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Prédication de l'Avent dans la chapelle Redemptoris Mater Prédication de l'Avent dans la chapelle Redemptoris Mater 

Père Cantalamessa: avec le Magnificat, Marie nous exhorte à imiter Dieu

Deuxième méditation de l’Avent du père Raniero Cantalamessa, ce vendredi 13 décembre 2019, devant le Pape François et ses principaux collaborateurs de la curie romaine, réunis dans la chapelle Redemptoris Mater du Palais apostolique. Le capucin a proposé une longue réflexion sur la Visitation de Marie à Élisabeth et notamment sur le Magnificat.

Les cantiques des Saintes Écritures, et particulièrement ceux contenus dans l’Évangile de l’enfance (Saint Luc), donnent aux événements une signification spirituelle, en révèlent le sens caché. Ainsi, le Magnificat de la Vierge, le Benedictus de Zacharie ou le Nunc Dimittis du vieillard Siméon «nous offrent un embryon de la liturgie de Noël», et de fait «réalisent l’essentiel de toute liturgie: être une célébration festive de la foi dans l’événement du Salut».

Ces hymnes de louange sont «Parole de Dieu», inspirées par l’Esprit Saint. Le Magnificat est de Marie, mais c’est bel et bien l’Esprit qui parle en elle; à travers ce chant, la jeune fille de Nazareth porte un nouveau regard sur Dieu et sur le monde.

Un nouveau regard sur Dieu

«Mon âme exalte le Seigneur, exulte mon esprit en Dieu mon sauveur», s’exclame Marie devant sa cousine. Le premier mouvement du Magnificat est pour le Seigneur, qui a l’absolue primauté. La Vierge «rassemble son âme et se perd dans l’infini de Dieu», dont elle célèbre à la fois la grandeur, la majesté, Lui l’Adonaï, le Puissant, le Saint et aussi la bonté, la miséricorde, car Il s’est penché sur la petitesse de sa servante. «Marie se sent regardée par Dieu, elle entre dans ce regard et se voit comme Dieu la voit» ; elle sait que son élection n’est pas due «à son humilité, mais à la grâce gratuite de Dieu». De là son exultation, cette louange pure, cette plénitude de joie. «C’est la jubilation de la créature qui se sent aimée de son créateur».

Un nouveau regard sur le monde

Vient ensuite la seconde partie du Magnificat. Comme l’explique le père Cantalamessa, «Marie, après avoir exulté en Dieu, tourne son regard pénétrant sur la scène du monde et les événements qui s’y pas­sent». Elle commence ainsi à «décrire un renversement et un changement radical des situations humaines: il a renversé, il a élevé; il a comblé, il a renvoyé les mains vides». L’Histoire ne retient pourtant de cette époque aucun changement de ce type, aucun bouleversement social. Or, ce renversement proclamé par Marie, et repris par Jésus dans les Béatitudes, s’est bel et bien produit, «dans la foi». «Le Royaume de Dieu s’est manifesté et c’est ce qui a provoqué une révolution silencieuse mais radicale».

Le Magnificat, école d’évangélisation

Marie est «figure de l’Église», son modèle, comme l’affirmait Saint Irénée. Et le prédicateur de la Maison Pontificale de préciser: «Il ne s’agit pas de l’Église nominale, mais de l’Église réelle, autrement dit non d’une Église abstraction, mais de l’Église concrète, des per­sonnes et des âmes qui composent l’Église. Il ne suffit pas de réciter le Magnificat, il faut le vivre, à chacun de nous de le faire sien ; c’est “notre” cantique. Quand nous disons : “mon âme exalte le Seigneur”, ce “mon” est à prendre au sens propre et non comme une référence».

Le Magnificat rappelle aussi à l’Église sa mission prophétique, évangélisatrice, celle d’annoncer au monde ce renversement radical, et toujours d’actualité, opéré par Dieu. Lorsqu’elle chante avec Marie que «Dieu a renversé les puissants et élevé les humbles», elle vit et met en acte le cantique. Car «la proclamation de foi de ce que Dieu a fait dans l’histoire du salut devient la meil­leure indication de ce que l’homme doit faire, à son tour, dans sa propre histoire d’homme, et, de même, de ce que l’Église a, elle aussi, le devoir de faire, en vertu de la charité qu’elle doit porter même au riche pour son salut».

Nous voyons que dans le Magnificat, «Marie parle en prophète pour l’Église» ; il justifie donc le titre d’“Étoile de l’évangélisation”, conféré à la Vierge par saint Paul VI.

Le Magnificat, école de conversion

Il ne s’agit pas seulement de prêcher quelque chose, mais de le mettre en pratique, souligne encore le père Cantalamessa; «Marie peut proclamer la béatitude des humbles et des pauvres, parce qu’elle en fait partie. Le renversement dont elle parle doit se produire avant tout au creux du cœur de ceux qui reprennent le Magnificat pour prier».

Car enfin, «l’homme qui vit “pour lui- même”, qui n’a pas Dieu pour Seigneur, mais son propre “je”, s’est construit un trône où il siège en dictant des règles pour les autres. Or Marie nous dit que Dieu renverse ces gens-là de leur trône; il met à nu leur contre-vérité et leur injustice».

Le Magnificat nous rappelle, in fine, à notre cohérence de chrétien, au témoignage évangélique que nous devons donner: «quelles ne seraient pas ma sottise et mon incohérence si, chaque jour, à l’heure de Vêpres, je répétais avec Marie que Dieu “a renversé les puissants de leur trône” et qu’en même temps je ne cessais pas de convoiter le pouvoir, un poste plus élevé, une promotion humaine, un avancement dans ma carrière, et que je perde la paix si cela tardait à se produire; si, chaque jour, avec Marie, je proclamais que Dieu “a renvoyé les riches les mains vides” et qu’en même temps je n’avais de cesse de m’enrichir et de posséder toujours plus de choses et des choses toujours plus raffinées (…) Quelle ne serait pas ma stupidité si je continuais à répéter, avec Marie, que Dieu “regarde les humbles”, qu’il marche à leurs côtés, tandis qu’il tient à distance les superbes et les richissimes, et qu’ensuite je sois de ceux qui font tout le contraire».

En définitive, Marie nous exhorte à imiter Dieu en choisissant ce qu’Il choisit. En ce sens, le Magnificat est «est une merveilleuse école de sagesse évangélique, une école de conversion continuelle». 

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13 décembre 2019, 12:28