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Solennité de la fête-Dieu célébrée par le Pape François à Casal Bertone (juin 2019) Solennité de la fête-Dieu célébrée par le Pape François à Casal Bertone (juin 2019) 

La solennité du Corpus Domini dans le magistère des Papes

C’est un miracle émouvant qui a conduit un Pape du XIIIe siècle à instaurer la solennité du Corpus Christi à la lumière du dogme de la transsubstantiation. Voici comment cette solennité a été développée dans le magistère des Papes au cours des dernières décennies.

Laura De Luca - Cité du Vatican

1263. Un prêtre allemand en pèlerinage à Rome s'arrête pour dire la messe à Bolsena, non loin d’Orvieto (Ombrie). Tandis qu'il rompt l'hostie, le doute le saisit quant à la présence réelle du Christ dans le petit morceau de pain. Soudain, des gouttes de sang apparaissent, sortant de l’hostie et maculant le corporal ainsi que quelques pierres de l’autel.

Déjà, en 1215, lors du IVe Concile du Latran, la transsubstantiation était devenue un dogme de foi; mais après le miracle de Bolsena, le Pape Urbain IV décide d'étendre la solennité du Corpus Christi à toute l'Eglise, avec la bulle «Transiturus de Hoc Mundo» de 1264, plaçant la fête le jeudi suivant le premier dimanche après la Pentecôte.

La messe de Bolsena par Raphaël (Musées du Vatican)
La messe de Bolsena par Raphaël (Musées du Vatican)

Dans son homélie de le messe du Corpus Domini, le 23 Juin 2011, le Pape Benoît XVI affirmait: «tout part, pourrait-on dire, du cœur du Christ, qui lors de la Dernière Cène, à la veille de sa passion, a remercié et loué Dieu et, en agissant ainsi, avec la puissance de son amour, a transformé le sens de la mort vers laquelle il allait. Le fait que le Sacrement de l’autel ait assumé le nom d’«Eucharistie» — «action de grâce» — exprime précisément cela: que la transformation de la substance du pain et du vin dans le Corps et le Sang du Christ est le fruit du don que le Christ a fait de lui-même, le don d’un Amour plus fort que la mort, un Amour divin qui l’a fait ressusciter d’entre les morts. Voilà pourquoi l’Eucharistie est nourriture de vie éternelle, Pain de la vie».

Dans la deuxième décennie du siècle qui a commencé avec les attentats du World Trade Center ainsi qu’une myriade de guerres oubliées, la présence réelle du Corps et du Sang du Christ devient la confirmation paradoxale d'un amour plus fort que la mort, d'un amour qui surmonte tous les péchés. Mais dans le plan de Dieu, cette histoire commence avant l'histoire, elle commence avec l'homme lui-même.

Saint Jean-Paul II, à l'orée de l'an 2 000

«La solennité du Corpus Christi d'aujourd'hui nous invite à méditer sur le parcours unique qu'est l'itinerarium salvificum du Christ à travers l'histoire, une histoire écrite depuis le début, de manière contextuelle, par Dieu et par l'homme. À travers les événements humains, la main divine retrace l'histoire du salut.

C'est un voyage qui commence dans le jardin d’Eden, lorsque, suite au péché du premier homme, Adam, Dieu intervient pour orienter l'histoire vers la venue du "second" Adam. Dans le livre de la Genèse, il y a la proclamation primitive du Messie et depuis lors, au fil des générations, comme le racontent les pages de l'Ancien Testament, le voyage de l'homme vers le Christ s'est déroulé.

Lorsque, dans la plénitude des temps, le Fils de Dieu incarné a versé son sang sur la Croix pour notre salut pour ensuite ressusciter d’entre les morts, l'histoire entre, pour ainsi dire, dans une dimension nouvelle et définitive: l'alliance nouvelle et éternelle dont le Christ crucifié et ressuscité est le commencement et l'accomplissement se réalise. Sur le Calvaire, le chemin de l'humanité, selon les desseins divins, connaît son tournant décisif: le Christ se place à la tête du nouveau Peuple pour le guider vers son but définitif. L'Eucharistie, sacrement de la mort et de la résurrection du Seigneur, constitue le cœur de cet itinéraire spirituel eschatologique».

C'est ainsi que Jean-Paul II s’exprimait lors de la solennité du Corpus Christi du 11 juin 1998. Moins de deux ans avant l'an 2000. On parle déjà de la mondialisation et l'Eucharistie, le don par excellence, est déjà promise dès le début de l'histoire humaine en incluant tous les peuples et tous les temps. Une mondialisation de l'amour.

