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Un colloque sur les 75 ans de la Déclaration universelle des droits de l'Homme. Un colloque sur les 75 ans de la Déclaration universelle des droits de l'Homme. 

75 ans après l'adoption de la DUDH, un bilan des droits humains en Afrique

À l’occasion de la Journée mondiale des Droits de l’homme, un colloque international a été organisé les 8 et 9 décembre par le Centre de recherche et d’action pour la paix (CERAP) à Abidjan en Côte d’Ivoire autour du thème «75 ans après la Déclaration universelle des droits de l’homme: quel bilan des droits humains en Afrique?». Entretien avec le père Fidèle Ingiyimbere, l'organisateur de cette rencontre.

Jacques Ngol, SJ – Cité du Vatican

L’édition 2023 de la Journée mondiale des Droits de l’homme célébrée le 10 décembre autour du thème: «Liberté, Égalité et Justice pour tous», coïncidait avec le 75ème anniversaire de l’adoption de la Déclaration universelle des droits de l’Homme. Pour faire le bilan de ces 75 ans, le Centre de recherche et d'action pour la paix, CERAP, en partenariat avec le conseil national des Droits de l’Homme de Côte d’Ivoire a organisé un colloque, une occasion d'évaluer et d'apprécier l'apport de cette déclaration sur les droits humains en Afrique.

Dans une interview accordée à Radio Vatican, le père Fidèle Ingiyimbere, l’organisateur de ce colloque, fait savoir que «l'objectif visait d'abord à célébrer cet événement majeur dans l'histoire de l'humanité». Il y a 75 ans, explique-t-il, «un texte était soumis à l'adoption à l'Assemblée générale de l'ONU; ce texte était proposé alors que l'Afrique était encore sous la colonisation et n'était pas vraiment très représentée, sinon par quelques pays, quatre pays». Cependant, après les indépendances, «beaucoup de pays, sinon tous les pays africains» ont adopté cette déclaration et même des instruments y référents.

Par ailleurs, l’objectif secondaire de ce colloque était de permettre d’évaluer et de voir, «comment finalement cette déclaration qui naît alors que l'Afrique était sous la colonisation l’a aidé dans le processus de décolonisation; faire un bilan de l'effet de cette déclaration sur le respect et l'état des droits humains en Afrique».

La déclaration universelle des Droits de l'Homme, un idéal

La Déclaration universelle des droits de l’homme, (DUDH) «est un idéal», elle pose «des fondements pour ce qui est proposé à tous les peuples et à toutes les nations à atteindre», affirme le prêtre jésuite. Dans cette perspective, poursuit-il, «personne n'est éliminé, vu son caractère universel». Cette déclaration, à partir de son préambule, affirme que «tous les Hommes naissent libres et égaux en droit et en dignité». Ainsi, il ne devrait pas y avoir de «discrimination, tout le monde était inclus dans ce mouvement de liberté, d'égalité, de justice pour tous». Toutefois, déclare l’enseignant chercheur, quelques écarts dans l’application concrète de ces textes sont à observer, ce qui rentre dans le cadre des défis à relever.

Pour le père Ingiyimbere, le premier défi à relever, c’est de ne pas «politiser ou d'utiliser les droits de l'homme de manière idéologique», s’appuyant sur l’expérience concrète des pays d’Afrique où «on sent beaucoup de frustration quand les puissances occidentales utilisent les droits de l'homme juste pour brimer, pour leurs intérêts; alors que quand leurs intérêts sont menacés, ces puissances occidentales oublient complètement les droits humains». Par ailleurs, il propose un effort collectif pour parvenir à «fédérer la communauté internationale, notamment, toutes les nations qui ont signé et acceptent ce texte relatif aux droits de l'homme, de les prendre pas seulement comme idéal, mais de s'engager moralement».

Sur le plan régional africain, il faut, poursuit-il encourager les Africains, à «prendre ce texte des droits humains sérieusement, que ce soit dans les Constitutions ou d'autres textes qui inspirent des politiques qui changent, qui touchent la vie des gens, respectent la dignité, l'égalité et la liberté des gens».

Ces défis, assure-t-il, viennent bloquer quelques progressions dans le domaine des «droits politiques et civils, notamment dans certains pays où beaucoup d’opposants sont tués, des manifestations interdites, et puis le changement des Constitutions et les coups d'État». Ces défis à relever ne sont pas seulement sur le plan institutionnel, il y a également l’engament à promouvoir au niveau des populations pour parvenir à arracher cette liberté promue par les textes de cette Déclaration universelle des droits de l’homme. Car, «le droit s’arrache, il ne se donne pas». «Les gens doivent se battre pour leurs droits, la société civile et les individus doivent s'imprégner de ces droits et alors les réclamer envers ceux qui veulent les violer», conseille le père Ingiyimbere.

Participants au colloque sur les 75 ans de la déclaration universelle des Droits de l'Homme au CERAP.
Participants au colloque sur les 75 ans de la déclaration universelle des Droits de l'Homme au CERAP.

Une aide dans le combat pour les indépendances

«La manière dont la déclaration a aidé dans le combat pour les indépendances, c'est un élément positif», affirme l’enseignant chercheur du CERAP, expliquant comment cette «déclaration a poussé à mettre en place un système continental des droits humains et a inspiré des mouvements d'activisme, avec des sociétés civiles bien engagées». En outre, cette déclaration a aidé certains pays qui «veulent vraiment voir leurs citoyens vivre dignement, au moins du point de vue économique et social; ainsi que certains gouvernants qui s'engagent pour les droits civils et politiques» à s'engager pour défendre leurs droits, notamment «les droits socio-économiques».

En matière de justice, la Déclaration universelle des droits de l’homme a permis de mettre sur pied, sur le plan continental «une Cour africaine des droits de l'homme et des peuples», ainsi que certaines cours au niveau régional, notamment «la Cour communautaire de la CEDEAO» et autres. Ces différentes instances de justice veillent au respect des droits humains et pour permettre aux personnes de ne pas être «arrêtées arbitrairement et d'avoir un procès équitable, d'être entendu par une cour impartiale». Tout cela permet d'affirmer que «même au niveau de la justice, les droits de l'homme ont contribué à mettre en place des structures, des institutions qui voudraient faire respecter ces droits». Cependant, «il y aurait peut-être des progrès à faire maintenant quant à l'application et à la réalisation de ce qui est consigné dans le texte», conclut le père Fidèle Ingiyimbere.

Suivre le Père Fidèle Ingiyimbéré, enseignat chercheur au CERAP à Abidjan en Côte d'Ivoire sur l'apport des Droits de l'Homme en Afrique.

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12 décembre 2023, 12:14