Encourager le dépistage pour réduire la propagation du cancer du sein
Entretien réalisé par Christian Losambe, SJ – Cité du Vatican
Organisée chaque mois d’octobre, la campagne annuelle mondiale «Octobre rose» est destinée à sensibiliser les femmes au dépistage du cancer du sein et à récolter des fonds pour la recherche. Aujourd’hui, le cancer du sein demeure l’une des préoccupations sanitaires majeures, et est à la fois le plus fréquent et le plus meurtrier chez les femmes. L’OMS estime qu’une femme sur huit sera atteinte de cette maladie au cours de sa vie, ce pourquoi les femmes doivent se soumettre à un dépistage régulier.
Dans le cadre de la célébration de la Journée internationale de sensibilisation au cancer du sein, au cours d’un entretien accordé à Radio Vatican–Vatican News, la gynécologue-obstétricienne Tendobi Mbamba Céline, du Centre hospitalier Monkole de Kinshasa, en RD Congo, a souligné qu’«il est possible de réduire la prévalence du cancer du sein en mettant en œuvre des stratégies fondées en matière de prévention, de dépistage, de détection précoce et de traitement». Voici l’intégralité de cette interview.
Que pourrait être à la base de la prévalence croissante des cas des femmes atteintes de cancer du sein, alors que chaque année est organisée une campagne de sensibilisation?
Effectivement, nous avons remarqué qu'il y a de plus en plus de jeunes femmes qui viennent avec des problèmes de cancer du sein. Autrefois, nous avions des patients qui présentaient le cancer du sein à un âge assez avancé, mais maintenant, nous avons des jeunes dames de moins de 40 ans qui en souffrent. Je pense qu'il faut voir les raisons du côté des facteurs de risque. Nous avons remarqué que le mode de vie a beaucoup changé: nous sommes devenus de plus en plus sédentaires avec des excès de poids, ce qui fait qu'il y a de plus en plus des cas de cancer du sein chez les jeunes femmes. Parmi les étiologies, il y a également les mutations génétiques. Il y a, en effet, 10 à 30 % des femmes qui subissent des mutations génétiques, mutations de BRCA1 et BRCA2, qui sont à la base de cancers du sein.
Par ailleurs, il y a les facteurs hormonaux, parmi lesquels une puberté précoce, une ménopause tardive, une multiparité et une première grossesse obtenue tardivement. C'est aussi dans ce groupe des facteurs hormonaux qu'on retrouve un nombre très élevé des femmes atteintes de cancer du sein.
Pourquoi le cancer du sein menace-t-il encore la santé malgré l'avancée de la science et les prodigieuses découvertes dans le domaine médical?
Lorsque nous organisons des campagnes de dépistage du cancer du sein, on s'attendrait à ce que les femmes saines, ou présumées saines, viennent en consultation. Malheureusement, on remarque que ce sont surtout les femmes avec des cancers déjà avancés qui se présentent. Donc, je pense que le problème se retrouve du côté de l'information. Or, lorsque la maladie est déjà très avancée, on peut la soigner mais on n'est pas sûr de la guérir. Par contre, lorsqu'une femme vient précocement, elle a beaucoup plus de chance d'être guérie. Même si elle se considère comme saine, elle vient pour le dépistage, on constate des lésions suspectes, le bilan est établi et lorsqu’on se rend compte qu'elle est malade, on la soigne à temps. Il y a également la complexité biologique et d’autres facteurs environnementaux qui pourraient justifier cette prévalence croissante des cas des femmes atteintes de cancer du sein.
L'OMS estime qu'une femme sur huit sera atteinte d'un cancer de sein au cours de sa vie. Instruisez-vous également les femmes sur la manière dont elles peuvent elles-mêmes détecter de façon précoce un début de cancer de sein pour éviter de le découvrir tardivement?
Oui, en effet! Toutefois, il faudrait signaler une chose: chez la jeune fille ou la jeune dame, les seins sont beaucoup plus denses. Il y a beaucoup d'eau et donc il est difficile de poser les diagnostics de cancer au stade initial. Lorsque l'âge avance, il y a beaucoup plus de facilité, surtout avec la mammographie, qui est indiquée chez les femmes de plus de 40 ans, où les seins sont moins denses et les lésions beaucoup plus visualisées. Mais le plus important, c'est la sensibilisation à l’autopalpation.
La femme, une fois par mois ou chaque deux, trois mois, devrait palper ses seins pour rechercher une quelconque masse. Lorsqu’elle remarque une situation anormale, elle doit consulter un médecin pour présenter ce qu’elle a remarqué. Et c’est le médecin qui lui dira, après l'examen clinique, si c'est normal ou pas. Et s'il a besoin d’explorations, par exemple une échographie ou une mammographie, il le fera pour confirmer la lésion ou dire qu'il ne s'agit pas d'une lésion suspecte.
19 octobre 2024, une autre journée pour parler davantage de la sensibilisation aux cancers du sein. Quel serait votre dernier mot et quel message pourriez-vous adresser à toutes ces femmes qui luttent contre cette maladie?
Je soulignerais, tout d’abord, que le cancer du sein existe bel et bien et est meurtrier. Si vous ne vous faites pas soigner correctement, vous pouvez mourir parce que le cancer du sein tue. La chance que nous devons saisir, c'est de détecter la pathologie à temps pour augmenter les chances de survie. J’inviterais, ensuite, toutes les personnes à prendre conscience de l'importance du dépistage précoce.
Par rapport aux personnes atteintes du cancer du sein, je leur témoigne toute ma compassion et toute ma sympathie. Elles doivent se battre, tenir bon et savoir que leur résilience inspire beaucoup de monde. Elles ne sont pas seules. J'encourage aussi toutes les personnes qui s’engagent dans leur domaine pour sauver beaucoup de vies. Nous comptons sur eux, sur leur courage, sur leur bravoure pour qu'ils continuent à se battre pour trouver des molécules adéquates pour continuer à soigner les femmes atteintes de cette maladie.
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