Le Pape salue «l’amour et l’enthousiasme» de sœur Maria Laura Mainetti
Salvatore Cernuzio - Cité du Vatican
«Faire chaque petite chose avec foi, amour et enthousiasme»: tel est l'héritage, selon les mots du Pape François à l'Angélus, de sœur Maria Laura Mainetti, élevée aujourd'hui aux honneurs des autels.
«Aujourd'hui à Chiavenna, dans le diocèse de Côme, Sœur Maria Laura Mainetti, des Filles de la Croix, tuée il y a 21 ans par trois jeunes filles influencées par un culte satanique, est béatifiée. La cruauté… Elle, qui aimait les jeunes plus que tout, qui a aimé et pardonné à ces mêmes jeunes filles prisonnières du mal, nous laisse son programme de vie: faire chaque petite chose avec foi, amour et enthousiasme. Que le Seigneur nous donne à tous la foi, l'amour et l'enthousiasme», a déclaré le Pape, avant, comme c’est la tradition, de faire applaudir la nouvelle bienheureuse par les fidèles rassemblés sur la Place Saint-Pierre.
Le témoignage d’un prêtre ami de la religieuse martyre
«Sœur Maria Laura, où allez-vous?» Le père Ambrogio Balatti, alors curé-archiprêtre de Chiavenna, se promenait à bicyclette dans la soirée du 6 juin 2000, quelques minutes avant que sœur Maria Laura Mainetti ne soit conduite par ruse par trois jeunes filles dans une ruelle et tuée de dix-neuf coups de couteau en sacrifice à Satan.
Le père Balatti est la dernière personne à avoir parlé à sœur Mainetti, née Teresina Elsa, membre professe de la Congrégation des Filles de la Croix. La religieuse s'était adressée à lui quelques jours avant le 6 juin pour lui demander de rester à proximité pendant le rendez-vous avec cette jeune fille de 16 ans qui, au téléphone, quelques jours plus tôt, avait dit s'appeler Erica et avoir besoin d'aide parce qu'elle était enceinte après des violences, et avait été abandonnée par sa famille. Sœur Maria Laura a senti que quelque chose clochait dans cette demande, mais elle n'a pas reculé, animée par l'esprit d'altruisme et de dévouement qui a toujours caractérisé sa vie.
Une vie passée à se donner pour les autres
«Elle m'a dit qu'elle avait un peu peur, vu l'heure particulière de la nuit... Mais elle était généreuse et ne se serait certainement pas retenue face aux craintes ou aux doutes. Elle ne pouvait pas se le permettre, car l'amour de Dieu et de son prochain passait avant tout», a déclaré le père Ambrogio Balatti à Vatican News. «Sœur Laura avait très à cœur les gens, elle disait toujours que dans les autres "il y a mon Jésus", surtout chez les enfants. Elle était très préoccupée par les changements chez les jeunes à l'adolescence, le fait qu'elles quittent l'Église. Devant une adolescente qui disait avoir été abandonnée, elle n'aurait jamais dit non.»
Don Ambrogio, vous étiez donc ce soir-là à l'endroit même où quelques minutes plus tard a eu lieu le meurtre de Sœur Maria Laura?
Oui, j'avais pris mon vélo pour aller faire un tour mais je n'ai vu personne. Dans une rue latérale, j'ai trouvé une fille au téléphone habillée en noir, un peu plus loin la religieuse qui arrivait. Je lui ai dit: «Sœur Laura, où étais-tu? Je n'ai pas pu te trouver.» Elle m'a répondu que la fille lui avait dit de la suivre dans une petite rue proche. Je pense que c'était une ruse pour éviter les regards indiscrets. Nous nous sommes salués normalement; je n'ai pas suivi la religieuse ni les filles parce que quelques jours auparavant, sœur Maria Laura, même si elle avait un peu peur, m'avait dit de rester dans les environs, mais à l'écart pour ne pas déranger la jeune femme qui voulait peut-être parler face à face. Je suis d'ailleurs parti tranquillement: la fille était là, le rendez-vous était réel... Qui aurait jamais imaginé une telle tromperie diabolique!
Avez-vous jamais ressenti au cours de ces années le remords de ne pas avoir suivi la religieuse et les jeunes filles, et peut-être ainsi éviter la tragédie?
