Priver les enfants d’éducation, un «génocide culturel» selon François
Alexandra Sirgant – Cité du Vatican
Le dicastère pour la Culture et l’Éducation était pour la première fois depuis sa création en juin 2022 réunis en plénière ce jeudi 21 novembre au Vatican. Le Pape François a exhorté les membres du dicastère, né de l’unification de la Congrégation pour l’éducation catholique avec le Conseil pontifical pour la culture lors de la promulgation de la constitution apostolique Praedicate Evangelium, à élargir leurs horizons et à ne pas se laisser envahir par la peur mais par l’espérance confiée par la richesse de leur patrimoine culturel et éducatif.
L’Éducation doit s’accompagner d’un projet culturel
La fusion de deux entités fut un «risque» a admis François aux participants à la plénière reçu en audience dans la salle Clémentine du palais apostolique, tout en expliquant que le décision fut prise non pas dans «la recherche d'une rationalisation économique (…), mais plutôt avec une vision des possibilités de dialogue, de synergie et d'innovation qui peuvent rendre ces deux domaines encore plus fructueux».
Le Saint-Père a poursuivi en exprimant son opposition aux modèles éducatifs qui soient de simples «usines à résultats», sans «un projet culturel qui permette de former des personnes capables d’aider le monde à tourner la page, à éradiquer les inégalités, la pauvreté endémique et l’exclusion». Au contraire, les écoles, les universités, les centres culturels doivent «nous apprendre à désirer, à rester assoiffées, à avoir des rêves, car, comme le rappelle la deuxième lettre de Pierre, nous «attendons de nouveaux cieux et une nouvelle terre, où la justice habitera» (3,13) a déclaré François.
Ainsi, la question clé à laquelle les institutions doivent répondre est la suivante: «Qu'est-ce que nous attendons vraiment? Peut-être que la réponse honnête sera décevante: le succès aux yeux du monde, l'honneur d'être dans le "classement" ou l'auto-préservation». Des attentes bien inférieures à ce que permet l’expérience de Dieu selon le Saint-Père. S’appuyant sur un poème de l’écrivaine britannique Emily Dickinson, le Pape argentin a exhorté les participants à comprendre leur mission dans le domaine de l'éducation et de la culture comme «un appel à élargir les horizons, à déborder de vitalité intérieure, à faire de la place pour de nouvelles possibilités, à offrir les modalités du don qui ne s'élargit que lorsqu'il est partagé. À l'éducateur et à l'artiste, notre devoir est de dire: "Soyez copieux!"».
Ne pas être envahi par la peur mais par l’espérance
Le Souverain pontife a ensuite enjoint les membres du dicastère a ne pas être envahis par la peur. Tout d’abord, «parce que le Christ est notre guide et notre compagnon de route» mais aussi parce que «nous sommes les gardiens d’un patrimoine culturel et éducatif qui nous dépasse», allant de saint Augustin à saint Thomas d’Aquin, d’artistes inspirés par le Christ tel que le compositeur français Olivier Messiaen ou encore de savant comme le philosophe Blaise Pascal. «Entourés d'une telle pléiade de témoins, débarrassons-nous de tout fardeau de pessimisme. Convergeons, de toutes nos forces, pour débarrasser l'être humain de l'ombre du nihilisme, qui est peut-être le fléau le plus dangereux de la culture actuelle, car c'est celui qui prétend effacer l'espérance» a souligné François, en rappelant le thème de l’année jubilaire à venir.
Priver les enfants de leur avenir, un «génocide culturel»
Le monde n’a jamais compté autant d’élèves, 110 millions d’enfants terminant cette année leur scolarité primaire. Mais ce chiffre encourageant cache une réalité plus disparate, car 250 millions d’enfants et d’adolescents ne vont toujours pas à l’école. «Changer cette situation est un impératif moral» a martelé l’évêque de Rome, «car le génocide culturel ne se produit pas seulement par la destruction du patrimoine; il y a génocide culturel lorsque nous privons les enfants de leur avenir, lorsque nous ne leur offrons pas les conditions nécessaires pour devenir ce qu'ils pourraient être». Pour illustrer son propos, le Pape a cité le recueil d’essais d’Antoine de Saint-Exupéry, Terre des hommes, dans lequel l’écrivain et journaliste français relate avoir croisé dans un train des familles de réfugiés et explique avoir été «tourmenté par le fait qu'en chacun de ces hommes il y a un petit Mozart assassiné».
Pour être la hauteur de cette immense responsabilité, le Saint-Père appelle les centres de recherches des universités pontificales à s’engager dans l’étude des développement scientifique et les innovations technologiques, en mettant en lumière «ses avantages et ses dangers».
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