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Lecture de la bulle d'indiction pour le Jubilé de 2025 (photo d'archives). Lecture de la bulle d'indiction pour le Jubilé de 2025 (photo d'archives).  (Vatican Media)

Voyage à travers les Jubilés grâce aux bulles d'indiction

Ces documents par lesquels les Années saintes ont été proclamées depuis le début du XXe siècle permettent de retracer l'histoire récente du monde et de l'Église au cours des deux derniers siècles.

Amedeo Lomonaco - Cité du Vatican

L'itinéraire des Jubilés, depuis ses origines en 1300, est un chemin qui traverse des contextes historiques très différents. C'est un itinéraire de foi toujours orienté par la même boussole: celle du pardon qui trouve en Jésus, une «Porte» toujours ouverte. Les Jubilés sont des années de grâce où les attentes de l'humanité semblent s'aligner sur le même seuil.

Les bulles d'indiction

L'histoire des Années saintes peut également être lue à travers les bulles d'indiction, des documents généralement rédigés en latin et portant le sceau du Pape, dans lesquels sont indiquées les dates du début et de la fin du jubilé. À l'origine, le sceau -c'est-à-dire, la «bulle»- était généralement en plomb et portait au recto de l'image des saints apôtres Pierre et Paul. Au verso figurait le nom du Souverain pontife. Le nom de ce document particulier, la bulle, dérive précisément de la forme du sceau. Chaque bulle est identifiée, comme les autres documents pontificaux, par ses mots initiaux. Les documents annonçant le Jubilé indiquent également certains aspects saillants de l'Année Sainte. Des thèmes et des lignes directrices souvent liés aux grands événements de l'histoire.

1900, Properante ad Exitum Saeculo

Les bulles proclamant les jubilés des XXe et XXIe siècles ont traversé des moments cruciaux de l'histoire, des époques marquées par des progrès mais aussi par des ruptures dramatiques. Dans la bulle pour l'Année Sainte 1900, «Properante ad Exitum Saeculo», Léon XIII, Pape de l'encyclique «Rerum novarum», rappelle le contexte de la transition entre deux siècles, marqué par le «changement de conditions de Rome» proclamée capitale du Royaume d'Italie. Le Jubilé de 1900, avec le Souverain pontife «emprisonné au Vatican» pour la question romaine, s'inscrit dans un monde de plus en plus petit, où les bateaux à vapeur sillonnent rapidement les océans et où le réseau ferroviaire devient de plus en plus capillaire. À ces progrès de la mobilité s'ajoutent les commodités modernes. Nombre de ces inventions, ancêtres des technologies de notre temps, sont présentées et admirées lors de la grande Exposition universelle de Paris en 1900.

Se référant à l'Année sainte, Léon XIII lança un appel pour le réveil de la foi du peuple chrétien et l'exhorta à relever le défi de la modernisation. Dans la bulle «Properante ad Exitum Saeculo», le Pape souligne notamment que pour «un bon catholique, en ce temps saint, il convient, s'il veut rester fidèle à lui-même, de parcourir Rome en se laissant guider uniquement par la foi chrétienne». «Il convient, écrit le Pape, de renoncer aux spectacles intempestifs des choses futiles ou profanes, en tournant plutôt notre esprit vers celles qui prédisposent à la religion et à la piété». Il s'agit d'une période de l'histoire, la dernière du XIXe siècle, au cours de laquelle le profil des villes a été profondément transformé par la révolution industrielle. L'élan que le Pape entendait promouvoir, était celui d'une «modernité chrétienne».

1925, Miséricorde infinie

Le début des années 1900 fut secoué par la Première Guerre mondiale qui, de 1914 à 1918, embrase l'Europe. Des millions d'hommes se battent et meurent. Les armes, gaz asphyxiants, chars et avions bombardés, sont de plus en plus dévastateurs. Un autre événement de cette première période du XXe siècle, marquée entre autres par la montée du totalitarisme, est la destitution du tsar russe et la victoire des révolutionnaires communistes. En 1924, le Pape Pie XI a proclamé l'Année sainte 1925 par la bulle intitulée «Infinita Dei Misericordia». Dans ce document, le Pontife appelle à une «restauration de la société». Pour lui, il est nécessaire «que la cupidité excessive des citoyens et des nations elles-mêmes soit freinée par les lois de l'Évangile». De nombreux pays sont encore secoués par les blessures causées par la Première Guerre mondiale. «On ne voit pas, ajoute le Souverain pontife, comment les liens de fraternité entre les peuples pourront être restaurés, et comment une paix durable pourra être rétablie si les citoyens et les gouvernements eux-mêmes ne sont pas remplis de cette charité qui, malheureusement, pendant longtemps, surtout à cause de la guerre, semblait endormie et presque abandonnée».

1933, Quod Nuper

En 1933, à l'occasion du 1900e anniversaire de la mort de Jésus, s'est ouvert le Jubilé extraordinaire de la Rédemption, annoncé par le pape Pie XI dans la bulle d'indiction «Quod Nuper». «Que les hommes, a écrit le Pontife, détournent un peu leurs pensées des choses terrestres et passagères dans lesquelles ils luttent si péniblement aujourd'hui, vers les choses célestes et éternelles; et que, des conditions anxieuses et tristes de ce temps, ils élèvent leur esprit vers l'espérance du bonheur auquel Jésus-Christ Notre-Seigneur nous a appelés». Ce fut une période au cours de laquelle, dans plusieurs pays, les valeurs démocratiques ont été démolies. Dans les années qui ont suivi la Première Guerre mondiale, de fortes tensions sociales et des revendications nationalistes ont servi de toile de fond à la mise en place de régimes totalitaires. Le fascisme en Italie et le nazisme en Allemagne ont conduit le monde vers la Seconde Guerre mondiale. Une horreur qui a causé plus de 50 millions de morts et d'immenses destructions.


