Le Pape invite les jeunes Italiens à oser s’engager
Cyprien Viet – Cité du Vatican
Cette rencontre a débuté par un dialogue entre le Pape et plusieurs jeunes qui lui ont adressé des questions très concrètes sur la foi et l’espérance des jeunes dans un contexte souvent difficile. Le Pape a orienté sa réflexion sur l’importance de la fraternité, en invitant à ne pas mettre au centre de la vie son confort individuel, mais au contraire à vivre le «nous» pour faire avancer le rêve de la paix, «une source inépuisable d’espérance». «Parfois les rêves des jeunes font peur aux adultes», a reconnu le Pape, «mais ne vous laissez pas voler vos rêves !», a-t-il exhorté.
Le Pape a cité l’exemple de François d’Assise, qui fut un «jeune homme comme vous», qui rêvait, et qui n’a pas eu peur de prendre des risques même si beaucoup de gens le considéraient comme un fou… En dressant une nette distinction entre les vrais rêves qui sont un don de Dieu, et les paradis artificiels promis notamment par les drogues qui au contraire «endorment» et qui «brûlent les neurones», François s’est appuyé sur cette phrase de saint Jean XXIII : «Je n’ai jamais connu un pessimiste qui aient accompli quelque chose de bien». Le Pape a donc invité à rejeter tout pessimisme et toute peur, car cela paralyse toute initiative, toute liberté.
Choisir, c’est mettre sa liberté en jeu d’une façon définitive
Interrogé par une jeune fille fiancée qui l’interrogeait sur l’engagement dans le mariage, François a mis en garde contre toute notion de la liberté qui serait «une idée de liberté sans liens, sans engagements, et toujours avec une voie de fuite». Cette préoccupation d’une liberté individuelle absolue finit souvent par être un piège. La vraie liberté n’admet pas de «demi-mesure», a expliqué François. Quand l’amour arrive, il faut en prendre soin. Et les parents doivent aider leurs enfants à assumer et à discerner entre «le véritable amour» et un simple «enthousiasme» ponctuel. «L’amour arrive quand il veut», il faut donc le faire grandir sans attendre, sans se fixer des limites artificielles, comme par exemple attendre la fin des études.
Une fois le couple constitué, l’amour doit être sincère, sans échappatoire, sans double vie. «Il faut mettre toute la viande sur la grille», a déclaré le Pape, en utilisant une expression argentine. L’homme doit rendre son épouse ou sa fiancée «plus femme» et la femme doit rendre son mari «plus homme». L’un doit faire grandir l’autre. Cet enjeu ne doit pas être repoussé dans le temps pour des raisons professionnelles, ou pour une ambition universitaire par exemple : il s’agit au contraire d’une priorité urgente et absolue. François s’est réjoui d’avoir aperçu dans le public quelques enfants dans les bras de leurs jeunes parents. «Ils sont le fruit du véritable amour», a insisté le Pape, invitant à ne pas avoir peur de s’engager.
L’Église doit donner témoignage de Jésus, et non s’enfermer dans le cléricalisme
Répondant ensuite à une jeune infirmier en soins palliatifs, qui l’interrogeait sur le sens de la souffrance, le Pape a reconnu que dans la vie, de nombreuses questions et des drames restent sans réponse, comme la maladie des enfants. Une seule voie permet de sentir un début de réponse : «regarder le Christ crucifié».
Parfois, en parlant de Dieu, les hommes d’Église «trahissent l’Évangile», s’est attristé le Pape. «Nous sommes de plus en plus distants et fermés dans nos rituels», a reconnu François en reprenant les termes utilisés par ce jeune qui l’interrogeait. Il faut accompagner, écouter, donner un témoignage cohérent, quel que soit notre état de vie, a expliqué le Pape. «Si nous les chrétiens, nous n’apprenons pas à écouter et à nous taire, nous ne serons jamais capables de donner une réponse positive.» Et souvent les réponses ne se donnent pas dans des paroles, mais à travers un témoignage concret.
«Voyez comme ils s’aiment», remarquaient ceux qui avaient observé les premières communautés chrétiennes. Le fait d’être chrétien n’est pas «un statut dans la vie», cela ne dépend pas d’un cursus ou d’une série de rites à accomplir d’une façon formelle. Interrogé sur les scandales qui décrédibilisent l’Église, François a répété que l’Église doit toujours sortir d’elle-même, comme chaque personne. «Jésus frappe la porte de l’intérieur pour que nous le laissions sortir, mais nous le tenons prisonnier dans les formalités de notre mode de vie clérical». «Le cléricalisme est une perversion de l’Église», a lancé le Pape, qui a précisé que l’Église, si elle ne transmet pas le témoignage de Jésus, «n’est qu’un écran de fumée».
« Que vos cœurs battent d’amour pour Jésus !»
Après l’exécution d’une danse par une ancienne gymnaste qui a perdu l’usage de ses jambes et qui a donné un témoignage émouvant sur la façon dont, grâce à la fidélité d’une amie, elle avait repris goût à la vie et avait pu trouver la force d’assumer de nouvelles formes d’expression corporelle, la veillée s’est poursuivie avec notamment un chant à Marie et un long temps de silence.
Enfin, le Pape a repris la parole avant de repartir pour le Vatican et de laisser la place aux artistes chargés d’animer une veillée festive. François a évoqué les figures de Pierre et de Jean qui avaient couru vers le sépulcre de Jésus, «en hâte», le cœur battant car «se rallumait en eux l’espérance de revoir le visage du Seigneur». Depuis ce matin de la Résurrection, «l’histoire n’est plus la même», a expliqué le Saint-Père. Depuis ce jour, «chaque lieu dans lequel la vie est opprimée, chaque espace dans lequel dominent la violence, la guerre, la misère, là où l’homme est humilité et frappé, dans ce lieu peut encore se rallumer une espérance de vie».
François s’est réjoui de voir ces jeunes qui se sont mis en chemin et dont le cœur «bat pour Jésus». Il les a invités à «courir plus vite que ceux qui, dans l’Église, sont un peu lents et craintifs». «L’Église a besoin de votre élan, de vos intuitions, de votre foi», a insisté François. Il les a invités à oser aller là aussi vers les «lieux de souffrance, de défaite, de mort», et à témoigner de la victoire de la vie et de l’amour sur la mort, et à ouvrir la porte du sépulcre dans lequel tant de nos contemporains sont enfermés. Il a conclu en les invitant à faire de leur vie «une course vers Jésus et vers les frères, avec le cœur plein d’amour, de foi et de joie».
Les jeunes retrouvent le Pape François dimanche matin pour une nouvelle rencontre au Vatican cette fois, sur la Place Saint-Pierre.
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