À Nadjaf en Irak, l’avancée du dialogue entre chiites et catholiques
Du 8 au 10 mars, la troisième conférence internationale «Catholiques et chiites face à l'avenir» s’est tenue dans la ville sainte chiite de Nadjaf, deux ans après le 33e voyage apostolique du Pape François sur place. Organisée par la communauté de Sant’Egidio et l'Institut Al-Khoei de Najaf, elle s’est déroulée en présence d’Andrea Riccardi, fondateur de Sant’Egidio, du président Marco Impagliazzo, mais aussi de Mgr Vincenzo Paglia, président de l’Académie pontificale pour la vie, et des cardinaux Ayuso, Coutts et Sako, patriarche de Bagdad des Chaldéens.
Côté chiite, la délégation comprend plusieurs religieux du grand séminaire chiite de Nadjaf, ainsi que des représentants d'autres pays du Moyen-Orient et d'Europe. La conférence s’achève ce vendredi 10 mars à Bagdad pour une session finale au Patriarcat chaldéen.
Dans l'esprit d'Assise
Cette nouvelle étape de l'amitié entre catholiques et chiites s'inscrit dans un parcours qui a commencé en janvier 2004, lorsqu'une délégation de Sant'Egidio, invitée à Nadjaf par des religieux chiites pour dialoguer dans «l'esprit d'Assise», a rencontré l’ayatollah Ali al-Sistani. En 2015, la première rencontre internationale entre catholiques et chiites a eu lieu, suivie par des présences nombreuses et variées de religieux chiites aux prières pour la paix, promues par Sant'Egidio. Une délégation de Rome était présente à Nadjaf le jour de la rencontre historique entre le Pape et Al-Sistani le 5 mars 2021 et l'année dernière, à l'invitation de l'Institut Al-Khoei, pour l'anniversaire de la visite. En juillet dernier, une autre étape de ce chemin d’amitié a eu lieu à Rome avec la deuxième rencontre catholiques-chiites.
La deuxième journée de la conférence s'est ouverte à Nadjaf avec la remise d'un message du Pape à Al-Sistani, jeudi 9 mars. Une lettre remise à l’ayatollah par le cardinal Ayuso, préfet du dicastère pour le Dialogue interreligieux.
Les religions abrahamiques, apports de sagesse
Au cours de la rencontre, qui avait aujourd'hui pour thèmes «le dialogue sur la vie» et «religions et société», Mgr Vincenzo Paglia a déclaré «qu'il est temps de relancer la vision d'un humanisme fraternel et solidaire des personnes et des peuples». Le président de l'Académie pontificale pour la vie a expliqué que «toutes les religions, mais en particulier celle d'Abraham, sont appelées à se confronter au monde de la technologie», qui se développe plus rapidement que les sciences humaines, «offrant cet apport de sagesse qui évite à l'humanité de tomber dans l'abîme».
Le président de la Communauté de Sant'Egidio, Marco Impagliazzo, a insisté sur la nécessité d'ouvrir une brèche dans la «mondialisation de l'indifférence» dont parle le Pape François et de répondre à cet insidieux «fondamentalisme de l'ego» qui dérive du vide culturel et de la désorientation vécus dans le monde global: «La mondialisation et la technologie devraient être utiles pour construire des ponts entre nous, et non pour créer de nouveaux murs invisibles à travers l'actuelle culture de l'individualisme. Les religions, à cet égard, peuvent jouer un rôle important et contribuer à renouveler le monde dans la fraternité», a relevé encore l’universitaire italien, récemment nommé consulteur historique au dicastère pour la Cause des saints.
Les personnalités chiites qui se sont exprimées lors de cette deuxième journée de la conférence ont souligné l'importance d'un dialogue qui fasse grandir les valeurs de fraternité humaine entre les peuples dans la période difficile que traverse le monde, entre tensions et conflits. Mais aussi des religions qui savent être toujours aux côtés de ceux qui sont dans le besoin: «Ignorer les pauvres, a observé Hussein Al-Kazwini, du Haut Séminaire chiite de Najaf, c'est comme ignorer la foi».
Avancée historique sous François
Le 6 mars 2021, François a été le premier Souverain pontife à rencontrer le chef suprême des chiites d’Irak. Une étape interreligieuse très forte dans ce voyage apostolique, qui a suscité l’enthousiasme dans le pays. Elle a été saluée par le président irakien Barham Saleh comme «une expression religieuse profonde de modération».
Ali al-Sistani, âgé de 90 ans, a un rôle central dans la construction de la paix. Cette autorité politique et religieuse de référence du pays a déjà pris des positions favorables aux minorités chrétiennes d’Irak.
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