«Ce sont des visages, pas des chiffres»: le Pape alerte les préfets italiens sur l'accueil des migrants
«Vous pensez: les temps sont mauvais, les temps sont lourds, les temps sont difficiles. Vivez bien et vous changerez les temps». En reçevant les préfets de la République italienne, le Pape François a fait référence à la célèbre phrase de saint Ambroise. Cet évêque du IVème siècle fut préfet de la province de Ligurie-Émilie, dont le siège est à Milan. Il fut évêque de la ville pendant 23 ans, jusqu’à sa mort en 397. «Votre mission réalise institutionnellement cette "capacité quotidienne d'élargir le [...] cercle" (Lettre encyclique Fratelli tutti, 97), de sorte que chaque citoyen, surtout celui qui se trouve dans des situations difficiles, expérimente, en présence de l'État, la proximité concrète de la communauté civile», a assuré l’évêque de Rome. Il a ensuite voulu développer trois des nombreux défis auxquels sont confrontés les 110 préfets de la République italienne: le maintien de l’ordre public, le défi écologique et la gestion des migrants sur le sol italien.
D’abord, l’ordre public que le Successeur de Pierre analyse comme «l'aspect prioritaire et aussi le plus délicat [du] travail» de préfet, nécessitant «de concilier le respect de la loi avec l'attention à l'humain». Chargés de faire respecter l’ordre public dans chacune de leurs provinces, les préfets se sont vus encouragés dans les traitements des dossier à allier «la protection des victimes avec le traitement équitable des coupables».
Une paternité institutionnelle qui ne ménage ni sacrifices ni nuits blanches
Au-delà de cet ordre public extérieur, le Pape a évoqué «l’ordre personnel et intérieur» que chaque administrateur est appelé à ressentir afin de «créer un climat d'harmonieuse coexistence». Il a ensuite comparé la fonction publique du préfet à une forme de «paternité institutionnelle» qui «mérite notre gratitude».
L’attention au climat, deuxième défi, n’est plus une surprise dans la bouche du Pape François. Face à la centaine de préfets, il a cité les récents désastres dus aux changements climatiques en Italie, notamment les incendies en Sicile de l’été 2023 ou la tempête Ciaran en Toscane en novembre 2023. «Il vous incombe de gérer au mieux les ressources disponibles et (…) d'unir les efforts pour protéger, à temps et avec prévoyance, notre maison commune, qui doit être préservée», a affirmé le Saint-Père, les appelant à faire appel aux «meilleures qualités du peuple italien, qui, surtout dans les difficultés, sait se rassembler de manière exemplaire, alliant l'efficacité des institutions à l'engagement des citoyens».
Enfin, le Pape a demandé aux préfets de travailler à l’intégration des migrants qui arrivent sur le territoire italien. Conscient de la difficulté de cette tâche «pas facile, auprès de ces personnes blessées et vulnérables», il a rappelé l’importance de l’intégration: «Les migrants doivent être accueillis, accompagnés, promus et intégrés. S'il n'y a pas cela, il y a un danger; s'il n'y a pas cette voie vers l'intégration, il y a un danger.»
Des organisations criminelles spéculant sans aucune pitié sur les malheurs des migrants
Fustigeant les «camps de concentration dans certains pays d'Afrique du Nord, où ceux qui veulent venir en Europe sont traités comme des esclaves, torturés, voire tués», le Pape a demandé aux préfets de voir dans les migrants «des frères et sœurs qui ont besoin d'être arrachés aux tentacules des organisations criminelles, capables de spéculer sans aucune pitié sur leurs malheur». Pour ce faire, les préfets ne peuvent être laissés seuls, selon le Pape, et doivent entendre «les préoccupations et les tensions qui peuvent se développer chez les résidents». Selon le ministère de l’Intérieur italien, le mois de juin et de juin 2023, plus de 58 700 migrants ont débarqué sur le littoral soit deux fois plus que le chiffre enregistré en 2022 pour la même période (25 458 clandestins).
Reliant le sujet de l’immigration à la démographie, le Pape s’est dit «préoccupé» par le manque de naissance en Italie intégration en Italie. En effet, pour la première fois depuis l’unité du pays en 1871, moins de 400 000 enfants (393 000) sont nés en Italie en 2022 selon l'Instat. Pour le Pape argentin, les Italiens ont une double responsabilité: «faire des enfants mais aussi accueillir les migrants comme des enfants».
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