1950, Iubilaeum Maximum

La bulle d'indiction du jubilé de l'Année sainte 1950, «Iubilaeum Maximum», suit le drame de la Seconde Guerre mondiale. Pie XII espérait que le Jubilé «préparerait heureusement un retour général au Christ». Le Pape voyait de l'espoir dans les ruines, non seulement matérielles, d'un nouvel humanisme.

“Puisse la paix revenir enfin dans le cœur de tous, à l'intérieur des maisons, dans les nations, dans la communauté universelle des peuples. Que ceux qui souffrent de persécutions pour la justice aient la force d'âme dont l'Église s'est parée, dès ses origines, avec le sang des martyrsì; que les réfugiés, les prisonniers, ceux qui ont été arrachés à leur foyer, retournent au plus tôt dans leur douce patrie; que les souffrants et les angoissés soient comblés par les consolations célestes.”

Les années qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale ont été celles où se dessinaient de nouveaux équilibres géopolitiques, dictés par deux grandes puissances mondiales, les États-Unis et l'Union soviétique. Le monde a été divisé en blocs et une «guerre froide» s'est ouverte, également basée sur la stratégie de dissuasion des armes nucléaires.

1975, Apostolorum Limina

Les années 70 ont été marquées, entre autres, par le processus de sécularisation, par de nombreux conflits, dont celui du Vietnam, et par l'extension des mouvements de protestation de la jeunesse. La société de 68 a appelé à un changement profond du tissu social. C'est dans ce contexte que s'est ouvert en 1975 le Jubilé proclamé par Paul VI avec la bulle «Apostolorum Limina». L'Église, «sans envahir les domaines qui ne sont pas de sa compétence, a voulu faire sentir aux hommes la nécessité de la conversion à Dieu». «Pour le monde entier, écrit le pape Paul VI, cet appel au renouveau et à la réconciliation répond aux aspirations les plus sincères à la liberté, à la justice, à l'unité et à la paix que nous voyons présentes partout où les hommes prennent conscience de leurs problèmes les plus graves, et souffrent des malheurs produits par les divisions et les guerres fratricides».

1983, Aperite Portas Redemptori

Renouvelant l'invitation exprimée au lendemain de son élection à la Chaire de Pierre, Jean-Paul II a lancé un appel à toute l'Église pour le Jubilé extraordinaire de 1983: «Ouvrez les portes au Rédempteur». Dans la bulle d'indiction du Jubilé pour le 1950ème  anniversaire de la Rédemption, «Aperite Portas Redemptori», il s'adresse à tous les fidèles du monde catholique: «L'Église entière, des évêques aux plus petits et humbles fidèles, doit donc se sentir appelée à vivre le dernier aperçu de ce XXe siècle de la Rédemption dans un esprit d'Avent renouvelé et approfondi, qui le prépare au troisième millénaire désormais proche, avec les mêmes sentiments que ceux avec lesquels la Vierge Marie a attendu la naissance du Seigneur, dans l'humilité de notre nature humaine». Les années 80, secouées par des fléaux comme le sida, ont précédé le démantèlement progressif des barrières entre l'Est et l'Ouest. La chute du mur de Berlin en 1989 a conduit à un nouvel ordre géopolitique. Un modèle économique déterminé avant tout par les processus de mondialisation commença à s'imposer dans les différentes régions de la planète.

2000, Incarnationis Mysterium

Le Jubilé de l'an 2000 accompagne les premiers pas de l'humanité dans le troisième millénaire. Dans la bulle d'indiction Incarnationis Mysterium, Jean-Paul II souhaite que l'Année sainte soit «un chant unique et ininterrompu de louange à la Trinité». «Le pas des croyants vers le troisième millénaire, écrit le Souverain pontife, n'est nullement affecté par la lassitude que pourrait entraîner le poids de deux mille ans d'histoire; au contraire, les chrétiens se sentent plutôt rassurés, car ils ont conscience qu'ils apportent au monde la vraie lumière, le Christ Seigneur». La première décennie du troisième millénaire est secouée par de nombreux événements, dont l'attaque terroriste du 11 septembre 2001 contre les tours jumelles et le Pentagone. Ce sont des années au cours desquelles la crise financière, qui a débuté aux États-Unis, entraîne de lourdes conséquences pour les économies du monde entier.

2015, Misericordiae Vultus

«Ne tombez pas dans le terrible piège de penser que la vie dépend de l'argent et que, face à lui, tout le reste devient sans valeur et sans intérêt. Ce n'est qu'une illusion». C'est l'un des passages de la bulle d'indiction en 2015, du Jubilé extraordinaire de la Miséricorde, à l'occasion du 50e anniversaire de la fin du Concile Vatican II. Le Pape François souligne que la pierre angulaire de la vie de l'Église est la miséricorde et dans la bulle, intitulée Misericordiae Vultus, il souhaite que «le pardon parvienne à tous». Ce sont des années où le phénomène des migrations devenait de plus en plus important, et où les déséquilibres entre les régions du nord et du sud de la planète s'accentuaient.

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23 décembre 2024, 13:11