Pour le Pape, la gratuité est fondamentale au ministère diaconal
Christian Losambe, SJ - Cité du Vatican
Environ 6 000 pèlerins se sont retrouvés à Rome, du 21 au 23 février, pour célébrer le Jubilé consacré aux diacres, le quatrième grand rendez-vous de cette Année Sainte. Après avoir passé la Porte Sainte de la basilique Saint-Pierre, organisé des pèlerinages dans 12 églises de Rome et suivi des conférences sur leur rôle dans l’Église synodale, les milliers de diacres ont conclu ce dimanche leur Jubilé par la messe présidée par le pro-préfet du dicastère pour l’Évangélisation, Mgr Rino Fisichella, dans la basilique Saint-Pierre. Il a été, en effet, délégué par le Pape en raison de son hospitalisation à l’hôpital Gemelli.
Dans son homélie lue par le pro-préfet du dicastère pour l’Évangélisation, le Pape s’est arrêté sur le message des lectures de la liturgie du jour, qu’il a résumé en un mot: la gratuité. «Un terme qui vous est certainement cher, à vous diacres, réunis ici pour la célébration du Jubilé», a-t-il souligné en les invitant à réfléchir à «cette dimension fondamentale de la vie chrétienne et de votre ministère, en particulier sous trois aspects: le pardon, le service désintéressé et la communion».
Savoir pardonner et demander pardon
D’emblée, l’évêque de Rome a souligné que la proclamation du pardon est une tâche essentielle du diacre. Précisant que «c’est un élément indispensable pour tout cheminement ecclésial et une condition pour toute coexistence humaine», François a fait savoir dans son homélie que Jésus nous en montre la nécessité et la portée lorsqu’il dit: «Aimez vos ennemis» (Lc 6, 27). Pour grandir ensemble donc, en partageant les lumières et les ombres, les succès et les échecs des uns et des autres, a-t-il ajouté, «il est nécessaire de savoir pardonner et demander pardon, en rétablissant les relations et en n’excluant pas de notre amour même ceux qui nous frappent et nous trahissent».
Un monde, en effet, où il n’y a que de la haine pour les adversaires, a fustigé le Pape, est un monde «sans espérance, sans avenir, destiné à être déchiré par des guerres, des divisions et des vengeances sans fin, comme nous le voyons malheureusement encore aujourd’hui, à tant de niveaux et dans diverses parties du monde». Ainsi, a-t-il renchéri, pardonner signifie donc «préparer une maison accueillante et sûre pour l’avenir en nous et dans nos communautés». Et c’est le diacre, a expliqué le Souverain pontife, personnellement investi d’un ministère qui le conduit aux périphéries du monde, «s’engage à voir – et à enseigner aux autres à voir – en tous, même en ceux qui se trompent et font souffrir, une sœur et un frère blessés dans l’âme, et donc ayant plus besoin que quiconque de réconciliation, d’accompagnement et d’aide».
François a donc fait savoir que les lectures du jour nous parlent de cette ouverture en nous présentant l’amour loyal et généreux de David pour Saül, de la mort exemplaire du diacre Étienne et surtout de Jésus, modèle de toute diaconie, «qui sur la croix, “se vidant” de lui-même jusqu’à donner sa vie pour nous (cf. Ph 2, 7), prie pour ceux qui le crucifient et ouvre au bon larron les portes du paradis (cf. Lc 23, 34.43)».
Le service désintéressé, dimension substantielle du diacre
Le service désintéressé est le deuxième point que le Saint-Père a développé dans son homélie. S’appuyant sur l’Évangile du jour, il a expliqué combien le Christ le décrit dans une phrase aussi simple que claire: «faites du bien et prêtez sans rien espérer en retour» (Lc 6, 35). Quelques mots qui, selon le Pape, portent en eux le bon parfum de l’amitié: «tout d’abord celle de Dieu pour nous, mais aussi la nôtre». Pour le diacre, a-t-il rappelé, cette attitude n’est pas un aspect accessoire de son agir, mais une dimension substantielle de son être. «Il se consacre en effet à être, dans son ministère, “sculpteur” et “peintre” du visage miséricordieux du Père, témoin du mystère de Dieu-Trinité».
S’adressant particulièrement aux diacres, le Saint-Père leur a expliqué que le travail gratuit qu’ils accomplissent, «expression de votre consécration à la charité du Christ», est pour eux la première annonce de la Parole, source de confiance et de joie pour ceux qui vous rencontrent. François a donc encouragé les diacres à les accompagner le plus possible avec le sourire, «sans vous plaindre ni chercher la reconnaissance, en vous soutenant mutuellement, même dans vos relations avec les évêques et les prêtres, “comme expression d’une Église engagée à grandir dans le service du Royaume avec la valorisation de tous les degrés du ministère ordonné“». Ainsi, «votre action concertée et généreuse sera ainsi un pont qui reliera l’Autel à la rue, l’Eucharistie à la vie quotidienne des gens. La charité sera votre plus belle liturgie et la liturgie votre plus humble service», a ajouté l’évêque de Rome.
Le ministère diaconal, l’une des plus belles expressions d’une Église synodale
Dans le troisième point de son homélie, enfin, portant sur la gratuité comme «source de communion», François a invité les diacres à donner sans rien demander en retour unit, car cela crée des liens, exprime et nourrit une communauté qui n’a d’autre fin que le don de soi et le bien des personnes. Sur ce, il les a exhortés à suivre l’exemple de saint Laurent, leur patron, «à qui ses accusateurs demandaient de leur remettre les trésors de l’Église, leur montra les pauvres et leur dit: “Voilà nos trésors!“».
C’est ainsi, en effet, que «votre mission qui vous prend de la société pour vous y réinsérer et en faire un lieu toujours plus accueillant et ouvert à tous, est une des plus belles expressions d’une Église synodale et “en sortie”».
23 diacres nouvellement ordonnés des mains de Mgr Fisichella
Au cours de cette célébration eucharistique présidée ce dimanche dans la basilique Saint-Pierre, 23 diacres ont été ordonnés par le pro-préfet du dicastère pour l’Évangélisation, Mgr Rino Fisichella. Parmi eux, deux sont originaires du Brésil, six de Colombie, un de France, trois d'Italie, trois du Mexique, deux de Pologne, trois d'Espagne et trois des États-Unis.
Au terme de son homélie, François leur a fait savoir qu’en recevant le sacrement de l’Ordre, ils “descendront”, et non qu’ils “monteront“, parce qu’avec l’ordination, «on ne monte pas, mais on descend, on se fait petit, on s’abaisse, on se dépouille», a-t-il expliqué en reprenant les mots de saint Paul: «on abandonne, dans le service, “l’homme de la terre”, et on revêt, dans la charité, “l’homme du ciel”» (cf. 1 Co 15, 45-49). Le Pape a conclu en confiant les diacres à la Vierge Marie, servante du Seigneur, et à saint Laurent, leur patron, «afin qu’ils nous aident à vivre notre ministère avec un cœur humble et plein d’amour, et à être, dans la gratuité, des apôtres de pardon, des serviteurs désintéressés de nos frères et des constructeurs de communion».
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