SVB, Crédit Suisse: faut-il craindre une nouvelle crise?
Entretien réalisé par Xavier Sartre – Cité du Vatican
La faillite de SVB, petite banque à l’échelle américaine mais bien connue en Californie, rappelle dans l’imaginaire collectif celle de Lehman Brothers en 2008. La Réserve fédérale, la banque centrale américaine, surveille la situation, rassurant les marchés financiers qui commencent à s’affoler. Jusqu’à l’annonce des déboires de Crédit Suisse, l’une des principales banques helvétiques, au cœur de l’Europe. Les deux faits ne sont pas liés mais leur concomitance inquiète de plus en plus. Les gouvernements, qui craignent un vent de panique pouvant amplifier une éventuelle crise bancaire, rassurent: les mesures prises depuis 2008, notamment au sein de la zone euro, garantissent la bonne tenue du système bancaire. Aucune inquiétude à avoir. Le doute persiste cependant.
Pour bien comprendre la situation, il faut revenir sur les raisons qui ont poussé SVB à faire faillite et Crédit Suisse à être en très grande difficulté. «Il en y a deux, l’une conjoncturelle qui vient du changement des taux d’intérêt directeurs des banques centrales, explique Yamina Tadjeddine-Fourneyron, professeure d’économie à l’université de Lorraine, directrice-adjointe du BETA, bureau d’économie théorique et appliquée. Dorénavant, tous les taux d’intérêt ont été augmentés, notamment les prix d’émission des obligations et le coût des nouveaux crédits».
Facteurs conjoncturels
«L’autre facteur vient du secteur des nouvelles technologies qui affectent plus spécifiquement SVB puisqu’elle avait tissé des liens très forts avec des start-ups en les accompagnant depuis leur création jusqu’à leur déploiement. À partir du moment où il y a un ralentissement de l’activité dans ce secteur, des faillites, etc. cela rejaillit sur la banque» poursuit la professeure d’économie.
Le cas de Crédit Suisse est différent. «Il a essayé de proposer des produits financiers attractifs en menant des stratégies financières hasardeuses voire carrément douteuses; on est vraiment à la limite de la finance légale. Elle accuse donc les scandales successifs», précise Yamina Tadjeddine-Fourneyron.
La zone euro mieux préparée qu'en 2008
Le spectre de la crise de 2008 semble donc écarté, les chutes de SVB et de Crédit Suisse s’expliquant par des raisons «singulières». «L’activité bancaire sera tout de même compliquée dans les mois à venir» reconnaît la professeure d’économie. La hausse des taux d’intérêt va ralentir la demande de crédit des particuliers et des entreprises. Leur monopole comme intermédiaire dans les moyens de paiement est également «révolu» estime-t-elle, à cause de l’apparition de nouveaux acteurs comme les «fintechs», comme Paypal. «Il s’agit d’une tendance longue de l’érosion de l’activité bancaire».
En ce qui concerne la zone euro, la réglementation a évolué et encadre davantage les banques, mieux surveillées. Les mouvements financiers sont suivis à l’échelle mondiale pour éviter les investissements suspects et frauduleux. Les mécanismes de solidarité au sein de la zone euro permettent aussi d’agir en cas de difficultés pour un établissement. Autant de garde-fous pour éviter une nouvelle crise.
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