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Tous les Saints
Tous les Saints, BAV Vat. sir. 559, f. 93v

Tous les Saints

Déjà à la fin du IIe siècle, on trouve une véritable vénération des saints. Au début, les saints martyrs, auxquels rapidement furent assimilés les apôtres, témoins officiels de la foi. Après les grandes persécutions de l'Empire romain, des hommes et femmes qui avaient mené une vie chrétienne belle et héroïque, devinrent progressivement objets de vénération : le premier saint non-martyr fut saint Martin de Tours. Vers la fin de l'an mille, face au développement incontrôlé de la vénération des saints, et du " commerce " autour des reliques, fut élaboré un processus de canonisation, allant jusqu'à la preuve des miracles.

La solennité de la Toussaint est née en Orient, au IVe siècle, pour ensuite se répandre, toutefois en différentes dates. À Rome, le 13 mai ; en Angleterre et en Irlande, à partir du VIIIe siècle, le 1er novembre. Cette dernière date s'est également imposée à Rome à partir du IXe siècle.

La solennité tombe vers la fin de l'année liturgique, lorsque l'Église garde les yeux fixés sur la fin ultime, et déjà pense à ceux qui ont franchi les portes du Ciel.

Voyant les foules, Jésus gravit la montagne. Il s’assit, et ses disciples s’approchèrent de lui. Alors, ouvrant la bouche, il les enseignait. Il disait :
« Heureux les pauvres de cœur,
car le royaume des Cieux est à eux.
Heureux ceux qui pleurent, car ils seront consolés.
Heureux les doux, car ils recevront la terre en héritage.
Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice,
car ils seront rassasiés.
Heureux les miséricordieux,
car ils obtiendront miséricorde.
Heureux les cœurs purs, car ils verront Dieu.
Heureux les artisans de paix,
car ils seront appelés fils de Dieu.
Heureux ceux qui sont persécutés pour la justice,
car le royaume des Cieux est à eux.
Heureux êtes-vous si l’on vous insulte, si l’on vous persécute et si l’on dit faussement toute sorte de mal contre vous, à cause de moi.
Réjouissez-vous, soyez dans l’allégresse, car votre récompense est grande dans les cieux ! » (Mt 5, 1-12a).

Les Saints

Les saintes et saints - authentiques amis de Dieu - vers lesquels l'Église nous invite aujourd'hui à tourner le regard, sont des hommes et des femmes qui se sont laissés fasciner par cette proposition, qui ont accepté de marcher sur le chemin des Béatitudes. Non pas parce qu'ils sont meilleurs ou plus talentueux que nous : simplement parce qu'ils "savaient" que nous sommes tous des enfants de Dieu et qu'ils en ont fait l'expérience. Ils se sentaient comme des "pécheurs pardonnés" : ce sont les saints. Ils ont appris à se connaître, à orienter leurs forces vers Dieu, vers eux-mêmes et vers les autres, sachant faire confiance dans leurs fragilités, à la Miséricorde divine.

Aujourd'hui, ils nous encouragent à viser haut, à regarder loin devant nous, vers le but et le prix qui nous attend ; ils nous encouragent à ne pas nous résigner face aux difficultés quotidiennes, car la vie a non seulement une fin, mais surtout une fin, la communion éternelle avec Dieu. Avec cette fête, l'Église nous indique et nous unit aux saints, amis de Dieu et modèles de vie bienheureuse, qui intercèdent pour nous, nous encourageant à vivre avec plus d'intensité ce dernier moment de l'année liturgique, signe-symbole du chemin de la vie.

Les huit chemins

Il s'agit de suivre le chemin, ou plutôt les huit chemins, tracés par Jésus et indiqués dans l'évangile : les béatitudes. "Heureux les pauvres de cœur, car le royaume des Cieux est à eux.... ": l'accent n'est pas tant sur les " heureux " que sur le "pourquoi". Tu n’es pas "heureux" parce que tu es "pauvre", mais tu es heureux parce que, en tant que pauvre, tu es dans la condition privilégiée de recevoir le royaume des Cieux. Et il en sera de même pour les sept autres conditions : "Heureux ceux qui pleurent, car ils seront consolés."; "Heureux les doux, car ils recevront la terre en héritage."; "Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice, car ils seront rassasiés."; "Heureux les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde."; "Heureux les cœurs purs, car ils verront Dieu."; "Heureux les artisans de paix, car ils seront appelés fils de Dieu."; "Heureux ceux qui sont persécutés pour la justice, car le royaume des Cieux est à eux."; "Heureux êtes-vous si l’on vous insulte,... Réjouissez-vous, soyez dans l’allégresse, car votre récompense est grande dans les cieux". C'est ce "pourquoi" qui explique tout, qui révèle où les doux trouveront la confiance, où les artisans de paix trouveront la joie... "Heureux", donc, à ne pas prendre dans le sens d’une simple émotion, bien qu'importante, mais comme un désir de se redresser, de ne pas se laisser abattre, de ne pas se ramollir, d’aller de l’avant... parce que Dieu est avec toi. En toi.
Il s'agit donc de voir Dieu, d'être de son côté, d'être l'objet de son attention. Contempler Dieu non pas au ciel, mais déjà aujourd'hui. Voici les huit chemins que nous sommes invités à parcourir afin de pouvoir prendre part nous aussi à la joie indiquée par l’Apocalypse, et que nous pouvons tous suivre : "Bien-aimés, voyez quel grand amour nous a donné le Père pour que nous soyons appelés enfants de Dieu – et nous le sommes... Dès maintenant, nous sommes enfants de Dieu, mais ce que nous serons n’a pas encore été manifesté…" (1 Jean, deuxième lecture). Nous sommes, dit le refrain du psaume en réponse à la première lecture, "le peuple de ceux qui cherchent ta face, Seigneur". Et non pas parce que nous sommes bons ou mauvais, mais parce que Dieu lui-même l'a voulu.

