Les évêques français s’opposent à la suppression de l'aide médicale d'État
Jean-Benoît Harel - Cité du Vatican
L’aide médicale d’État (AME), nouveau cheval de bataille des évêques de France? Ce dispositif, qui permet aux étrangers en situation irrégulière de bénéficier d'une prise en charge à 100% des soins médicaux, pourrait être supprimé dans la future loi «Immigration et Intégration». Dans un communiqué publié jeudi 7 décembre, les évêques de France ont manifesté leur «inquiétude devant cette possibilité de suppression de l’AME» au nom de la dignité humaine.
Un parcours législatif incertain
À l’origine, ce texte visant à mieux réguler l’immigration en France ne contenait pas la suppression de l’AME. Mais lors de la première lecture, la droite sénatoriale a inscrit cette mesure dans le texte, lui préférant une «aide médicale d’urgence» réservée aux soins contre les maladies les plus graves, aux vaccins ainsi qu’aux soins liés à la grossesse. Le texte sorti du Sénat mi-novembre contenait la suppression de l’AME. Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin s’en était satisfait, y voyant «un bon compromis qui allie fermeté et humanité».
Mais, à l’Assemblée, lors de l’examen par la commission des Lois, le dispositif a été réintégré. Les députés réunis en séance plénière à partir du lundi 11 décembre ne devraient pas revenir dessus, mais le sujet pourrait toutefois réapparaitre, comme le souhaitent certains députés de droite. Très débattu, ce dispositif relève de l’humanité la plus élémentaire pour certains quand d’autres y voient un «appel d’air migratoire». En 2022, le dispositif de l’AME comptait 415 000 bénéficiaires pour un coût total de 1,186 milliard d’euros, selon un rapport d'information parlementaire publié en mai 2023.
Un dispositif indispensable au respect de la dignité hunaine
La Conférence des Évêques de France a pris position contre la suppression de l’aide médicale d’État, rappelant une tribune de 3000 soignants début novembre exigeant le maintien de ce dispositif «outil de lutte contre les exclusions (…) essentiel à la santé des individus et à la santé publique». Saluant le retour du dispositif dans le texte discuté à l’Assemblée, les 7 évêques signataires rappellent en citant le Pape François que «le soin est médical mais il est aussi, de manière complémentaire et inséparable, «lien», par l’intermédiaire de chacun et tous les hommes et femmes de bonne volonté sont invités à vivre l’amitié sociale» (Fratelli Tutti, 6).
À propos de ce dispositif destiné aux personnes présentes sur le sol français de manière irrégulière, les évêques poursuivent: «leur permettre une vie digne c’est aussi leur permettre de vivre avec leurs familles, d’apprendre notre langue, c’est respecter leurs droits légaux et fondamentaux». Pour eux, ce dispositif est nécessaire pour les bénéficiaires afin qu’ils puissent «prendre part à la vie de notre pays».
Le texte prend ensuite l’exemple de Calais «où la détresse ne cesse de grandir». Autour de cette ville du nord de la France, point de passage vers le Royaume-Uni, des milliers de migrants attendent de trouver un moyer de passer la frontière, dans des conditions souvent difficiles. Concluant leur déclaration, les signataires appellent à «prendre soin des plus fragiles et ainsi de nos sociétés et de notre maison commune».
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