Cardinal Parolin : ne transformez pas la Méditerranée en cimetière
Alessandro Di Bussolo - Cité du Vatican
«La citoyenneté est le mot clé pour favoriser le processus d'intégration de ceux qui débarquent sur nos côtes et éviter la ghettoïsation», a déclaré le secrétaire d'État du Vatican, le cardinal Pietro Parolin, s'entretenant avec le Premier ministre italien Giuseppe Conte lors de la présentation de deux volumes de La Civiltà Cattolica, Être méditerranéens (Titre original en italien : Essere mediterranei) et Fraternité (Titre original en italien : Fratellanza), publiés par les éditions Ancora, dans la revue des Jésuites. Une rencontre qui s'est tenue samedi 1er février au siège de la revue jésuite.
Elle était organisée un an après la signature, à Abou Dhabi, du document historique sur la fraternité humaine pour la paix mondiale et la coexistence commune, par le pape François et le cheikh Ahmad al-Tayeb, grand imam d'Al-Azhar, le 4 février 2019. Ce document, «nous a fait comprendre, entre autres, comment le concept de "fraternité" nous amène à réfléchir sur celui de "citoyenneté", avec la signification de l'égalité des droits et des devoirs pour tous», a rappelé le directeur de La Civiltà Cattolica, le père Antonio Spadaro.
À propos des réfugiés, l’Europe peu active
Dans les récents débats, le cardinal Parolin a précisé que «la contribution des migrants au développement des pays de destination du Nord de la Méditerranée n'a pas été pleinement reconnue» : la ligne, également juridique, à poursuivre est celle de la «citoyenneté», «également pour ceux qui débarquent sur nos côtes européennes». Sur la question des migrants, poursuit le secrétaire d'État du Saint-Siège, l’«Europe est peu consciente et peu active», avant d’ajouter que «le scepticisme de certains pays de l'Union européenne risque d'ouvrir de nouvelles divisions».
Le cardinal a ouvert son discours en rappelant le rendez-vous organisé du 19 au 23 février à Bari par la Conférence épiscopale italienne «Méditerranée, frontière de la paix», qui sera conclu par le pape François. La Méditerranée, a t-il souligné «est un lieu de rencontre et parfois d'affrontement entre les peuples et les cultures de trois continents et des trois grandes religions monothéistes. Il est nécessaire de donner une voix aux attentes et aux espoirs de tous les peuples. Personne n'est exclu». Un lieu, a t-il ajouté, «qui génère des valeurs, de la culture et de la pensée, malgré les différences et les conflits».
S'occuper les uns des autres
Le pape François parle de fraternité depuis sa présentation au peuple de Dieu le jour de l'élection, a encore rappelé le cardinal Parolin, estimant qu'il fallait faire preuve d'«attention aux migrants». Son premier voyage hors du Vatican était en effet au cœur de la Méditerranée, à Lampedusa, le 8 juillet 2013, où il a demandé, comme Dieu l'a demandé à Caïn : «Où est ton frère» ? «Nous ne sommes plus capables de nous occuper les uns des autres», s'est plaint le cardinal Parolin, ajoutant que «si la perspective est celle de Caïn, la Méditerranée ne peut que se transformer en un grand cimetière».
1283 personnes sont mortes en tentant de traverser la mer Méditerranée en 2019, selon l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), rattachée à l'ONU. Un nombre presque divisé par deux par rapport à 2018, sur un total de 110 700 migrants qui ont emprunté cette voie maritime. Au total, 19 164 personnes sont mortes dans la Méditerranée depuis 2014, rappelle l'OIM.
Non aux solutions nationales en matière de migration
De son côté, Giuseppe Conte, président du Conseil des ministres italien, a souligné que «les solutions nationales, ou pire encore, nationalistes, n'ont aucune chance de succès. Au contraire, la migration nécessite une approche européenne et internationale à plusieurs niveaux, fondée sur les principes de solidarité et de responsabilité partagée».
Un autre outil précieux, a rappelé le Premier ministre, «est celui des couloirs humanitaires, organisés avec des organisations de la société civile d'inspiration religieuse», «Ce sont des expériences que nous considérons comme centrales» et pour cette raison «nous continuons à inviter les autres États membres de l'Union européenne à y répondre» a t-il souligné.
Sur la crise au Moyen-Orient, et le conflit israélo-palestinien en particulier, le cardinal Parolin et le chef du gouvernement italien se sont une nouvelle fois prononcés pour une solution à deux Etats, «la seule qui puisse mettre un terme au conflit israélo-palestinien». Une solution qui, pour le Secrétaire d'Etat du Saint-Siège, «doit trouver un nouvel élan dans la communauté internationale». Deux États et deux peuples, a répété le Premier ministre Conte, «cela reste la perspective la plus juste et la plus durable, en tenant compte des aspirations légitimes des deux parties et en contribuant à la stabilité et à la sécurité de toute la région du Moyen-Orient».
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