Le Pape dans l'avion :«J'ai pleuré avec les Rohingyas»
Par Olivier Bonnel
Comme le veut la tradition, le Pape François a donné une conférence de presse à bord de l’avion qui le ramenait de l’Asie, au terme de son voyage en Birmanie et au Bangladesh. L’occasion de dresser un bilan de son 21 ème voyage apostolique et d’évoquer la question des Rohingyas, de l’islamisme, de l’évangélisation dans ces pays ou encore de ses relations avec la Chine. En voici la synthèse.
Le Souverain Pontife a d’abord été interrogé sur la crise des Rohingyas, le fait de prononcer le nom de la minorité et sur la manière dont il transmet ses messages. « Pour moi la chose la plus importante est quand le message arrive » a expliqué le Saint-Père, prenant l’exemple d’un adolescent turbulent : s’il nous claque la porte au nez, il n’y a pas de communication, pas de message. « J’ai donc vu que si dans les discours officiels, j’avais prononcé le mot Rohingyas, j’aurais claqué la porte au nez ». Mais j'ai décrit les situations, les droits, sans en exclure aucun, la citoyenneté, pour me permettre dans les entretiens privés de faire autrement.
Le Pape a ainsi fait part de sa satisfaction de dialoguer, de faire parler l'autre, de dire son opinion, c’est comme cela qu’il a pu faire passer son message. Ceci est très important dans la communication : la préoccupation que le message arrive, a-t-il dit aux journalistes.
La rencontre avec les Rohingyas
Le Saint-Père est également revenu sur la rencontre avec les Rohingyas, moment particulièrement fort de son voyage au Bangladesh. « Je savais que je rencontrerais les Rohingyas, mais je ne savais pas où et comment. Cela était la condition du voyage pour moi ». François a confié avoir pleuré en rencontrant ces réfugiés qui avaient tout perdu. Le Pape se rappelle ainsi avoir demandé pardon. Il a raconté le déroulement de cette rencontre en révélant que quelqu’un, « qui n’était pas du gouvernement du Bangladesh » leur avait demandé de le saluer sans rien dire. « Brusquement ils voulaient les chasser de la scène et là je me suis mis en colère », a confié François « Je suis un pécheur, ai-je dit, et répété plusieurs fois le mot le mot: « respect ».
« Je commençais à sentir des choses à l'intérieur de moi. Je me suis dit: “je ne peux pas les laisser partir sans leur dire un mot, j'ai demandé le micro » a poursuivi le Pape devant les journalistes. Ce qu’il a ressenti, le Pape a confié avoir pleuré, comme les Rohingyas qui le saluaient. « je cherchais à ce que cela ne se voit pas » a-t-il précisé.
L’évangélisation et le dialogue interreligieux
Le Pape a aussi été interrogé sur l’évangélisation, que certains opposent parfois au dialogue interreligieux. Faut-il opposer dialogue et évangélisation ? ont demandé les journalistes français. François a rappelé qu’évangéliser avant tout n’était pas faire du prosélytisme. L’Eglise grandit par attraction, par le témoignage a-t-il rappelé, citant son prédécesseur Benoit XVI. Le Pape a insisté sur le travail de l’Esprit Saint, qui change les cœurs, et a rappelé un épisode des JMJ de Cracovie, où il avait dialogué avec une quinzaine de jeunes : « l’un m’a posé la question: “Que pourriez-vous dire à un ami d’université, un bon ami, mais qui est athée? Qu’est-ce que vous pourriez lui dire pour le changer, pour le convertir? La réponse a été celle-ci: la dernière des choses à faire est de dire quelque chose. Tu vis ton Evangile. Et c’est lui qui demandera: ‘Pourquoi tu fais cela? »
Concernant le Bangladesh, le Saint-Père a été interrogé sur les prêtres du Bangladesh qu’il a ordonnés lors d’une messe. « Ils m’ont semblé sereins, tranquilles, conscients de la mission » a-t-il expliqué, répondant à la question de savoir s’ils avaient peur aujourd’hui d’être prêtre, dans un pays parfois difficile pour la minorité catholique, et où un prêtre avait été enlevé quelques jours avant l’arrivée du Pape à Dacca.
Un prochain voyage en Chine ?
Une question a également porté sur la Chine, après ce quatrième voyage apostolique en Asie. Le Pape a confirmé qu’aucun voyage n’était pour l’heure en préparation, « Soyez tranquilles » a-t-il dit aux journalistes. François a néanmoins rappelé que les discussions avec la Chine sont de haut niveau culturel, soulignant la prochaine exposition d’œuvres chinoises au Vatican. «Il y a aussi le dialogue politique, surtout pour l’Eglise chinoise. Il y a aussi la question de l’Eglise patriotique, l’Eglise clandestine a poursuivi le Saint-Père, précisant que l'on doit aller pas à pas, avec délicatesse, comme ce qui se fait à présent .« Les portes du cœur sont ouvertes, a t-il noté, Je crois qu'un voyage en Chine fera du bien à tous. »
« Le voyage me fait du bien quand je réussis à rencontrer le peuple du pays, le peuple de Dieu. Quand je réussis à lui parler, quand je le rencontre, le salue» a conclut le Saint-Père pour rappeler son était d’esprit à l’issue de ce voyage. (OB)
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