La prière de saint Jean XXIII

Ce souffle universel de la solennité d'aujourd'hui imprègne également les paroles de Jean XXIII à la veille du Concile, lors de la Fête-Dieu du 21 juin 1962. Voici la prière qu’il adressait alors :

«O Jésus, nourriture surnaturelle des âmes, à toi vient ce peuple immense. Il se tourne pour pénétrer sa vocation humaine et chrétienne de nouvel élan, de vertu intérieure, avec une disposition au sacrifice, dont Tu as donné une sagesse et un exemple inimitables, par la parole et l'exemple.

O Christ Jésus, notre frère aîné, Tu as précédé les pas de chaque homme, Tu as pardonné les fautes de chacun, Tu as élevé chacun à un témoignage de vie plus noble, plus convaincu, plus actif.

- O Jésus, Pain véritable, la seule et unique nourriture substantielle des âmes, rassemble tous les peuples autour de Ta table : c'est la réalité divine sur terre, c'est un gage de faveurs célestes, c'est la sécurité d'une juste entente entre les peuples, et d'une compétition pacifique pour le véritable progrès de la civilisation.

- Nourris par toi et de toi, ô Jésus, les hommes et les femmes seront forts dans la foi, joyeux dans l'espérance, actifs dans les nombreuses applications de la charité».

Saint Paul VI et Pie XII

La charité. Si par le don de son Corps et de son Sang, Dieu nous a aimés au point d'effacer nos péchés, cet amour s'étend aussi horizontalement, entre tous les hommes. La sixième décennie du XXe siècle semble particulièrement réceptive à l'idéal de paix et d'amour universel, surtout parmi les jeunes générations. 1969, l'année de Woodstock, des protestations, de la conquête de la Lune qui, pour un instant, fait que tous les hommes se sentent frères au nom de la science... Nous sommes le 5 juin de cette année, et c'est ainsi que parle Paul VI en ces années effervescentes et difficiles :

«Communion avec le Christ, donc, l'Eucharistie, comme sacrement et sacrifice : mais aussi communion entre nous, frères, avec la communauté, avec l'Église : et c'est encore la Révélation qui nous dit, selon les paroles de Paul : “Puisqu’il y a un seul pain, la multitude que nous sommes est un seul corps, car nous avons tous part à un seul pain” (1 Cor. 10, 17). Le Concile œcuménique Vatican II a profondément mis en lumière cette réalité lorsqu'il a qualifié l'Eucharistie de “repas de la communion fraternelle” (Gaudium et Spes, 38) ; lorsqu'il a dit que les chrétiens, «se nourrissant du corps du Christ dans la Sainte Communion, manifestent concrètement l'unité du Peuple de Dieu, qui est exprimée de manière adéquate et réalisée de manière admirable par ce très auguste sacrement».

Solennité de la Fête-Dieu du 13 juin 1968
Solennité de la Fête-Dieu du 13 juin 1968

Les voix des Papes. Corpus Christi. La véritable présence du Corps du Christ dans l'hostie consacrée, autour de laquelle gravitaient les doutes du prêtre qui a été témoin du miracle de Bolsena, est confirmée par la vitalité de l'amour chrétien, par les œuvres de charité inspirées par l'Eucharistie. En ce sens qu’il faut relire les paroles du Pape Pie XII dans son message radiophonique à la fin du Congrès eucharistique d'Assise, le 9 septembre 1951:

«Si, dans les termes étroits de ce Congrès eucharistique, la foi et la science, la culture, l'éloquence, l'art et l'histoire ont apporté dans une harmonie fraternelle, un don bienvenu à Jésus eucharistique, l'hommage reconnaissant de l'ingéniosité humaine, même s'il est si approprié à l'objet de ses spéculations et de ses manifestations multiformes; beaucoup plus et mieux font ce soir la théologie savante, la philosophie profonde, l'art de la pensée, de la parole, du chant, se prosternant en adoration tacite devant le Dieu caché pour exalter dans la foi de l'humble croyant le don inestimable de l'Eucharistie.

Le don est Lui-même - Jésus-Christ - personnellement présent pour travailler en nous, si nous suivons son amour, les merveilles de la vie chrétienne, d'une vie qui, ordonnée selon l'Évangile, maintient fervente chez ses enfants même tièdes l'estime de la vertu, la conscience du bien et du mal et les empêche d'être définitivement dépassés par l'avalanche d'erreurs et de corruption qui domine le monde».

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11 juin 2020, 13:00