Le docteur Denis Mukwege reçu au Vatican par le Pape François
Olivier Bonnel - Cité du Vatican
Après avoir passé plusieurs jours en Italie pour présenter son travail et sa fondation, le docteur Denis Mukwege a fait escale au Vatican ce vendredi matin 9 décembre. Le célèbre chirugien et gynécologue congolais, natif de Bukavu avait déjà salué le Pape François en 2019 à l'issue d'une audience générale. Il a été reçu cette fois-ci en audience privée par le Pape François au palais apostolique. Une rencontre au cours de laquelle le lauréat du Prix Nobel de la Paix 2018 et l'évêque de Rome ont pu aborder le conflit dans l'Est de la République Démocratique du Congo ainsi que le prochain voyage apostolique de François à Kinshasa.
A l'issue de cet entretien, le directeur de l’hôpital de Panzi est revenu sur cette rencontre et sur l'avenir de son travail auprès des victimes du conflit qui déchire l'Est de la RDC:
Cette visite a été pour moi une grâce particulière, un honneur d'avoir rencontré un homme de foi, un homme de paix, une personne qui œuvre pour la paix, la justice et l'inclusion à travers le monde et dans le contexte particulier aujourd'hui avec des crises multiples. Sa visite en République Démocratique du Congo est donc un signal fort. Cette visite, en fait, montre tout simplement pour les Congolais l'espoir et la solidarité que le Pape témoigne pour notre peuple, pour un peuple meurtri depuis plus de 25 ans.
Je crois que ce que nous attendons, c'est que sa présence puisse contribuer à tout simplement une prise de conscience de l'opinion mondiale sur le drame que vivent les Congolais aujourd'hui. Nous espérons aussi que par ses prières, sa voix qui porte, qu'il puisse aider à mettre fin à cette tragédie, dont on parle hélas très peu ici en Europe.
Est-ce que le Saint-Siège et la diplomatie pontificale, mais aussi plus largement les religions, peuvent faire quelque chose pour justement contribuer au retour de la paix dans la région ?
L’Église a un rôle très important et je crois que la parole prophétique de l'Église peut faire une très grande différence. Une Église qui se tait quand l'homme souffre, c’est une Église qui n'est plus à sa place. Et je pense que le rôle le plus important de l'Église, c'est donc souffrir avec le peuple qui souffre. Je pense que la visite du Pape s'inscrit dans cette logique d'aller souffrir avec le peuple congolais qui souffre. Et donc c'est tout à fait la voix prophétique de l'Église qui peut faire une très grande différence.
Un mot sur les femmes, professeur Mukwege, vous vous occupez beaucoup d'elles, via votre hôpital. Où en est la situation aujourd'hui des femmes congolaises dans ce terrible conflit? Je crois que vous avez l'intention de développer encore vos activités au-delà de Panzi…
En effet, aujourd'hui, nous sommes en train de soigner la troisième génération et c'est ça qui nous fait le plus mal. C'est pour cela que nous demandons à la presse internationale de pouvoir parler de cette question, puisque le nombre des femmes violées, ce n'est plus le nombre qui compte, mais c'est la façon de faire. Détruire les enfants, détruire les bébés, détruire les femmes devant leur famille, leur communauté, c'est détruire tout simplement toute une communauté. Je pense qu'aujourd'hui, Panzi essaie de travailler pour que nos activités aillent plus loin dans la prise en charge.
On essaye de rapprocher nos services de soins des malades. Nous sommes en train de multiplier les centres de prise en charge qu'on appelle des centres "one stop center", où on fait la prise en charge holistique, c'est à dire sur le plan médico-chirurgical, psychosocial, mais aussi socio-économique et légal.
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