Cardinal Stella: «prier pour le Pape est un devoir, une nécessité du cœur»
Entretien réalisé par Manuella Affejee- Cité du Vatican
Le Pape célèbre ce mardi 17 décembre son 83e anniversaire, quelques jours après avoir fêté son jubilé d'or de sacerdoce (50 ans de prêtrise).
À l’occasion de ce double anniversaire, de nombreuses initiatives de prières ont été lancées dans le monde entier, à commencer par le diocèse de Rome, dont le Souverain Pontife est l’évêque, afin que le Seigneur lui donne force et courage et le soutienne dans le ministère qui lui a été confié.
Les catholiques sont appelés, régulièrement, à prier pour le «Serviteur des serviteurs de Dieu», a fortiori dans les moments d’épreuves et de tribulations.
Le cardinal Beniamino Stella, préfet de la Congrégation pour le Clergé, revient sur ce devoir filial qui incombe à tous les fidèles:
Depuis le premier jour de son élection, le Pape François n’a de cesse d’appeler les fidèles à prier pour lui. Pourquoi cette insistance ?
Ce n’est pas un caprice du Pape. Je crois qu’il le perçoit comme un devoir, comme quelque chose dont il a besoin pour sa vie personnelle: sentir que le peuple de Dieu est proche de lui, et c’est une proximité spirituelle qui s’exprime surtout dans la prière. C’est le peuple de Dieu qui accompagne le chemin de son pasteur dans la prière. Il nous l’a dit dès le début, dès le soir de son élection (le 13 mars 2013, ndlr), quand il s’est incliné pour recevoir la bénédiction de son peuple. C’était un moment de prière dans lequel il nous a dit : «j’ai besoin de vous, accompagnez-moi dans la prière, car sans elle, sans la présence et l’aide de Dieu dans ma vie, je ne peux pas être votre pasteur».
En septembre dernier, aux jésuites mozambicains et malgaches, le Pape François a dit : «seule la prière de son peuple peut libérer le Pape». Selon vous, que veulent dire ces paroles ?
C’est un mot un peu mystérieux que le Pape a employé. On peut se demander: libérer de quoi? libérer de qui? Ces dernières années, il a senti fortement la présence des forces du mal, l’assaut des forces du mal. Il doit être préoccupé parfois par ces forces, par l’insistance dans la méchanceté de beaucoup de gens qui ne l’aiment pas, qui n’acceptent pas son message. Nous tous, nous devons être conscients de cette nécessité d’être libérés du mal, nous le disons d’ailleurs dans la prière du Notre Père: «délivre-nous du mal». Mais dans le cas du pape, je crois qu’il y a quelque chose de personnel, parce que la souffrance l’accompagne. En certains moments de son parcours spirituel, il doit sentir qu’il a besoin de Dieu, de sa présence, afin qu’Il le libère des forces du mal qui lui enlèvent parfois le sourire, le calme intérieur, la paix de l’esprit.
Qu’est-ce que notre prière peut apporter au Pape?
Je voudrais demander à Dieu qu’Il lui apporte la consolation. C’est un mot que j’emploie souvent: être consolé par le pardon de Dieu, par la miséricorde de Dieu, sa bienveillance, sa présence. Être certain que, dans un parcours difficile de son pontificat, Dieu est à ses côtés. Ensuite, demander au Seigneur que, dans le discernement des situations parfois difficiles, il choisisse les voies de Dieu et de l’Évangile. Il faut demander pour le Pape ce discernement spirituel dans toutes les difficultés, parfois, de sa relation avec les pasteurs et les collaborateurs de la Curie romaine. Qu’il puisse choisir les mots, les gestes qui l’aident à créer une relation personnelle de charité, d’amitié, d’entraide, entre lui, le Pape et ses brebis, nous, qui sommes ses collaborateurs.
Diriez-vous que prier pour le Pape est un devoir pour chaque catholique ?
Certainement, c’est un devoir comme nous le faisons pour nos parents. C’est un devoir mais surtout une nécessité du cœur. C’est quelque chose qui doit venir de l’intérieur de nous-mêmes, que l’Esprit-Saint doit mettre dans notre cœur, notre bouche, dans notre tête. Car la prière doit venir de l’intérieur. C’est une nécessité de se mettre devant celui que nous considérons comme le rocher de notre foi, pour le soutenir, l’accompagner, lui donner confiance sur le chemin de l’Église qui est parfois très dur et même obscur.
Le Pape fête son anniversaire de naissance et celui de son sacerdoce à quelques jours d’intervalle. Avant d’être Pape, d’être cardinal ou évêque, il est prêtre de Jésus-Christ. Selon vous, quels sont les piliers de sa vie sacerdotale et que voudrait-il laisser en héritage aux prêtres du monde entier?
Le pilier principal de sa vie sacerdotale, c’est justement l’exercice de la prière et le contact quotidien avec la Parole de Dieu. C’est un Pape qui prie, qui dévoue du temps de sa journée à la prière, à l’Eucharistie. Si vous le voyez quand il célèbre la messe, sa dévotion personnelle, comment il est concentré sur les mystères qu’il célèbre… Je dirais donc que le pilier principal de sa vie est l’Eucharistie et la vie personnelle de prière. Ensuite, ce qu’il voudrait nous confier comme héritage, c’est cette proximité du prêtre avec les fidèles: il faut que le prêtre soit parmi son peuple. Et pour cela, il faut être courageux. Parfois, nous aimons rester dans nos sacristies, dans le «temple», mais aujourd’hui, nous devons chercher le peuple de Dieu là où il se est, sortir de nous-mêmes, de nos habitudes. C’est un message que le Pape nous répète: le pasteur est en chemin, donc là où le peuple se trouve et chemine dans sa vie quotidienne.
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