Le Pape pense à Sainte-Sophie et exprime sa douleur
Après s’être exprimé sur le Dimanche de la Mer, le Pape François a prononcé ces quelques mots: «la mer amène ma pensée un peu plus loin: à Istanbul. Je pense à Sainte-Sophie et je ressens une grande douleur.»
Vendredi 10 juillet, le Conseil d’État, plus haut tribunal administratif de Turquie, avait répondu favorablement aux demandes formulées depuis des années par plusieurs associations soutenues par le président Recep Tayyip Erdogan, arguant que le sultan Mehmet II, le conquérant ottoman de Byzance en 1453, en avait fait une mosquée «à perpétuité».
En conséquence, ce statut, estime le Conseil d’État, n’aurait pas dû être modifié par Mustapha Kemal, père de la Turquie moderne, qui avait pris en 1934 la décision de la transformer en musée, désireux, disait-il de «l’offrir à l’humanité». Dans une déclaration télévisée, le président Erdogan a précisé que la première prière musulmane à Sainte Sophie aura lieu le 24 juillet et que le lieu resterait ouvert aux visiteurs.
La déception de l'Unesco
Parmi les très nombreuses réactions internationales, l’Unesco a déploré la décision des autorités turques. Audrey Azoulay, directrice de l’organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco) a réagi indiquant «regretter vivement la décision des autorités turques, prise sans dialogue préalable, de modifier le statut de Sainte-Sophie. Elle a fait part de sa profonde préoccupation à l’ambassadeur de Turquie auprès de l’Unesco», a indiqué vendredi soir un communiqué de l’organisation onusienne.
«Sainte-Sophie est une composante des Zones historiques d’Istanbul inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco», a souligné la directrice de l’organisation. L’ex-basilique «est un chef-d’œuvre architectural et un témoignage unique de la rencontre de l’Europe et de l’Asie au cours des siècles. Son statut de musée reflète l’universalité de son héritage et en fait un puissant symbole de dialogue», a-t-elle expliqué.
La ministre grecque de la Culture a dénoncé une «provocation envers le monde civilisé». La France, par la voix de son ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves le Drian, dit «déplorer» cette décision qui remet en cause «l’un des actes les plus symboliques de la Turquie moderne et laïque».
Du côté des Etats-Unis, Washington s'est avoué «déçu» par cette décision. «Nous prenons acte de l'engagement du gouvernement turc de garantir un accès à Sainte-Sophie à tous les visiteurs, et nous avons hâte de voir ses plans de gestion de Sainte-Sophie pour qu'elle reste accessible à tous sans entrave», a détaillé la porte-parole de la diplomatie américaine, Morgan Ortagus.
Le risque d'une fracture entre Orient et Occident
Les réactions ont été nombreuses dans le monde orthodoxe. Le patriarche de Constantinople, Bartholomée, avait averti que le changement de statut de Sainte-Sophie risquerait de créer une fracture entre l’Est et l’Ouest. Cette ancienne basilique byzantine est en effet un centre de vie «dans lequel s’embrassent Orient et Occident», et sa réaffectation au culte musulman «sera une cause de rupture entre ces deux mondes». «Cela poussera des millions de chrétiens dans le monde entier contre l’islam», s’est-il inquiété. Le patriarcat de Moscou a également réagi, disant regretter que les «voix de millions de chrétiens n’aient pas été entendues».
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