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Les forces de l'ONU devant une l'église catholique de Beni, cible d'une attaque. Les forces de l'ONU devant une l'église catholique de Beni, cible d'une attaque.  Les dossiers de Radio Vatican

RDC: le bilan de la Monusco, plus de 20 ans après

Depuis plus de deux décennies, la Mission des Nations Unies en RDC est déployée dans le pays avec un objectif clair: celui de protéger les civils. Cependant, cette Mission qui dispose d’un budget annuel d’environ un milliard de dollars est largement critiquée et décriée par la population qui souhaite son départ. Entretien avec Thierry Vircoulon, chercheur associé et coordinateur de l'Observatoire de l'Afrique centrale et australe, Centre Afrique Subsaharienne de l'Ifri.

Entretien réalisé par Myriam Sandouno – Cité du Vatican

Le 29 mai dernier, marquant la Journée internationale des Casques bleus, a été l’occasion d’honorer tous ces hommes et ces femmes qui ont servi dans des opérations de maintien de la paix, parmi lesquels nombre d’entre eux ont perdu la vie. Les Casques bleus, des soldats, officiers, policiers et personnels civils dont beaucoup sont des volontaires issus de divers pays, sont actifs dans de nombreux États, comme en République démocratique du Congo. Quelques 14 000 hommes y sont déployés depuis maintenant plus de vingt ans, en bénéficiant d’un budget annuel d’environ un milliard de dollars.

Une crise de confiance

Malgré ces ressources considérables investies, les résultats tangibles se font attendre, remettant en question l’efficacité de la Mission des Nations Unies face aux groupes rebelles dans l’Est du pays, ravagé par les violences, et où les populations s’insurgent contre la Monusco créée en 1999. Aujourd’hui, une réelle crise de confiance existe entre les habitants et les soldats de la paix.

Depuis octobre 2022, dans l’Est de la RDC, où des groupes armés mènent des «attaques ignobles» contre des civils selon le Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l’homme, plus de 1 300 personnes ont été tuées.

La Monusco, jugée inefficace

La crise du M23 qui a commencé maintenant il y a deux ans environ est «révélatrice de l’impuissance assumée», des Casques bleus, estime Thierry Vircoulon, chercheur associé et coordinateur de l'Observatoire de l'Afrique centrale et australe, Centre Afrique Subsaharienne de l'Ifri.

«On voit que cette crise qui a déjà eu lieu il y a 10 ans est revenue maintenant sur le devant de la scène dans l’Est du Congo mais sans justement l’ONU. Puisque l’ONU avait joué un rôle majeur pour essayer de résoudre cette crise, et on voit bien aujourd’hui que ce n'est absolument pas le cas, elle ne joue plus aucun rôle», observe-t-il. Au regard de la situation, le gouvernement congolais avait demandé la réévaluation du plan de retrait progressif de la Monusco, censée se retirer complètement de la RDC en 2024.

Entretien avec Thierry Vircoulon

Pourquoi selon vous la Monusco ne parvient-elle pas à remplir efficacement son rôle?

Le problème, c’est qu’il y a un désengagement à la fois politique et militaire. On se rappelle ce qui s’est passé il y a dix ans pour résoudre la crise du M23. C’était à l’époque du secrétaire général Ban Ki-moon, qui avait initié l’accord d’Addis Abeba signé en 2013. La Monusco avait mené une offensive conjointe avec l’armée congolaise contre le M23, le secrétaire général de la Monusco avait été sur le terrain dans le Rutshuru, quand ils avaient repoussé le M23. On voit bien que maintenant les négociations ne sont pas du tout initiées par les Nations Unies, elles sont commencées dans le cadre de l’East African Community, et elles continuent dans le cadre de la CIRGL (Conférence internationale sur la Région des Grands Lacs). Sur le plan militaire on voit que maintenant il y a une force de l’East African Community qui a été appelée par le président Tshisekedi précisément, puisque les Casques bleus ne faisaient rien.

Il semblerait que l’action de certaines puissances régionales contre les groupes armés aient eu plus de succès que celles de la Monusco. Ne faut-il pas envisager la création d’une force hybride entre la Monusco et les puissances militaires régionales?

Le président Tshisekedi récemment a demandé le départ de la force de l’East African Community qui n’a pas satisfait ses attentes et appelle maintenant au déploiement d’une force de la SADC. Il est à la fois désenchanté par les Casques bleus depuis longtemps, mais aussi par l’East African Community. Et donc on ne prend pas du tout la direction d’une force hybride, d’ailleurs une force hybride ce sont des problèmes en plus. Parce que les forces hybrides on en a créé au Darfour par exemple, et ça été extrêmement compliqué à gérer entre New York et Addis Abeba.

Qu’est ce qui justifie un nombre aussi important de Casques bleus en République démocratique du Congo?

Premièrement parce que le terrain à couvrir dans l’Est du Congo là où ils sont déployés est immense. Ça fait plusieurs pays. Si vous mettez ensemble l’Ituri, le nord et le sud Kivu, les provinces où ils sont déployés, cela fait environ 20 millions d’habitants. Ce sont trois provinces ensemble, donc on voit bien qu’il y a à la fois une grande population, c’est un grand territoire à couvrir. Et puis deuxièmement les effectifs avaient augmenté notamment avec la première crise du M23 il y a dix ans, où il y avait des forces sud-africaines et tanzaniennes qui étaient venus s’intégrer à la Monusco pour combattre le M23. Ce qui avait provoqué une deuxième hausse des effectifs.

Maintenant pour cette deuxième crise du M23, c’est plus qu’une présence symbolique. Ils sont à côté d’un conflit qu’ils regardent, et c’est ce que leur reproche depuis plusieurs années la population congolaise, parce que ça fait plusieurs années qu’il y a des manifestations. Au début c’était une colère de la population, elle sait que les Casques bleus ne font pas grand-chose, ne l’aident pas et par conséquent maintenant, elle est simplement dans la désillusion.

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31 mai 2023, 08:22