Et moi?

Dans ces "8 paroles" que sont les béatitudes, Jésus m'adresse une invitation : "Le royaume des cieux t'intéresse-t-il ? Es-tu intéressé de cultiver un sens élevé de la vie ?". Bien sûr, le monde va dans un autre sens : il nous invite à nous sentir heureux à travers une vie confortable et financièrement solide, plutôt que "pauvres en esprit". Il nous invite à nous réjouir de toutes les manières et par tous les moyens, plutôt que de dire "heureux ceux qui pleurent". Il nous invite à nous faire entendre, à l'emporter sur les autres, au lieu d'être doux. Il nous invite à nous satisfaire de tout, sans "si" ni "mais", plutôt que de nous satisfaire de paix et de justice. Il nous invite à penser à nous-mêmes, plutôt qu'à être miséricordieux. Il nous invite à aller là où le cœur vous porte, à satisfaire toutes les passions, plutôt que d'être pur de cœur. Il nous invite à défendre nos barrières, plutôt qu’à devenir des artisans de la paix. Il nous invite à l'emporter et à persécuter plutôt que de se laisser insulter !

Les Béatitudes peuvent vraiment sembler absurdes, mais elles sont les 8 voies d'une vie belle, heureuse, pleine... une vie réussie. Ou, si vous voulez, une vie sainte. Et ce n'est pas une question de mots, ce n'est pas une question d'idées... car si nous regardons de près, les Béatitudes nous présentent une image de Jésus lui-même : pauvre, doux, docile, miséricordieux... animé uniquement par le désir "de s’occuper des affaires du Père" (cf. Lc 2,41-50).

Comme je le mentionnais, le point de force n'est pas dans le "bienheureux", mais dans le "pourquoi" : la béatitude, le bonheur vient du fait d'avoir un sens à sa vie, d’avoir une direction, une raison de vivre et, même, pour laquelle il vaut la peine de perdre sa vie : "Ne saviez-vous pas que je dois m'occuper des affaires de mon Père ?", "...car le royaume des cieux est à eux". La joie, donc la béatitude, ne dérive pas de conditions extérieures, qu'il s'agisse de bien-être, de plaisir, de succès... expériences toutes fragiles et éphémères (cf. Mt 7,24-28 : la maison sur le sable et sur le roc), mais du bonheur promis par Dieu à ceux qui assument dans leur cœur certains comportements et les manifestent dans leur vie quotidienne….

Les saints de la porte d'à côté

La solennité de ce jour nous montre donc qu'une vie "bienheureuse", "belle", "réussie", "sainte"... est possible. C'était possible hier, et c'est possible aujourd'hui. Pour tous. Avec nous. Nous pouvons devenir ces "saints de la porte d’à côté” dont nous a parlé le pape François. C'est-à-dire des hommes et des femmes réconciliés avec nous-mêmes, avec les autres et avec Dieu, capables de faire briller la lumière de l'amour miséricordieux de Dieu dans le flux de la vie quotidienne. En famille, au travail, pendant notre temps libre... savoir vivre "Jésus", savoir faire confiance à ses "8 voies". Avec le baptême, nous sommes déjà tous saints, mais nous ne le savons pas ! Trop souvent, nous ne nous rendons même pas compte de cette possibilité que le baptême a placée entre nos mains : et pourtant elle est là. Parce que c'est ainsi qu’a voulu Jésus !

Une anecdote

Lors de la visite d'une église à Turin, un écolier a interrogé l'enseignante sur de beaux vitraux lumineux. "Ils représentent des saints", répondit-elle, "des hommes et des femmes qui ont vécu d'une manière spéciale et forte leur amitié avec Jésus ". Quelques jours plus tard, lors de la fête des saints, le prêtre demanda aux garçons s'ils pouvaient expliquer qui étaient les personnes que l'Église vénère comme "saints" et ce qu'elles avaient fait. Le garçon qui avait demandé une explication sur les vitraux leva la main et d'une voix assurée donna la réponse : "Ce sont ceux qui laissent passer la Lumière".

01 novembre
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