Messe à Sainte-Marthe: la culture de l’indifférence est à l’opposé de l’amour de Dieu
Alessandro Di Bussolo – Città del Vaticano
La messe célébrée par le Saint-Père de ce 8 janvier était à l’intention de Mgr Giorgio Zur, ancien nonce apostolique en Autriche, résident de la Maison Sainte-Marthe, décédé la veille à minuit. Dans son homélie, le Pape s’est appuyé sur l’Évangile du jour (Mc 6, 34-44) et sur la lecture, extraite de la première lettre de saint Jean (1 Jn 4, 7-10).
«C’est lui qui nous a aimés»
«Aimons-nous les uns les autres, puisque l’amour vient de Dieu», a d’abord déclaré le Saint-Père, citant les mots de l’apôtre Jean. «Tel est le mystère de l’amour, a continué le Pape, Dieu nous a aimés le premier. Il a fait lui le premier pas». Un pas «vers l’humanité qui ne sait pas aimer», qui «a besoin des caresses de Dieu pour aimer». «Et ce premier que Dieu a fait, c’est son Fils: il l’a envoyé pour nous sauver et pour donner un sens à la vie, pour nous renouveler, pour nous recréer», a souligné François.
La compassion, un élan du cœur vers les autres
Puis le Saint-Père s’est arrêté sur l’extrait de l’Évangile selon saint Marc, qui décrit la multiplication des pains et des poissons. Le Seigneur a réalisé ce miracle par «compassion» pour la foule nombreuse qu’il voyait sur les rives du lac de Tibériade, «parce qu’ils étaient comme des brebis sans berger», écrit saint Marc. «Le cœur de Dieu, le cœur de Jésus s’émeut et il voit, il voit ces gens, et il ne peut pas rester indifférent», a analysé le Pape. «L’amour est inquiet. L’amour ne tolère pas l’indifférence. L’amour compatit. Mais la compassion signifie de mettre en jeu le coeur; ça signifie miséricorde. Mettre en jeu son propre cœur vis-à-vis des autres: c’est cela l’amour. L’amour, c’est mettre en jeu son cœur pour les autres», a expliqué le Souverain Pontife.
Des disciples indifférents
Puis le Pape est revenu sur la scène où Jésus «se mit à les enseigner longuement». Les disciples semblent s’ennuyer, s’impatienter: «L’endroit est désert et déjà l’heure est tardive. Renvoie-les : qu’ils aillent dans les campagnes et les villages des environs s’acheter de quoi manger», poursuit l’évangéliste. Les disciples demandent presque «qu’ils se débrouillent» et qu’ils s’achètent eux-mêmes du pain. Les disciples «savaient qu’ils avaient du pain pour eux, et ils voulaient garder celui-là. C’est l’indifférence», a fait remarquer le Pape. «Les gens n’intéressaient pas les disciples: Jésus les intéressait, parce qu’ils les aimaient bien. Ils n’étaient pas méchants: ils étaient indifférents. Ils ne savaient pas ce que signifiait aimer. Ils ne savaient pas ce que ce signifiait la compassion. Il ne savaient pas ce que signifiait l’indifférence. Ils ont dû pécher, trahir le Maître, abandonner le Maître, pour comprendre le cœur de la compassion et de la miséricorde», a expliqué le Saint-Père.
Et la réponse de Jésus est incisive: «Donnez-leur vous-mêmes à manger». «Telle est le combat entre la compassion de Jésus et l’indifférence, l’indifférence qui se répète toujours dans l’histoire, toujours… Beaucoup de gens sont bons, mais ils ne comprennent pas les besoins des autres, ils ne sont pas capables de compassion», d’après le Pape, sans doute «parce que l’amour de Dieu n’est pas entré dans leur cœur ou ils ne l’ont pas laissé entrer».
Une photo pour symboliser «la culture de l’indifférence»
Le Saint-Père a alors décrit une photo qui se trouve à l’Aumônerie apostolique. Un cliché de Daniele Garofani, aujourd’hui photographe de L’Osservatore Romano, en revenant d’un service de distribution de repas à des sans-abris avec le cardinal Konrad Krajewski. On y voit des gens «tous bien couverts», sortant d’un restaurant, satisfaits d’un bon repas. Il y a aussi «un sans-abri, par terre, qui fait comme ça… », a continué le Pape en mimant le geste de celui qui demande l’aumône. Le photographe a réussi «à saisir ce moment où les gens regardent d’un autre côté, pour que les regards ne se croisent pas». Et c’est cela, a noté le Saint-Père, «la culture de l’indifférence. C’est ce qu’ont fait les apôtres» en espérant que la foule s’arrange pour trouver de la nourriture et leur laisser leurs réserves.
Que Dieu guérisse notre cœur
Le Souverain Pontife a ensuite insisté: «L’opposé le plus quotidien à l’amour de Dieu, à la compassion de Dieu, c’est l’indifférence: ‘Je suis satisfait, il ne me manque rien. J’ai tout, j’ai mon assurance pour cette vie, et aussi pour la vie éternelle, puisque je vais à la messe tous les dimanches, je suis un bon chrétien’. ‘Mais en sortant du restaurant, je regarde dans une autre direction’», a-t-il décrit. Puis le Pape a invité l’assemblée à la réflexion et à la prière: «ce Dieu qui fait le premier pas, qui a compassion, qui fait miséricorde, et tant de fois, notre attitude est l’indifférence. Prions le Seigneur pour qu’il guérisse l’humanité, à commencer par nous: que mon cœur guérisse de cette maladie qui est la culture de l’indifférence».
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