette fois-ci d’un bus, a quitté le village avironais dans la matinée du jeudi du 17 mars. «Pendant une semaine, en fin de journée après le travail, les gens se sont mobilisés pour apporter des vivres et des biens essentiels», détaille-t-elle.
Au cours des deux dernières semaines, l’association culturelle franco-ukrainienne Béréguinia, ainsi que la municipalité du village, ont pris en charge et centralisé les collectes de lait pour les enfants, nourriture, sacs de couchage et médicaments. Deux fois par semaine, les habitants sont invités à y déposer leurs dons, avant qu’ils ne soient acheminés. «Cela me touche énormément», confie Natalia, émue par ces nombreuses marques de solidarité.
Les convois partent avec des vivres et reviennent avec des personnes fuyant la guerre. Six familles françaises ont déjà fait part, à la préfecture locale, de leur volonté d’accueillir dans leur maison des réfugiés ukrainiens. Ainsi, entre la France et la Pologne, Natalia et son réseau organisent leur arrivée. «Je savais que j’étais entourée de gens biens, mais je ne pensais pas qu’ils se mobiliseraient autant et aussi rapidement», explique-t-elle.
Statut spécial pour les Ukrainiens
Du côté de l’État, la France, qui prône une politique d’asile restrictive, annonçait lundi 14 mars être en capacité de recevoir environ 100 000 réfugiés ukrainiens. Le 10 mars, une instruction était envoyée aux préfectures françaises afin de clarifier la situation de ces ressortissants et déterminer ceux qui auront droit au statut de réfugié. Ce dernier, qui les autoriserait à séjourner légalement en France et à bénéficier de prestations sociales, reste conditionné par une série de critères aussi nombreux qu’exigeants.
Le statut de réfugié pourra ainsi être accordé aux ressortissants ukrainiens qui résidaient en Ukraine avant le 24 février, aux «ressortissants de pays tiers» qui vivaient sous statut de réfugié (ou équivalent) à cette date en Ukraine. Il pourra également être attribué à ceux qui «résidaient régulièrement» en France avec un titre de séjour, et qui ne «sont pas en mesure de rentrer dans leur pays ou région d'origine dans des conditions sûres et durables».
Flou juridique
Plusieurs associations de défense des droits des personnes réfugiées comme la Cimade ont noté que cette notion de retour «dans des conditions sûres et durables» manquait de clarté.
Selon l’AFP, le flou juridique fait déjà de premiers dégâts collatéraux aux frontières françaises : une quinzaine de non-Ukrainiens, qui fuyaient la guerre en Ukraine, ont été refoulés essentiellement à la frontière franco-italienne. «Il est logique que les résidents étrangers fuient également la guerre en Ukraine: les bombes ne distinguent pas la couleur de peau», estime Pierre Henry, président de l'association France Fraternités, interrogé par l’AFP.
A l’heure actuelle, seuls 15 000 Ukrainiens sont arrivés dans l’Hexagone, un chiffre moindre par rapport à ses voisins allemand et italien. Dans la péninsule italienne seule, les autorités ont annoncé se préparer à l’accueil de 700 000 personnes, 50 000 étant déjà entrées sur le territoire.
Merci d'avoir lu cet article. Si vous souhaitez rester informé, inscrivez-vous à la lettre d’information en cliquant ici