Oui, bien sûr. Mais j'ai aussi pensé que si j'avais été présent, qui sait ce qui aurait pu se passer. J'ai appris par la suite que je faisais également partie des victimes prédestinées, je devais être tué en tant que représentant de l'Église catholique, pour mon engagement auprès des malades mentaux. Mais ils m'ont laissé tranquille, peut-être effrayés par ma taille.... Je ne sais pas ce qui aurait pu se passer, peut-être que j’aurais essayé de défendre la sœur et que j'aurais blessé une fille moi-même, ou que nous aurions été tués tous les deux. En tout cas une plus grande horreur.
Il ressort des témoignages des jeunes femmes que la religieuse avait pardonné à ses meurtrières au moment où elles l'ont tuée.....
L'une des trois a raconté que lorsqu'elles ont commencé à la poignarder au milieu de cris et de jurons, sœur Laura a invoqué le pardon de Dieu pour eux. Cette nouvelle a été un rayon de lumière éblouissant dans un moment d'obscurité dans lequel toute la communauté de Chiavenna avait été jetée.
Sœur Maria Laura a offert son pardon. Les autres sœurs, les fidèles, avez-vous pardonné?
Oui, nous aussi nous avons pardonné, notamment quand il a été confirmé que les responsables étaient trois mineures. Trois pauvres mineures imprégnés d'une idéologie satanique, qui cherchaient des litanies sataniques et des choses de ce genre sur Internet. Elles étaient petites, à problèmes, je me souviens de l'une d’elles dans la paroisse quand elle était plus jeune, dans la période de la confirmation: elle souffrait pour ses parents qui se séparaient, elle portait des blessures à l'intérieur. Elles ont fait un geste horrible, mais pour cette raison même, elles se sont contredites.
Dans quel sens?
Elles ont nié l'existence de Dieu et elles ont dit qu'il n'y avait pas de bonnes personnes dans l'Église, qu'elles étaient toutes fausses. En réalité, elles ont pu faire ce qu'elles ont fait, uniquement parce qu'elles ont trouvé une bonne personne comme sœur Maria Laura Mainetti. Toute autre personne, à qui on aurait demandé de sortir le soir, aurait probablement reporté la réunion, aurait dit "oublions". Sœur Laura, au contraire, était là ce soir-là, prête à aider.
Qu'y a-t-il à découvrir sur la figure de sœur Maria Laura Mainetti, au-delà de son meurtre?
Elle avait une vie intérieure profonde qui ne reflétait pas son activité extérieure. Ou plutôt: elle était toujours parmi les jeunes, prête à aider et à accueillir, mais personne ne pouvait imaginer la profondeur spirituelle qui se dégageait de ses journaux intimes. Quand elle est morte, avant même que l'on sache comment ou si elle avait pardonné, j'ai dit à l'évêque: nous devons enquêter sur la vie de cette religieuse parce qu'elle est morte en martyre. Et l'évêque lui-même a ordonné aux sœurs de vérifier la vie humaine, religieuse, spirituelle de la religieuse à travers ses écrits, ses journaux intimes. Quelque chose qu'elle n'aurait jamais permis dans la vie.
Qu'avez-vous trouvé dans son journal intime?
Un lien très fort avec Dieu, un grand amour pour Jésus. Dans certaines pages, elle parle aussi de sa mère, qui est morte en la mettant au monde. C'est comme si cela lui avait transmis un sentiment de don total. Il y a toute une série de références qui donnent l'idée que, d'une certaine manière, la religieuse s'est préparée pendant des années et des années au don total de la vie. On ne peut pas mourir comme elle est morte, si l'on n'est pas préparé à l'avance: le martyre ne s'improvise pas.
Sœur Maria Laura est élevée aux honneurs des autels. Mais peut-on dire que, dans un certain sens, elle était déjà une sainte avant cet événement sanglant?
Le meurtre a permis de découvrir une figure lumineuse que, sans cela, peu de gens auraient connu, comme cela arrive toujours avec tant de fidèles serviteurs de l'Évangile. Au début, il y avait quelques réserves sur le processus de béatification, mais nous avons insisté parce que cette affaire était un cadeau pour toute l'Église. Le don, c'est-à-dire le fait de montrer au monde ce qu'est le bien et que le bien ne peut être détruit par le mal. Le mal, la méchanceté humaine, peut prendre votre vie physique, mais il ne peut pas voler et détruire l'amour. Il s'agit d'une vérité fondamentale, et pas seulement pour les croyants. Les filles elles-mêmes se sont retrouvées face au bien, et ont réalisé qu'elles avaient perdu. Ce qui semblait en fait une défaite pour la religieuse, était au contraire une victoire. Et la béatification le confirme.
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