Messe à Sainte-Marthe: pas de «réponses de compromis» aux questions du Seigneur
Debora Donnini – Cité du Vatican
«Où est ton frère Abel ?» (Gn 4,9). C’est ainsi que le Seigneur interpelle Caïn dans le passage biblique proposé par la lecture de ce jour. «Une question embarrassante», comme l’a qualifiée le Pape, et à laquelle nous sommes désormais appelés à répondre nous-mêmes, sans compromis. Caïn au contraire cherche à se défendre face à Dieu: «Mais en quoi cela me concerne, la vie de mon frère? Est-ce que j’en suis, moi, le gardien? Je m’en lave les mains. Et c’est comme ça que Caïn cherche à fuir le regard de Dieu», a fait remarquer le Pape.
Répondre aux questions embarrassantes
Le Souverain Pontife a ensuite évoqué les «questions qui dérangent» formulées par Jésus. À son disciple Pierre par exemple: «M’aimes-tu ?» (Jn 21, 15 et s.); à ses disciples: «Au dire des gens, qui est le Fils de l’homme ?» (Mt 16,13) puis «Et vous, que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je ?» (Mt 16,15). La question posée par Dieu à Caïn est du même type, a insisté le Pape, elle est dérangeante, «et nous connaissons tellement de réponses» pour nous dérober, par exemple «je ne m’introduis pas dans la vie d’un autre». En bref, «nous répondons un peu avec des principes génériques qui ne disent rien mais qui disent tout, tout ce qu’il y a dans le cœur», a expliqué François.
Le Pape a ensuite multiplié les exemples actualisant ce dialogue entre Dieu l’homme: «Où est ton frère?», «Je ne sais pas», peut-on répondre, «Oui, oui, c’est sûr il déjeune avec la Caritas de la paroisse, oui, on lui donnera sûrement à manger», ou encore, à propos d’un frère emprisonné, «Ah, il est en train de payer ce qu’il mérite. Voilà ce qu’il a fait, qu’il le paye. Nous, on est si fatigué de tous ces délinquants dans la rue: qu’il paye», à propos de celui «qui travaille au noir, neuf mois par an, pour continuer, après trois mois, une autre année» on dira «Eh bien, aujourd’hui il n’y a pas de travail et on prend ce qu’on peut…», «une autre réponse de compromis», comme l’a expliqué le Pape.
Penser à son frère dans le besoin
Celui-ci a ensuite proposé un rapprochement avec l’Évangile. «Le Seigneur me demande ‘Où est ton frère?’, mettons le nom des frères que le Seigneur nomme au chapitre 25 de Matthieu: le malade, l’affamé, l’assoiffé, celui qui n’a pas de vêtement, ce petit frère qui ne peut pas aller à l’école, le drogué, le prisonnier… où est-il? Où est ton frère dans ton cœur? Y a-t-il une place pour ces gens dans notre cœur? Ou nous parlons, oui, des gens, nous allégeons un peu notre conscience en donnant une aumône». Mais il ne s’agit pas qu’on nous dérange trop, «parce qu’avec ces choses sociales de l’Église», cela finit par ressembler à «un parti communiste et ça nous fait mal. Ça va bien, mais le Seigneur a dit: où est ton frère? Ce n’est pas le parti, c’est le Seigneur», a souligné le Pape. «Nous sommes habitués, a-t-il à nouveau fait remarquer, à donner des réponses de compromis, des réponses pour échapper au problème, pour ne pas voir le problème, pour ne pas toucher le problème».
Rester réaliste
En conclusion de son homélie, le Saint-Père a demandé de garder en mémoire ces personnes que nomme l’évangéliste saint Matthieu. Autrement, «une vie obscure» commence à émerger, et «lorsque nous portons cette vie obscure sans prendre en main ce que le Seigneur Jésus nous a enseigné, le péché se tient à la porte, tapi, attendant pour entrer. Et nous détruire». Le Pape a aussi exhorté à garder en mémoire la question posée par Dieu à Adam: «Où es-tu donc ?» (Gn 3,9). «Et Adam se cache de honte, de peur. Peut-être que nous ressentons nous aussi cette honte. Où est ton frère? Où es-tu? Dans quel monde vis-tu, pour ne pas te rendre compte de ces choses, de ces souffrances, de ces douleurs?», a insisté François, avant de conclure: «Ne te dérobe pas à la réalité. Répondre ouvertement, avec loyauté, voire avec joie, à ces deux questions du Seigneur».
Merci d'avoir lu cet article. Si vous souhaitez rester informé, inscrivez-vous à la lettre d’information en cliquant ici