À Davos, l’appel du Pape pour un monde entrepreneurial humain
Delphine Allaire – Cité du Vatican
Favoriser des approches inclusives au lieu d’un individualisme qui fragmente, servir et protéger l’humain au lieu de le réduire à une machine, ou encore améliorer la productivité, le marché et les lois du travail, en rejetant la «culture jetable».
Pour ce 48ème Forum économique de Davos (Suisse) à l’ambitieux thème de: «Créer un avenir partagé dans un monde fracturé», le Pape François a appelé les sommités du monde économique à oser prendre des mesures courageuses.
Les technologies, vecteurs de l’individualisme et de la démesure
En premier lieu, vient la technologie, dont la place rampante dans nos sociétés ne cesse de modeler et remodeler le monde globalisé lui-même. Dans sa lettre en date du 12 janvier mais rendue publique la veille du forum, le 22 janvier, le Pape a mis en garde contre ces technologies qui «conditionnées par des intérêts privés et une ambition du profit à tout prix», semble davantage favoriser «la fragmentation et l'individualisme, plutôt que de faciliter des approches plus inclusives».
Dans un monde fragmenté, de nouveaux défis émergent. «Croissance du chômage, augmentation des diverses formes de pauvreté, élargissement du fossé socio-économique et nouvelles formes d'esclavage, ancrées dans des situations de pauvreté comme les conflits, les migrations ou divers problèmes sociaux», a énuméré François à l’adresse des patrons du monde entier et de quelques 70 chefs d’État et de gouvernement prenant part à ce rendez-vous.
L’homme comme nouvel objet de consommation à exploiter
Citant son allocution devant le Parlement européen de Strasbourg, le 25 novembre 2014, le Pape a renouvelé son désarroi quant à la prédominance des questions techniques et économiques dans le débat politique, «au détriment de l'intérêt véritable pour les êtres humains». Une prévalence technico-économique, non sans risques: «Les hommes et les femmes risquent d'être réduits à de simples rouages dans une machine qui les traite comme des objets de consommation à exploiter, de sorte que, comme c'est tragiquement apparent, chaque fois qu'une vie humaine ne s'avère plus utile pour cette machine, elle est jetée avec quelques hésitations», a alerté le Saint-Père, qui ne cesse d’appeler au refus de «la culture du prêt-à-jeter» et de la mentalité d’indifférence.
Dans un tel contexte, il apparait vital pour le Pape de «sauvegarder la dignité de la personne humaine, en offrant à tous des possibilités réelles de développement humain intégral, et en mettant en œuvre des politiques économiques favorables à la famille». À cet égard, des modèles économiques enclins «à une éthique du développement durable et intégral, fondée sur des valeurs qui placent la personne humaine et ses droits au centre», doivent se développer.
Sur les nouvelles innovations technologiques, comme l’intelligence artificielle ou la robotique, le Pape a insisté sur leur utilisation «au service de l'humanité et à la protection de notre maison commune, plutôt qu'au contraire, comme le prévoient, malheureusement, certaines évaluations».
Grave responsabilité du monde entrepreneurial
Enfin, François a souligné la responsabilité hors-norme incombant au monde entrepreneurial. «C'est un impératif moral, une responsabilité qui implique tout le monde: créer les bonnes conditions pour permettre à chaque personne de vivre dignement», a-t-il écrit, louant le «potentiel énorme des acteurs économiques pour améliorer la qualité de la productivité, créer de nouveaux emplois, respecter les lois du travail, lutter contre la corruption publique et privée et promouvoir la justice sociale. avec le partage juste et équitable des profits».
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