Face aux standards et aux artifices, le Pape invite les jeunes à la joie et la vérité

Delphine Allaire - Cité du Vatican

Pensant au Jubilé des Jeunes en juillet 2025 et aux JMJ de Séoul prévues trois ans, le Pape argentin nourrit le rêve que ces deux rendez-vous à portée universelle «puissent faire rencontrer Jésus à de nombreux jeunes, même à ceux qui ne fréquentent pas normalement l'Église, en leur apportant le message de l'espérance».

«Je pense à ces garçons et à ces filles qui ont “baissé les yeux”, qui ont perdu l’horizon, mis de côté leurs grands rêves et se sont empêtrés dans la tristesse et le mal de vivre», confie l’évêque de Rome, évoquant une perte d’espérance et un repli sur soi, «avec peu de relations, peu de centres d’intérêts», de la part de nombreux jeunes dans les grandes villes d’Asie, pourtant «continent jeune et dynamique».

La joie, une nourriture chrétienne

Tout en travaillant à ces grands événements, le Pape conseille aux membres des pastorales des jeunes de veiller aux chemins ordinaires dans la vie quotidienne, autrement dit «au chemin et à la pastorale des petits pas, des petits nombres, des mots et des gestes simples, des moments de célébration et de prière en communauté, des décisions de chaque jour.» Selon François qui canonisera bientôt le jeune Carlo Acutis, ces expériences moins visibles creusent profondément le cœur et portent des fruits durables dans le temps, dans le sillage de la sainteté de la vie quotidienne détaillée dans son exhortation apostolique publiée en avril 2018, Gaudete et exsultate.

«Et sans faire de publicité pour mes écrits, lisez Gaudete et exsultate, c'est un hymne à la joie, et le chrétien triste est un triste chrétien. La joie doit être la nourriture du chrétien, l'expression du chrétien, et si vous ne savez pas ce qu'est la joie, allez devant le miroir, faites ceci [il mime un geste], vous commencerez à rire un peu!», s'est exclamé le Souverain pontife. 

François a ensuite rappelé quelques certitudes fondamentales pour aider les jeunes: «Dieu est amour», «le Christ te sauve», «il vit», «l'Esprit donne la vie». Quatre vérités simples à ne jamais se lasser de proclamer, «car les jeunes sont particulièrement touchés par les nouvelles négatives qui nous assaillent». Or, celles-ci ne doivent pas occulter la certitude que le Christ ressuscité est avec eux et qu'il est plus fort que tout mal.

Le trésor du discernement

Un autre élément essentiel mis en avant par le Pape est le discernement spirituel que les agents pastoraux doivent, les premiers, apprendre: prêtres et religieux, catéchistes, accompagnateurs, jeunes eux-mêmes qui suivent d'autres jeunes, avance l'évêque de Rome, précisant que «le discernement est un art qui ne s'improvise pas, mais qui doit être approfondi, expérimenté et vécu».

«Pour un jeune, trouver une personne capable de discernement, c'est trouver un trésor. Sur le chemin de la foi et de la découverte de sa vocation, un guide avisé permet d'éviter beaucoup d'erreurs, beaucoup de naïveté, beaucoup de moments d'égarement et de “paralysie”. Un guide qui n'enlève pas la liberté mais qui accompagne», a-t-il poursuivi, renvoyant vers son cycle de catéchèses consacré au discernement lors des audiences générales du mercredi.

Accompagner et personnaliser

Selon François, le discernement doit être synodal, personnel et orienté vers la vérité. Synodal, car aujourd’hui l’individualisme prévaut, notamment avec cette catégorisation «j'aime-je n'aime pas», dit le Pape. «Et ça, c'est de l'individualisme laid». «Or, dans la pratique du discernement, l'Église met à nos côtés des frères et des sœurs dans la foi pour parcourir un chemin ensemble, et non pas seuls, et notre maturation intérieure devient ainsi beaucoup plus riche.» 

En même temps, le discernement est personnel. «Dans notre monde, tout est standardisé et homogénéisé. Les jeunes, eux, doivent être accompagnés un par un. Chacun est unique et irremplaçable. Chacun mérite d'être écouté, compris et conseillé en fonction de son âge, de sa maturité humaine et spirituelle».

L'authenticité pour sortir des identités artificielles

Enfin, le Pape rappelle qu’il est orienté vers la vérité. «Dans une société polluée par les fausses nouvelles, où les profils personnels sont souvent modifiés ou falsifiés, où des identités alternatives sont créées, le discernement se veut un parcours d'authenticité pour les jeunes: sortir des identités artificielles et découvrir sa véritable identité. Il s'agit de devenir “vrai” devant soi-même, devant les autres et devant Dieu», a-t-il exhorté, digressant sur la métaphore du maquillage. 

«Nous rions quand nous voyons les femmes se "maquiller", elles doivent être belles, c'est pour cela qu'elles se maquillent, c'est un mérite, mais combien de fois nous maquillons-nous l'âme pour "paraître" ce que nous ne sommes pas. Faites attention à cela. Vrai devant les autres, devant Dieu, devant nous-mêmes», a répété François, concluant sur l’importance de l’écoute des jeunes.

«Une véritable écoute, qui ne soit pas une “demi-écoute” ou une simple “écoute de façade”. Les jeunes ne doivent pas être instrumentalisés pour mettre en œuvre des idées qui ont déjà été décidées par d'autres ou qui ne répondent pas vraiment à leurs besoins», assure le Pape, défendant leur responsabilisation et leur implication dans le dialogue et les décisions.