Cardinal Hollerich: il faut montrer que la vie des personnes âgées a un sens
Elvira Ragosta et Adelaide Patrignani – Cité du Vatican
C’est une classe d’âge vulnérable mais précieuse, en particulier vis-à-vis des jeunes pour lesquels elles sont source de sagesse et d’espoir. Le contexte actuel – pandémie ravageuse pour les plus âgées, vieillissement de la population, délitement des liens intergénérationnels – pose toutefois de nombreux défis quant à leur bonne intégration dans la société. Des estimations récentes précisent que la part des personnes âgées dans la population de l'Union européenne au cours des prochaines décennies augmentera fortement: les plus de 65 ans, qui représentent aujourd'hui 20 % de la population, en formeront 30 % en 2070 ; les plus de 80 ans devraient plus que doubler au cours de la même période, pour atteindre 13 % de la population en 2070. Les prévisions indiquent également que le nombre de personnes pouvant avoir besoin de soins de longue durée passera de 19,5 millions en 2016 à 23,6 millions en 2030 et 30,5 millions en 2050.
Ces évolutions auront des répercussions sur les choix à faire dans le domaine de la santé, de l’économie, du travail ou dans d’autres secteurs.
Dès aujourd’hui, des réflexions sont menées, à l’instar du webinaire proposé ce lundi par la Comece et la Fafce. Un document de fond avait également été publié sur le sujet “Les personnes âgées et le futur de l’Europe” le 3 décembre dernier, par ces deux mêmes organismes.
Le cardinal Jean-Claude Hollerich, archevêque de Luxembourg et Président de la Comece, conclura cette réunion en ligne. Mais déjà, il nous fait part de son point de vue concernant la place des générations les plus anciennes du “vieux continent”.
Il s’agit tout d’abord de valoriser les gens âgés, parce que sans la valorisation, alors la protection, etc., tout cela ne fonctionne pas. Nous devons peut-être changer notre concept de beauté, auquel appartient une beauté presque clinique, une beauté de la jeunesse. Mais il y a aussi une beauté de la vieillesse, la beauté du réel, de ce qui est humain, et nous devons avoir une conversion de nos yeux pour voir les gens âgés de manière différente.
Nous devons sortir de l’utilité économique pour voir la dignité de chaque personne humaine, qu’elle soit dans le processus économique ou pas. La dignité que chaque personne humaine possède. Notre Pape nous parle souvent de la périphérie. Aujourd’hui en Europe, ce sont les vieilles personnes qui sont la périphérie, ils ne sont plus le centre des préoccupations. Comme notre Pape nous le dit souvent, il faut avoir des changements qui viennent de la périphérie pour que le centre lui-même soit plus sain, puisse mieux réagir à des crises futures.
La pandémie a mis en relief la vulnérabilité des personnes âgées qui face aux crises sont les plus menacées, notamment en terme de choix sanitaires. Quel regard portez-vous sur les choix qui ont été faits depuis le début de la crise, notamment au niveau institutionnel et communautaire? Qu’est-ce que cela dit de notre société?
Je ne veux pas critiquer les institutions, les hommes et les femmes politiques, car ils ont dû réagir vite, et ils ont réagi de la manière la plus simple: on isole les gens âgés pour les protéger. Mais je pense qu’entre temps, il faut changer d’approche, car il y a des possibilités pour la protection qui ne passent pas par l’isolement. Il y a les tests qui produisent un résultat quasi immédiat en très peu de temps. L’emploi plus massif de ces tests pourrait permettre aux gens âgés de sortir de leur isolement.
Quand on téléphone à des personnes âgées et quand on entend les cris de leur solitude, c’est terrible. Il y a quelque chose qui ne marche plus. Il faut maintenant, je pense, changer de cap, pour montrer que la vie des gens âgés a un sens, que nous avons besoin d’eux, que les jeunes ont besoin des personnes âgées. La génération des parents est celle qui a l’autorité. Les grands-pères et les grands-mères sont ceux qui peuvent aimer sans cette autorité. Leur autorité est celle de l’expérience et de l’amour. Voilà pourquoi il faut partir de cette périphérie des gens âgés pour concevoir notre société d’une manière différente. Notre Pape nous montre le chemin.
Merci d'avoir lu cet article. Si vous souhaitez rester informé, inscrivez-vous à la lettre d’information en cliquant ici