Le Prix Ratzinger 2020 attribué à Jean-Luc Marion et Tracey Rowland
C’est à un Français, le philosophe et théologien Jean-Luc Marion, et à une Australienne, l’enseignante Tracey Rowland, que revient cette année la prestigieuse récompense, laquelle vise à encourager la recherche théologique dans la lignée de l’enseignement du Pape émérite Benoît XVI, mais aussi, plus largement, toute recherche académique inspirée par l’Évangile.
Les lauréats ont été choisis après qu’une liste de noms a été présentée au Pape François par un comité scientifique constitué de cinq membres: les cardinaux Angelo Amato, Kurt Koch, Gianfranco Ravasi et Luis Ladaria, et l’évêque de Regensburg, Mgr Rudolf Voderholzer.
Après Rémi Brague (2012) et Anne-Marie Pelletier (2014), c’est la troisième fois qu’un Français reçoit le Prix Ratzinger.
Spécialiste de la phénoménologie de l’amour et du don
Jean-Luc Marion, né à Paris en 1946, est philosophe et théologien. Cet ancien élève de l'École normale supérieure a étudié auprès de Louis Althusser et de Jacques Derrida avant de devenir assistant de Ferdinand Alquié, puis professer de métaphysique en 1981.
La réflexion de Jean-Luc Marion s'est développée autour de deux directions fondamentales, celle de l'histoire de la philosophie et celle de la phénoménologie. Dans l'histoire de la philosophie, ses contributions sur Descartes et l'histoire de la métaphysique sont fondamentales. Mais c'est dans la phénoménologie que l’on trouve l'apport principal de Jean-Luc Marion, dans ce courant de la phénoménologie française où Lévinas, Ricoeur et Derrida, ont été les premiers à s'engager. Dans le sillage de Lévinas, il tente de montrer que la question de l'être, bien que centrale dans l'histoire de la métaphysique, n'est pas fondamentale, et qu'elle doit être dépassée dans un double mouvement, d'une part dans un sens horizontal par l'éthique entendue comme amour et don, et d'autre part, dans un sens vertical, comme transcendance théologique.
Jean-Luc Marion aborde la phénoménologie à partir de l'acte de don et de donation, et développe le concept de “phénomène saturé”: la saturation du concept, une surabondance de sens présente dans le phénomène, qu'il applique ensuite également à la philosophie et à l'histoire de l'art. Sur cette base, Marion a développé une phénoménologie de l'amour et de l'être comme don, qui trouve son expression la plus complète dans son œuvre: Étant donné. Essai d'une phénoménologie de la donation. Jean-Luc Marion est membre de l’Académie française depuis 2008, auteur de nombreuses publications et directeur de plusieurs publications. Il a été membre du Conseil pontifical pour la culture. Il collabore régulièrement avec le magazine international Communio.
Familière de la théologie de Benoît XVI
Née le 7 juillet 1963 en Australie, Tracey Rowland a étudié le droit puis la philosophie et la philosophie politique aux universités du Queensland et de Melbourne. Elle a obtenu son doctorat à l'université de Cambridge sur le thème des relations entre la théologie du XXe siècle et l'idée de culture, en se référant notamment à la philosophie d'Alasdair MacIntyre et à la théologie d'Henri De Lubac et de Joseph Ratzinger. De 2001 à 2017, elle a été doyenne de l'Institut Jean-Paul II pour le mariage et la famille à Melbourne. Pendant la même période, elle a obtenu sa licence et son doctorat en théologie à l'Université du Latran, à Rome. Elle est actuellement titulaire de la chaire de recherche Saint Jean-Paul II en théologie à l'université Notre Dame d'Australie. Parmi ses principaux ouvrages, deux sont consacrés à la pensée de Joseph Ratzinger et traduits en plusieurs langues: La foi de Ratzinger. La théologie de Benoît XVI(2008) et Benoît XVI. Un guide pour les perplexes (2017). Tracey Rowland a publié plus de 150 articles. Elle est membre du conseil de rédaction de la revue internationale Communio. Ses activités d'enseignement et de recherche explorent différents domaines de la théologie, en particulier la théologie fondamentale, l'anthropologie théologique et l'œcuménisme. Elle est membre de la Commission théologique internationale depuis 2014.
Remise des prix et symposium international
Les deux lauréats recevront leur prix le 14 novembre prochain au Vatican, des mains du Pape François. «Espérons que la cérémonie puisse se dérouler malgré la pandémie, a déclaré le père Federico Lombardi. Si jamais elle devait être annulée pour cas de force majeure, […] les vainqueurs seraient invités à participer et à recevoir leur diplôme en même temps que les vainqueurs de l’année 2021», a-t-il expliqué.
Cette dixième édition du Prix Ratzinger porte le nombre de lauréats à 22 personnes, de 15 pays différents et des cinq continents.
Le père Lombardi a également évoqué le IXe Symposium international d’étude promu par la Fondation Ratzinger. Cette édition avait été prévu initialement à Beyrouth, pour marquer les dix ans du Synode spécial sur le Moyen-Orient appelé par Benoît XVI, réfléchir sur la situation de l'Église et des chrétiens dans la région, sur le dialogue avec l'Islam et l'engagement pour la paix, à la lumière de l'enseignement et des initiatives des derniers Papes - Jean-Paul II, Benoît XVI, François. Il s’agissait également de manifester une solidarité avec des peuples et des communautés religieuses en situation très difficile.
«Malheureusement, le déclenchement de la pandémie a rendu impossible la poursuite des préparatifs. À cela s'ajoutent la situation véritablement critique au Liban et le désastre de l'explosion dans le port de Beyrouth. Nous sommes très attristés par cette situation», a expliqué le père Lombardi.
La Fondation commence donc à travailler sur l’organisation du Symposium international de 2021, prévu dans une université catholique des États-Unis. «Nous espérons que la pandémie ou d'autres difficultés ne nous empêcheront pas de mener à bien ce beau projet», a conclu le président de la Fondation Joseph Ratzinger-Benoît XVI.
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