Synode : protéger la Création, «maison commune» des futures générations
Isabella Piro – Cité du Vatican
L’Église doit faire figure de héraut dans le domaine de l’écologie, car il faut en faire plus pour laisser intacte la «maison commune» aux jeunes générations : telle est la réflexion qui a servi de point de départ à l’assemblée synodale ce 17 octobre. Le rêve de nombreux jeunes est celui d’une Église prophétique dans la sphère de l’écologie et de l’économie, a laissé entendre un auditeur : le cri de la terre et celui des pauvres ne peuvent être ignorés. Le non-respect de l’environnement génère en effet de nouvelles pauvretés, d’où l’appel à réformer les systèmes économiques par le contrôle attentif de la consommation, des investissements, des informations financières. Ce que les communautés chrétiennes, les instituts de vie consacrée, les associations et les mouvements ecclésiaux administrent ne constitue pas leur propriété, ont affirmé les évêques : c’est au service des plus pauvres. Les Pères synodaux ont par ailleurs rappelé que l’accaparement des terres de la part des multinationales a des conséquences catastrophiques sur les écosystèmes locaux, contraignant les populations à migrer.
Le travail comme espace de respiration pour la créativité des jeunes
L’analyse du thème du travail était lui aussi au cœur des débats. Aujourd’hui, a-t-on affirmé en Salle du Synode, le travail est surtout considéré comme une source de revenu. Mais une telle approche, purement économique, semble réductrice, parce qu’elle prive le travail de sa dimension humaine et en altère sa créativité. En revanche, les jeunes rêvent d’une occupation qui correspondent à leurs attitudes, car c’est seulement de cette manière qu’ils pourront se réaliser. D’où ce rappel de l’importance des enseignements de la Doctrine Sociale de l’Église.
Aider les jeunes à fréquenter la Bible
Le thème du rôle des jeunes et de ses difficultés, parmi lesquels le cléricalisme, a ensuite été abordé. Les évêques ont reconnu quelques erreurs de la part du clergé, mais en même temps ils encouragent les laïcs à être plus pro-actifs dans la vie ecclésiale. Il faut rechercher un véritable rôle, autrement dit celui qu’inspire non pas sa propre personne, mais bien le Christ et les saints. La vocations à la sainteté est en effet universelle : elle donne un sens à l’action de l’Église et de la vie chrétienne, comme une représentation de son visage le plus beau. Par ailleurs, on compte actuellement 160 jeunes parmi les saints, tous amis passionnés de Jésus Crucifié… Pour beaucoup d’autres, une cause de canonisation est en cours. «Aidons les jeunes à fréquenter la Bible», ont aussi exhorté les évêques, car celle-ci contient les réponses à bien des questions que se posent les jeunes.
La crédibilité de l’Église est en jeu
La Pastorale des jeunes devra dès lors avoir deux objectifs clairs : la rencontre de la jeunesse avec Jésus, et l’écoute des jeunes, afin qu’ils se sentent «interconnectés» dans la vie ecclésiale. De la part de l’Église, les jeunes attendent de la crédibilité, c’est-à-dire une concordance entre action et doctrine, car demander pardon ne sert à rien si ce n’est pas suivi de gestes et d’attitudes concrètes. Et pour être crédibles, il faut affronter des questions cruciales comme celle des abus, afin que les fautes soient reconnus et les structures renouvelées.
Option pour les jeunes, option avec les jeunes
Vient ensuite le monde numérique : les évêques suggèrent par exemple que les jeunes générations participent à la rédaction de standards éthiques pour les pages web catholiques, ou que l’on réfléchisse sur les possibilités offertes par les réseaux sociaux dans le domaine du dialogue interreligieux. Une certaine audace est nécessaire de la part de l’Église, ont estimé les évêques, pour aussi défier le monde à propos de thèmes critiques tels que le trafic des armes, ou pour parler avec clarté à des leader internationaux, afin qu’ils cessent de mettre en danger le futur des jeunes. Toujours soutenir les jeunes, donc, aussi au niveau économique, en essayant de passer de «l’option pour les jeunes» à «l’option avec les jeunes». Ce qui signifie les impliquer pleinement dans la vie ecclésiale, être conscients qu’ils ne représentent pas un problème mais font partie de la solution. Il faut de l’humilité, affirment les évêques : les jeunes doivent être respectés, écoutés, accompagnés dans leur cheminement, sans les «domestiquer» ou éteindre la passion qui les distingue.
Renouveler la catéchèse et relancer les écoles catholiques
L’assemblée synodale s’est aussi arrêté sur la catéchèse et la nécessité de la renouveler, surtout face à la prolifération des sectes, particulièrement dans quelques pays d’Afrique. D’où la proposition de relancer l’évangélisation de manière concrète, en impliquant directement les jeunes et en utilisant un langage adéquat, qui permette d’approfondir la foi. Une réflexion importante a ensuite été menée sur les jeunes des «périphéries de la société», véritables territoires de mission où l’Église peut et doit soutenir l’évangélisation et la formation. L’instruction ne doit pas être en effet un privilège mais un droit. C’est pour cela qu’a été rappelée l’importance des écoles catholiques, lieux de rencontres profondes et formatrices : les écoles et les universités catholiques n’enseignent pas mais elles font expérimenter la charité, le service, la justice, devenant ainsi de véritables expériences de vie et de foi. La Salle du Synode n’a pas non plus ignoré le drame des jeunes toxicodépendants : l’Église est l’unique institution qui puisse prononcer une parole prophétique dans ce domaine ont affirmé les Pères synodaux, rappelant la nécessité de lutter contre l’insidieuse «culture de mort».
Les Journées de la Jeunesse, temps de rencontre et de dialogue
Le regard de l’assemblée synodale s’est ensuite tourné vers les Journées de la Jeunesse, moment de rencontre et aussi de dialogue interreligieux entre des jeunes ayant parfois différentes confessions. De telles journées sont l’exemple d’une Église en sortie et représentent l’espace adapté pour se renouveler et pour rêver, a affirmé un auditeur. Parmi les autres interventions, le thème de la nécessité de valoriser davantage la femme dans la vie de l’Église a été à nouveau évoquer, tout comme celui d’une Église « générationnelle » qui permette aux jeunes d’être des évangélisateurs, coresponsables et engagés, pas convoqués, de leurs contemporains. Une Église finalement plurielle, qui s’oppose à tout type de personnalisme, obstacle au dialogue.
Constitution d’une Commission de rédaction de la Lettre du Synode aux jeunes
Enfin, comme l’espéraient plusieurs participants au Synode, une Commission a été constituée, afin de rédiger une lettre de la part de l’Assemblée pour tous les jeunes du monde. La Commission est formée de cinq Pères synodaux : card. Dieudonné Nzapalainga, archevêque de Bangui (Centrafrique), Mgr Emmanuel Gobillard, évêque auxiliaire de Lyon (France), Mgr Anthony Colin Fisher, archevêque de Sydney (Australie), Mgr Eduardo Horacio García, évêque de San Justo (Argentine) , deux jeunes auditeurs : Briana Regina Santiago, des Apôtres de la Vie Intérieure (États-Unis) et Anastasia Indrawan, membre de la Commission pour les jeunes de la Conférence épiscopale d’Indonésie ; un expert : don Michele Falabretti, responsable du Service nationale pour la Pastorale des jeunes de la Conférence Épiscopale Italienne ; et l’envoyé spécial du Synode, frère Aloïs, prieur de la Communauté œcuménique de Taizé. Dès qu’il sera prêt, le brouillon de cette Lettre sera présenté en Salle du Synode.
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