Le Pape à Mossoul le 7 mars 2022 Le Pape à Mossoul le 7 mars 2022  Éditorial

Des décombres de Mossoul à ceux de l'Ukraine, une voix de paix et d'espoir

Le Pape François entre dans la dixième année de son pontificat. Ses mots prononcés il y a un an en Irak sont plus que jamais pertinents dans le contexte actuel.

Andrea Tornielli

François entre dans la dixième année de son pontificat et c'est un anniversaire dramatiquement marqué par l'horreur de la guerre au cœur de l'Europe. Il est impressionnant d'entendre à nouveau aujourd'hui certaines des paroles que le Pape avait prononcées il y a un an, au cours du voyage apostolique le plus important et le plus courageux de son pontificat, celui en Irak. Un voyage qu'il avait vivement souhaité, malgré les risques et les nombreux avis contraires motivés par l'énorme difficulté à garantir la sécurité, surtout pour les personnes qui participeraient aux célébrations et aux rencontres. En mars 2021, François a voulu faire ce pèlerinage, qui restait parmi les rêves non réalisés de saint Jean-Paul II, pour montrer sa proximité avec toutes les victimes du fondamentalisme, pour encourager le difficile chemin de reconstruction du pays, pour tendre la main aux nombreux musulmans pacifiques qui veulent vivre en paix avec les chrétiens et avec les membres des autres religions.


Le point culminant de ce voyage a été la visite de l'évêque de Rome dans les décombres de Mossoul. François a déclaré : «Aujourd'hui, nous élevons tous nos voix dans la prière au Dieu tout-puissant pour toutes les victimes de la guerre et des conflits armés. Ici, à Mossoul, les conséquences tragiques de la guerre et des hostilités ne sont que trop évidentes. Comme il est cruel que ce pays, berceau de la civilisation, ait été frappé par une tempête aussi inhumaine, avec des lieux de culte anciens détruits et des milliers et des milliers de personnes - musulmans, chrétiens, Yazidis, qui ont été cruellement anéantis par le terrorisme, et d'autres - déplacées de force ou tuées !»

Un an plus tard, une fois de plus, les conséquences tragiques de la sale guerre en Ukraine, hypocritement qualifiée d'«opération militaire spéciale», sont sous les yeux du monde entier, avec leur lot de douleurs, de souffrance, de corps innocents déchiquetés, d'enfants tués, de familles déchirées, de millions de réfugiés contraints de tout abandonner pour échapper aux bombes, de villes transformées en champs de bataille, de maisons éventrées et brûlées. Sans parler des blessures au cœur, qui mettront des années à cicatriser. Cette fois, c'est une guerre proche. Elle n'est pas aussi lointaine que la guerre en Irak, que le Pape Wojtyla avait prophétiquement et en vain imploré de ne pas mener, et qui a transformé la terre d'Abraham en réservoir de tous les terrorismes. La guerre, «une aventure sans retour».


Cette fois, la haine et la violence ne peuvent être dissimulées sous les théories du «choc des civilisations», ni être liées à des motifs religieux fictifs. Cette fois, il y a des hommes et des femmes des deux côtés qui partagent la même foi chrétienne et le même baptême. Face aux ravages de l'agression de l'armée russe en Ukraine, et à l'escalade de la guerre qu'elle a déclenchée, avec le risque d'entraîner le monde dans un conflit nucléaire, il n'est pas facile de trouver des signes d'espoir. Et pourtant, tout comme il y a un an, à Mossoul, le Pape François a réaffirmé la «conviction que la fraternité est plus forte que le fratricide, que l'espoir est plus fort que la mort, que la paix est plus forte que la guerre» ; aujourd'hui aussi, malgré tout, il est possible d'espérer. Implorer de Dieu le don de la paix, sans jamais cesser de la rechercher et de la poursuivre, en ne négligeant aucune piste pour obtenir un cessez-le-feu et le début de véritables négociations. Parce que si vous voulez la paix, vous devez préparer la paix, pas la guerre. Nous devons avoir le courage et la créativité d'explorer de nouveaux moyens de construire une coexistence entre les nations qui ne soit pas fondée sur l'équilibre des forces et la dissuasion. Aujourd'hui, il est possible d'espérer en regardant le grand élan de solidarité qui s'est manifesté depuis la base en quelques jours, et la générosité de pays comme la Pologne, qui ont ouvert leurs portes à des millions de réfugiés.

Il y a un an, lors de la rencontre interreligieuse dans la plaine d'Ur, François a déclaré : «Où donc peut commencer le chemin de la paix ? De la renonciation à avoir des ennemis. Celui qui a le courage de regarder les étoiles, celui qui croit en Dieu, n'a pas d'ennemis à combattre. Il n'a qu'un seul ennemi à affronter, qui se tient à la porte de son cœur et frappe pour entrer : c'est l'inimitié. Alors que certains cherchent à avoir des ennemis plutôt qu'à être amis, alors que beaucoup cherchent leur propre gain au détriment des autres, celui qui lève les yeux vers les étoiles de la promesse, celui qui suit les voies de Dieu ne peut être contre personne, mais pour tous. Il ne peut justifier aucune forme d'imposition, d'oppression ou de prévarication, il ne peut se comporter de manière agressive». Le chemin de la paix commence par le désarmement des cœurs, a enseigné le Pape au cours de ces neuf années de pontificat. Se dire chrétien signifie appartenir à un Dieu fait Homme qui, sur la croix, s'est laissé tuer par amour et qui, par son choix d'être une victime sans défense, nous demande depuis deux mille ans d'être du côté des opprimés.


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12 mars 2022, 11:59