Messe à Panama: le Pape souhaite guérir «les espérances fatiguées»
Manuella Affejee- Panama City
Le rite de consécration du bel autel de marbre a été au cœur de la liturgie. Le Pape l’a d’abord aspergé d’eau bénite, puis y a scellé les reliques de plusieurs saints, 3 latino-américains, -St Oscar Romero, Ste Rose de Lima, St Martin de Porrès-, et un Polonais, St Jean-Paul II, tous les 4 figurant parmi les 8 saints patrons de ces 34e JMJ. Après la prière de dédicace, le Souverain Pontife s’est retroussé les manches avant de verser abondamment l’huile sainte avec laquelle il a oint l’autel avec soin.
Juste avant, le Pape le Pape a prononcé une longue homélie devant une assistance composée essentiellement de religieux, religieuses et consacré(e)s, sur l’Evangile de la Samaritaine lequel nous parle de Jésus, «fatigué par la route», qui s’assoit au bord d’un puits, et qui «demande à boire». Il nous est facile d’imaginer l’activité du Seigneur, mais il est moins évident de contempler sa fatigue, à laquelle peuvent aisément se relier les prêtres, religieux, religieuses et consacré(e)s, a-t-il d’abord déclaré. Les causes de cette fatigue sont multiples, entre la charge de la mission, «les conditions ‘nocives’ de travail et d’affectivité», les situations compliquées ou angoissantes à gérer. Au milieu de ces épreuves qui risquent de «briser la vie des personnes consacrées», apparait, comme «un cri silencieux», la nécessité de trouver un puits où se régénérer, d’où repartir à nouveau.
La lassitude paralysante de l’espérance
Le Pape constate l’émergence au sein des communautés d’une autre forme de fatigue, plus subtile, qui n’a rien à voir avec celle du Seigneur : la «lassitude de l’espérance». Celle-ci affleure «quand la réalité "gifle" et met en doute les forces, les moyens et la possibilité de la mission», quand les changements constants et intenses que traversent nos sociétés nous laissent perplexes et dubitatifs, interrogent l’engagement des consacrés, et même dans certains cas, «la possibilité de la vie religieuse dans le monde d’aujourd’hui». Et le Saint-Père de poursuivre gravement : «Cette lassitude de l’espérance naît du constat d’une Église blessée par son péché et qui si souvent n’a pas su écouter tant de cris dans lesquels se cachait le cri du Maître : ‘Mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ?’»
Cette fatigue de l’espérance peut s’avérer paralysante, devenir même habituelle, et donner insidieusement «droit de cité à l’une des pires hérésies possibles de notre époque : penser que le Seigneur et nos communautés n’ont rien à dire et à apporter à ce monde nouveau qui est en gestation»
Oser demander à boire
C’est dans ces moments qu’il est bon d’avoir le même courage que Jésus «et de demander à boire», et c’est ce qu’il nous exhorte à faire. Car en le disant, «nous ouvrons la porte à notre espérance fatiguée pour revenir sans peur au puits fondateur du premier amour», lorsque Jésus a rencontré notre chemin, nous a regardés avec amour. Demander à boire implique de «revenir sur nos pas», d’écouter «comment l’Esprit n’a pas engendré une œuvre ponctuelle, un plan pastoral ou une structure à organiser mais comment, par le moyen de tant de "saints de la porte d’à côté" (…)il a donné la vie et l’oxygène à un contexte historique déterminé qui semblait étouffer et écraser toute espérance et toute dignité».
Demander à boire consiste encore à «sauver la part la plus authentique des charismes fondateurs (…) à voir comment ils peuvent s’exprimer aujourd’hui», à reconnaitre aussi «que nous avons besoin que l’Esprit nous transforme en hommes et femmes qui se souviennent du passage salvifique de Dieu». Cette espérance fatiguée sera guérie si l’on revient à ce premier amour. C’est seulement de là, et non en partant de nous-mêmes et de notre apitoiement, que «nous trouverons le même chant et le même regard qui ont suscité le chant le chant et le regard de nos ainés».
Et le Pape de conclure sur le symbole que représente la réouverture des portes de cette basilique, après des années de restauration. Pour le Saint-Père, il s’agit bien plus que d’une restauration classique, puisqu’on a cherché ici «à préserver la beauté des années, en étant ouvert à l’accueil de toute la nouveauté que le présent pouvait lui offrir». «Cette cathédrale espagnole, indienne et afro-américaine devient ainsi une cathédrale panaméenne, de ceux qui hier mais également de ceux qui l’ont rendu possible», a conclu le Pape, pour qui la restauration méritée de cette belle cathédrale nous appelle à découvrir «comment la beauté d’hier devient un fondement pour construire la beauté de demain».
Une cathédrale symbole de fierté nationale
C’est la toute première fois, dans l’histoire des Amériques, qu’un Pape procède en personne à la consécration du nouvel autel d’une cathédrale. Il contient des reliques de saint Jean-Paul II et de trois grands saints latino-américains : sainte Rose de Lima, saint Martin de Porres et saint Oscar Romero. Il a été conçu à partir de marbre de Carrare, importé d’Italie, avec également des composants du Brésil et de France.
Cette cathédrale est le siège épiscopal de l’archidiocèse de Panama. Le début des travaux remonte à 1608, et le rite de dédicace avait été effectué en 1796. Après le tremblement de terre de 1882, elle avait connue de grands travaux de restauration. Les récents travaux, qui ont duré deux ans, ont eu un coût évalué à près de 12 millions de dollars. La cathédrale a rouvert le 24 novembre dernier au terme d’un chantier de grande ampleur, supervisé directement par le secrétariat du président de la République. Il a permis d’équiper le bâtiment d’un système de ventilation moderne qui permettra de mieux préserver les œuvres d’art présentes dans la cathédrale. Les huit cloches ont sonné pour la première fois le 23 janvier, à l’arrivée du Pape François, dont l’une des cloches porte d’ailleurs le nom. À noter qu’une autre cloche a pour nom “JMJ Panama 2019”.
L’image de sainte Marie La Antigua, qui se situait à l’origine dans la cathédrale de Séville, a été emmenée à Panama en 1510. Elle a été proclamée sainte patronne de la République de Panama en 2001.
Avant d'entrer dans la cathédrale, le Pape a salué un groupe de 200 Français accompagnés par le vicaire général du diocèse de Paris, Mgr Benoist de Sinety.
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