3 ans de régime taliban, l'Unesco s'inquiète pour l’éducation des filles
Augustine Asta – Cité du Vatican
«Toute personne a droit à l’éducation». La Déclaration universelle des droits de l’homme (1948) et les nombreux autres instruments internationaux du domaine des droits de l’homme, le stipulent en toute clarté. Malheureusement, filles et femmes afghanes voient ce droit humain fondamental bafoué. Selon le dernier rapport de l’Unesco publié jeudi 15 août, elles sont au total 1,4 million de filles afghanes à avoir été «délibérément privées de scolarisation depuis 2021. Ce qui représente une augmentation de 300 000 depuis le précédent décompte effectué par l'Unesco en avril 2023, avec davantage de filles atteignant l'âge limite de 12 ans chaque année». À cela s’ajoutent les «filles qui n'étaient déjà pas scolarisées avant l'introduction des interdictions. Ce sont désormais près de 2,5 millions de filles qui sont privées de leur droit à l'éducation dans le pays, soit 80% des filles afghanes en âge d'être scolarisées».
Les filles et les femmes plus que jamais vulnérables
Le même rapport précise aussi que l’accès des filles à l'enseignement primaire a également fortement diminué, «avec 1,1 million de filles et de garçons en moins à l'école». Trois ans exactement après la chute de Kaboul, l’Unesco affiche sa préoccupation. «Aujourd'hui, l'Afghanistan est le seul pays au monde à interdire l'accès à l'éducation aux filles de plus de 12 ans et aux femmes. Cette situation doit nous interpeller tous», a déclaré Audrey Azoulay, la directrice générale de l'institution internationale. Avant d’ajouter: «le droit à l'éducation ne peut être négocié ou compromis. La communauté internationale doit rester pleinement mobilisée pour obtenir la réouverture inconditionnelle des écoles et des universités aux filles et aux femmes afghanes».
Deux décennies de progrès anéanties
Les nouvelles données de l’Unesco témoignent de la gravité de la situation. Le droit à l’éducation des filles en Afghanistan est pris en otage. Anéantissant ainsi «deux décennies de progrès constants en matière d'éducation en Afghanistan, et l'avenir d'une génération entière est désormais menacé».
L'Afghanistan ne comptait plus que 5,7 millions de filles et de garçons à l'école primaire en 2022, contre 6,8 millions en 2019. Le rapport révèle aussi que le nombre d'élèves inscrits dans l'enseignement primaire a également chuté de manière drastique depuis 2021. «Cette déscolarisation de plus en plus massive, pourrait conduire à une nette augmentation du travail des enfants et des mariages précoces».
L’organisation mise sur les méthodes d'apprentissage alternatives pour permettre aux filles et aux femmes afghanes de jouir pleinement de leur droit à l’éducation. Des programmes basés sur l'implication des communautés locales dans 20 provinces du pays ont été mis en place. «Plus de 1 000 animateurs, dont 780 femmes, ont été formés pour dispenser des cours d'alphabétisation. Ces cours ont déjà bénéficié à plus de 55 000 jeunes, en grande majorité des filles, dans près de 1 900 villages». Compte tenu du grand nombre des jeunes déscolarisés et de la situation complexe sur le terrain, l’enseignement à distance via la radio et la télévision a été mis à contribution.
L’organisation multiplie depuis 2021, avec l’appui de ses partenaires, des plaidoyers internationaux pour le retour des filles et des femmes afghanes à l'école. Par le biais de centres de formation pour les enseignants afghans, l'Unesco apporte aussi son appui aux réfugiés afghans et aux populations déplacées des pays voisins tels que le Pakistan, le Tadjikistan et l'Iran.
L’organisation rappelle cependant que tous ces modes d'apprentissage alternatifs contribuent certes à renforcer la résilience de la jeunesse afghane, mais ne peuvent aucunement remplacer les cours en présentiel dans une salle de classe. D’où l’appel lancé par la directrice générale de l'Unesco à l’endroit de la communauté internationale en vue d'une mobilisation pour le plein rétablissement du droit à l'éducation des filles et des femmes en Afghanistan.
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