Au Pérou, l’Église exhorte à lutter contre la pauvreté en hausse
Marie Duhamel – Cité du Vatican
Ce dimanche, le Pérou est devenu le deuxième pays, après la Pologne, à sortir d’un programme de soutien du Fond monétaire international, l’occasion pour le FMI de faire le point sur sa santé économique. Malgré des tensions sociales liées à l’arrivée au pouvoir de Dina Boluarte en janvier 2023 et aux effets notables du changement climatique, le Fonds note une croissance qui repart et devrait atteindre 2,5% cette année, mais aussi un niveau de devise suffisant, une dette extérieure faible et un déficit public contenu.
Des statistiques déchirantes
Pourtant, la pauvreté atteint un niveau record, comme l’indique un rapport de l’Institut national des statistiques publié il y a deux semaines. Le président de la Conférence épiscopale s’est ému la semaine dernière dans une déclaration de ces «déchirantes statistiques témoignant de la magnitude de la pauvreté» dans le pays. Près d’un tiers de la population est touchée, 29% contre 27,5% l’an dernier. Ce sont 9,8 millions de personnes résidant encore essentiellement dans les zones rurales, bien que le taux de pauvreté augmente dans les villes. Les populations autochtones et les enfants sont particulièrement touchés. «43,1% des petits âgés de 6 mois à 3 ans souffrent aujourd’hui d’anémie», déplore Mgr Miguel Cabrejos Vidarte, OFM. Cela révèle, dit-il, la cruelle réalité que vit notre pays. C’est une situation qui «interpelle le ciel». Et le président de la Conférence épiscopale et archevêque de Trujillo, une des trois villes les plus chères du pays, d’interpeler les fidèles.
L’option préférentielle pour les pauvres
La clameur des pauvres ainsi que leurs souffrances retentissent dans le cœur de l’Église, lance-t-il. Parce que «Jésus enseigna à ses disciples que la vraie essence de la religion implique de prendre soin des plus défavorisés», l’option préférentielle pour les pauvres est inhérente à la foi, écrit Mgr Cabrejos Vidarte, soulignant que la mission de l’Église est de poursuivre le travail de Jésus, d’évangéliser les pauvres et de libérer les opprimés. Pour l’archevêque de Trujillo, toute indifférence face à la pauvreté équivaudrait à être complice de l’injustice et des souffrances de ses concitoyens. Il appelle donc les fidèles à entendre leur cri et à réagir en se retroussant les manches, convaincus comme le Pape François que «si on marginalise les pauvres, comme s’ils étaient coupables de leur condition, la démocratie entrerait en crise et les politiques sociales seraient un échec» et comme le Pape Jean-Paul II qu’il ne faut pas se contenter de faire l’aumône pour «travailler à la transformation des structures qui engendrent la pauvreté».
L'Église, la société civile et les politiques appelés à l'action
Il faut ainsi redoubler d’efforts, clame Mgr Cabrejos Vidarte, pour garantir des services de qualité dans les domaines de la santé, de l’éducation et de la sécurité sociale. Il souhaite également un accès équitable aux instances de participation des citoyens, car les plus défavorisés ont eux-aussi des droits fondamentaux.
Au nom de la Conférence des évêques, il assure que l’Église poursuivra son travail de défense et de promotion du droit des pauvres pour que leur dignité soit respectée. Elle renforcera les synergies entre ses différentes œuvres sociales, pour les rendre plus efficaces.
Mais l’Église interpelle aussi la société civile pour qu’elle veille à la réalisation des entreprises sociales et, bien sûr, les politiques afin «qu’ils assument leurs responsabilités» et s’en prennent aux causes de la pauvreté et de l'inégalité «par le biais de la coresponsabilité sociale et de la solidarité» afin de les surmonter et de progresser vers un développement humain intégral. «Il est nécessaire, juge l’archevêque, de promouvoir des initiatives et des stratégies visant à attirer les investissements, mais aussi des politiques sérieuses de lutte contre la corruption, afin de garantir un avenir plus digne et des possibilités de progrès à tous». C’est ainsi toute la société péruvienne qui est appelée là à l’action.
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