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L'immeuble de Beyrouth où a été tué Salah Al Arouri le 2 janvier. L'immeuble de Beyrouth où a été tué Salah Al Arouri le 2 janvier.  (AFP or licensors)

L'extension de la guerre entre Israël et le Hamas inquiète le Liban

L'élimination le 2 janvier d'un haut-cadre du Hamas dans la banlieue sud de Beyrouth suscite de grandes craintes que le conflit entre l'État hébreu et le mouvement islamiste gagne le pays du Cèdre, déjà très fragilisé. La communauté internationale appelle à la retenue.

Olivier Bonnel-Cité du Vatican

Saleh Al Arouri, 57 ans, était une figure-clé du Hamas. Depuis plusieurs années le numéro deux du bureau politique du mouvement islamiste habitait à Beyrouth, après des années d'exil en Syrie puis en Turquie et son expulsion de Cisjordanie. Le 2 janvier au soir, il a été tué en plus de six autres personnes dans une frappe de drone visant l'appartement où il se trouvait, dans la banlieue sud de la capitale libanaise. 

Si cette frappe n'a pas été revendiquée, beaucoup y voient la main d'Israël. Un assassinat ciblé de haute précision. Mercredi soir 3 janvier, un haut responsable de sécurité a expliqué que le numéro deux du Hamas palestinien avait été ciblé par des «missiles guidés» tirés depuis un avion de chasse israélien, évoquant un tir particulièrement précis. Originaire de Ramallah, Saleh Al Arouri avait rejoint le Hamas en 1987 et avait développé l’infrastructure du mouvement en Cisjordanie. 

Craintes d'une «fuite en avant»

Sa mort en plein quartier chiite de Beyrouth, fief du Hezbollah est considéré par plusieurs observateurs comme un tournant dans la guerre Israël-Hamas. Pour la première fois en effet, depuis 2006, Beyrouth et le quartier de la milice chiite, soutien du Hamas sont directement visés par les Israéliens. «Il s'agit d'une escalade préoccupante, car elle vient accentuer le risque d'un second front et d'un embrasement de la région» analyse Karim Emile Bitar, ancien doyen de l'Université Saint Joseph de Beyrouth et spécialiste de la vie politique libanaise.

«Ce qui est également très inquiétant est qu'Israël n'ait pas pris le soin d'avertir son allié américain qui s'efforce de l'appeler à la retenue et à contenir une étendue de la guerre» poursuit le chercheur. Le Hezbollah a toujours mis en garde contre une attaque sur ses terres. Dans un discours mercredi soir 3 janvier devant ses partisans, Hassan Nasrallah, chef du Hezbollah a assuré que ce meurtre ne «resterait pas impuni».

L'ouverture d'un nouveau front entre le Liban et Israël, alors que la situation est déjà très tendue à la frontière entre les deux voisins depuis le 7 octobre serait une catastrophe aux yeux de nombreux Libanais. Le pays est déjà exangue économiquement. «Même des partisans du Hezbollah ne veulent pas d'une guerre ouverte avec Israël» explique Karime Emile Bitar qui rappelle que selon plusieurs sondages, 70 à 80 % des Libanais refusent la guerre.

Ce nouvel épisode ravive les craintes d'une contagion du conflit à tout le Moyen-Orient. «Personne ne sortira gagnant d'une escalade entre le Liban et Israël» a confié la cheffe de la diplomatie française Catherine Colonna au premier ministre libanais sortant Najib Mikati. Le Secrétaire d'Etat américain Anthony Blinken entame ce jeudi 4 janvier une nouvelle tournée diplomatique dans la région afin de tenter d'apaiser la situation.

Karim Emile Bitar, spécialiste de la vie politique libanaise

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04 janvier 2024, 10:13