Messe chrismale: Dieu cherche ceux qui pleurent les péchés du monde
Myriam Sandouno – Cité du Vatican
L’Église commémore en ce jour l’institution de l’Eucharistie et du sacerdoce. C’est aussi ce que rappelle la messe chrismale, souvent célébrée dans la matinée du Jeudi Saint. Au cours de cette célébration eucharistique, l’évêque bénit les huiles saintes pour les malades, les catéchumènes, ainsi que le saint chrême pour l'ordination sacerdotale. Cette huile parfumée utilisée au cours de l’année pour les sacrements du baptême, de la confirmation et de l’ordre.
Dans la basilique Saint-Pierre, le Pape a présidé aujourd’hui la messe chrismale, entouré comme chaque année, des prêtres de son diocèse, appelés à renouveler leurs promesses sacerdotales. 4 000 personnes étaient présentes à cette célébration eucharistique, dont 1500 prêtres. François a centré son homélie sur «la componction», un aspect plutôt négligé -mais essentiel– pour la vie spirituelle.
De quoi s’agit-il?
Le mot évoque la «piqûre», dit le Pape, précisant ensuite que «la componction est une “piqûre au cœur”, une perforation qui le blesse, faisant couler les larmes du repentir». Un épisode concernant saint Pierre éclaire. Transpercé par le regard et par les paroles de Jésus ressuscité, le jour de la Pentecôte, purifié et embrasé par l’Esprit, il proclame aux habitants de Jérusalem: «Dieu l’a fait Seigneur et Christ, ce Jésus que vous avez crucifié». (cf. Ac 2, 36). Ceux qui écoutent Pierre ressentent à la fois le mal qu’ils ont fait et le salut que le Seigneur leur accorde, et «en entendant ces choses – dit le texte – ils furent touchés au cœur» (Ac 2, 37).
Voici la componction, déclare François. Elle n’est pas un sentiment de culpabilité qui abat, ni un scrupule qui paralyse, mais une piqûre salutaire qui brûle à l’intérieur et guérit. Parce que le cœur, poursuit-il, lorsqu’il voit son mal et se reconnaît pécheur, s’ouvre, accueille l’action de l’Esprit Saint, eau vive qui l’émeut et fait couler des larmes sur son visage. «Celui qui jette le masque et laisse Dieu regarder dans son cœur reçoit le don de ces larmes, les eaux les plus saintes après celles du baptême», affirme le Pape.
La repentance
Avant de poursuivre sa réflexion, le Saint-Père s’est arrêté sur les «pleurs». Pour lui, il ne s’agit pas de «nous pleurer dessus», lorsque «nous sommes déçus ou inquiets à cause de nos attentes qui ont échoué»; il s’agit plutôt de se repentir sérieusement d’avoir attristé Dieu avec le péché, ajoute-t-il, «d’admettre que nous avons perdu le chemin de la sainteté, n’ayant pas su garder la foi en l’amour de Celui qui a donné sa vie pour nous». François met en garde contre l'hypocrisie cléricale dans laquelle l'Église glisse parfois, et dont il faut se méfier.
La componction, demande «un effort» mais redonne «la paix»; elle ne provoque «pas d’angoisse» mais «soulage l’âme de ses fardeaux», parce qu’elle «agit dans la blessure du péché, en nous disposant à recevoir la caresse du médecin céleste qui transforme le cœur quand il est "brisé et broyé" (Ps 51, 19), adouci par les larmes», précise François.
Pleurer les péchés de l'Église et du monde et intercéder
Avoir de la componction dans le cœur, permet de se sentir de plus en plus frère de tous les pécheurs du monde, sans aucun sentiment de supériorité ou de dureté de jugement, mais avec le désir d’aimer et de réparer, renchérit-il. «Le Seigneur recherche, surtout parmi ceux qui Lui sont consacrés, ceux qui pleurent les péchés de l’Église et du monde, en se faisant instrument d’intercession pour tous». «Combien de témoins héroïques dans l’Église nous montrent cette voie», déclare le Pape invitant à penser aux moines du désert, en Orient et en Occident; à l’intercession continue, faite de gémissements et de larmes, de saint Grégoire de Narek; à l’offrande franciscaine pour l’amour non aimé; aux prêtres, comme le curé d’Ars, «qui ont vécu de pénitence pour le salut des autres. Ce n’est pas de la poésie, c’est le sacerdoce», souligne le successeur de Pierre. Il invite en ce Jeudi Saint de l’Année de la prière, à demander la grâce de la componction dans la prière.
«Revenir à l’adoration et à la prière du cœur»
À tous les prêtres, le Pape prodigue quelques conseils. François exhorte dans un premier temps à ne pas regarder la vie et l’appel dans une perspective d’efficacité et d’immédiateté, liés seulement à aujourd’hui et à ses urgences et attentes, mais dans l’ensemble du passé et de l’avenir. Puis d’inviter ensuite, à redécouvrir la nécessité de se consacrer à une prière qui ne soit pas due et fonctionnelle, mais gratuite, calme et prolongée. En effet, estime-t-il, il convient de «revenir à l’adoration et à la prière du cœur».
«Frères, la certitude que nous a donnée aujourd’hui la Parole nous console en toutes choses: le Seigneur, consacré par l’onction (cf. Lc 4, 18), est venu "guérir ceux qui ont le cœur brisé" (Is 61, 1). Alors, si le cœur est brisé, il peut être pansé et guéri par Jésus», conclut le Pape.
Ce Jeudi Saint «jour de naissance du sacerdoce», fête donc du sacerdoce où tous les prêtres sont invités à renouveler leur engagement, le Pape François a ,au cours de cette messe chrismale, remercié «les prêtres, pour vos cœurs ouverts et dociles; merci pour vos peines et vos larmes; merci parce que vous apportez la merveille de la miséricorde, Dieu, aux frères et aux sœurs de notre temps. Que le Seigneur vous réconforte, vous confirme et vous récompense».
Un livre en cadeau aux prêtres
Au terme de la messe, le livre du Pape François intitulé "Sur le discernement", avec la collaboration de Diego Fares et Miguel Àngel Fiorito, publié aux éditions Edizioni Dehoniane, a été offert à chacun des prêtres.
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