«Même au milieu des dévastations, nous pouvons voir le triomphe de la vie sur la mort»
Olivier Bonnel-Cité du Vatican
Après la prière pour la paix effectuée dans la vieille ville de Mossoul, le Pape François a rejoint par hélicoptère la ville de Qaraqosh, située à une trentaine de kilomètres. Une étape à la rencontre des communautés chrétiennes, qui ont beaucoup souffert ces dernières années en raison de la guerre et des exactions du groupe État Islamique. Qaraqosh, ville de 35 000 habitants est à 90 % chrétienne. Son patrimoine religieux et intellectuel chrétien a été en grande partie détruit par les terroristes.
Pour la première fois lors de ce voyage apostolique, la foule a pu sortir le long des routes pour saluer l'arrivée du Saint-Père qui avait rendez-vous dans la cathédrale de l'Immaculée Conception. Le Pape a été accueilli par des chants de joie, des youyous, par les fidèles agitant des drapeaux et des ballons. Dans la cathédrale qui fut vandalisée par Daesh, il a été salué d'abord par le Patriarche des syro-catholiques, Ignace Youssef Younan.
«La foule qui vous a accueilli, en tant que père et pasteur, fait partie de ces chrétiens qui ont été déracinés en 2014 de leurs maisons à Qaraqoch, Bartella, Baashika, Karemless, et d'autres villages de la plaine de Ninive. Parmi eux se trouvent également certains de nos voisins: les musulmans arabes, les Kurdes, les Shahbaks, les Turcomans, les Yesidi et les Kakaïs» a souligné le patriarche Younan. Cette visite historique du Pape «nous console de nos tourments, nous encourage à rester enracinés sur notre terre et nous incite à persévérer dans le témoignage audacieux de l'Évangile du Christ», a t-il aussi précisé.
Plusieurs personnes sont venues ensuite témoigner de leur histoire, parmi lesquelles une femme, Doha Sabah Abdallah, qui a raconté avoir perdu son fils et un neveu dans des tirs de mortiers. Un "avertissement" qui avait fait fuir les autres habitants et les a sauvés du martyre. Un autre témoignage est venu du père Ammar Yako, prêtre syro-catholique, premier prêtre à être revenu à Qaraqosh après sa libération de l'emprise de Daech.
«Le moment est venu de reconstruire et de recommencer»
Le Pape a ensuite pris la parole, rendant grâce au Seigneur d'avoir pu se rendre parmi cette communauté. «J’ai attendu avec impatience ce moment» a t-il lancé à ses hôtes. «En vous regardant, je vois la diversité culturelle et religieuse des habitants de Qaraqosh, et cela montre quelque chose de la beauté que votre région offre pour l’avenir. Votre présence ici rappelle que la beauté n’est pas unicolore, mais qu’elle rayonne par la variété et les différences.»
«En même temps, avec grande tristesse, nous regardons tout autour et nous voyons d’autres signes, des signes du pouvoir destructeur de la violence, de la haine et de la guerre a poursuivi gravement le Saint-Père Que, que de choses ont été détruites ! Et combien doivent être reconstruites». Mais cette rencontre «montre que le terrorisme et la mort n’ont jamais le dernier mot (...) Même au milieu des dévastations, du terrorisme et de la guerre, nous pouvons voir, avec les yeux de la foi, le triomphe de la vie sur la mort» a t-il expliqué.
«Vous n'êtes pas seuls!»
François est revenu sur le patrimoine spirituel irremplaçable de cette communauté chrétienne qui a tenu dans la foi malgré les épreuves: «Vous avez devant vous l’exemple de vos pères et de vos mères dans la foi qui ont adoré et loué Dieu en ce lieu. Ils ont persévéré dans une ferme espérance sur leur chemin terrestre, faisant confiance à Dieu qui ne déçoit jamais et qui nous soutient toujours de sa grâce».
«Vous n’êtes pas seuls! a encore lancé le Pape à ces fidèles, en signe de réconfort. L’Eglise toute entière vous est proche, par la prière et la charité concrète. Et dans cette région, beaucoup vous ont ouvert les portes quand il y en avait besoin.»
Le pardon nécéssaire
Il y a sûrement des moments où la foi peut vaciller, lorsqu’il semble que Dieu ne voit pas ni n’agit, a poursuivi le Pape, en invitant les fidèles de Qaraqosh à «ne pas cesser de rêver» pour reconstruire l'avenir. «Ne vous rendez pas, ne perdez pas l’espérance! Du ciel, les saints veillent sur nous: invoquons-les et ne nous lassons pas de demander leur intercession».
Le Souverain Pontife a tenu à remercier particulièrement Doha Sabah Abdallah pour son témoignage: «elle a dit que le pardon est nécessaire de la part de ceux qui ont survécu aux attaques terroristes. Pardon: c’est une parole clé. Le pardon est nécessaire pour demeurer dans l’amour, pour demeurer chrétien».
«Je sais que cela est très difficile, n'a pas caché le Saint-Père, mais nous croyons que Dieu peut apporter la paix sur cette terre. Nous lui faisons confiance et, avec toutes les personnes de bonne volonté, nous disons “non” au terrorisme et à l’instrumentalisation de la religion.»
Un hommage aux mères et aux femmes irakiennes
François a ainsi invité à prier sans relâche, à ne pas se lasser de prier pour la «conversion des cœurs et pour le triomphe d’une culture de la vie, de la réconciliation et de l’amour fraternel, dans le respect des différences, des diverses traditions religieuses, dans l’effort de construire un avenir d’unité et de collaboration entre toutes les personnes de bonne volonté».
Le Pape a enfin placé cette communauté de Qaraqosh sous le regard de la Vierge Marie: «lorsque j’arrivais avec l’hélicoptère, j’ai vu la statue de la Vierge Marie sur cette église de l’Immaculée Conception, et je lui ai confié la renaissance de cette ville» a t-il confié. «La Vierge non seulement nous protège d’en haut, mais elle descend vers nous avec une tendresse maternelle. Sa représentation a été ici blessée et bafouée, mais le visage de la Mère de Dieu continue à nous regarder avec tendresse. Car c’est ainsi que font les mères: elles consolent, elles confortent, elles donnent vie».
Pour célébrer le triomphe de la vie sur la mort, le Saint-Père a enfin rendu hommage «à toutes les mères et les femmes de ce pays, des femmes courageuses qui continuent à donner vie malgré les exactions et les blessures. Que les femmes soient respectées et protégées!» Des mots qui résonnent fortement alors que certaines de ces femmes ont été réduites en esclavage par les terroristes.
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