Antiquum ministerium : «C'est la réalité de l'Église qui est reconnue»
Marine Henriot – Cité du Vatican
«Il est nécessaire de reconnaître la présence de laïcs, hommes et femmes, qui, en vertu de leur baptême, se sentent appelés à collaborer au service de la catéchèse», écrit le Pape François dans le Motu proprio “Antiquum ministerium”, rendu public ce mardi 11 mai. Décryptage avec Joël Molinario, directeur de l’Institut Supérieur de Pastorale Catéchétique (ISPC).
Sur le terrain, que peut apporter la mise en place de la reconnaissance des catéchistes par ce Motu proprio ?
Le mot important ici est le mot «reconnaissance», l’insistance du Pape dans ce Motu proprio est bien de dire ce que fait l’Église depuis des années. D’une certaine manière, le Motu proprio reconnaît cet état de fait. C’est la réalité de l’Église qui est reconnue. Car comme le dit le texte, une multitude de laïcs, hommes et femmes, sont engagés dans l’annonce de l’Évangile depuis des centaines et des centaines d’années, et notamment depuis le XXe siècle dans l’Église. La première chose, c’est la reconnaissance d’un état de fait. Il y a beaucoup de femmes et d’hommes engagés dans cette mission.
La deuxième chose, puisqu’on reconnaît que ce ministère de catéchiste existe bel et bien, il s’agit d’une étape nouvelle dans le fait que la catéchèse n’est pas pour l’Église une activité spécifique de quelques personnes bénévoles, mais c’est la responsabilité de l’ensemble de l’Église de catéchiser, qui est d’annoncer l’Évangile, de faire résonner la parole de Dieu. Avec ce Motu proprio, l’Église s’engage dans la reconnaissance de cet apostolat laïc, cela veut dire que c’est toute l’Église qui est dans ce mouvement d’instituer un ministère de catéchiste.
Dans nos sociétés occidentales, il peut arriver que les catéchistes ne se sentent pas reconnus à leur juste valeur, manquent de visibilité… En quoi la mise en place d’un réel mandat peut les aider ?
Il va y avoir une question de discernement de la part de l’évêque, qui instituera dans son diocèse des catéchistes, car notamment en France et dans nos sociétés occidentales, nous utilisons le mot "catéchiste" pour beaucoup de réalités très différentes. La personne qui vient faire la catéchèse est catéchiste, la personne responsable de la catéchèse est aussi catéchiste, l’évêque est également catéchiste… Cela va donc être une affaire de discernement : à quel niveau l’évêque va reconnaître la responsabilité d’un ministère de catéchiste. Une grande variété, révélatrice du besoin de formation.
Dès les années 50, l'historien Joseph Colomb notait le besoin fondamental de formation pour les catéchistes d’aujourd’hui, car il y a un mouvement de masse en train de se faire dans les Églises, des laïcs de plus en plus nombreux prennent des responsabilités dans les catéchèses. Donc il faut adapter les formations à la diversité de ce public. Ce n’est pas la même chose d’aider un père ou une mère de famille qui fait le caté que d’aider la responsable paroissiale ou le responsable diocésain. Ce ministère de catéchiste va revaloriser l’ensemble des personnes qui sont acteurs de la catéchèse.
Le manque de formation est, en effet, pointé du doigt depuis des dizaines d’années, une nouvelle fois en 2015 par le Service National de la Catéchèse et du Catéchuménat (SNCC)… Ce Motu proprio est-il une réponse au manque de formation ?
Dans le Motu proprio, il est bien dit que l’évêque devra avoir une responsabilité pour un parcours de formation adapté pour ses futurs ministres de la catéchèse. Il va falloir évidemment associer ce ministère de la catéchèse à un parcours de formation. Certains parcours de formation existent déjà, à l’ISPC, c’est notre travail depuis 70 ans, mais il va falloir en inventer, en adapter d’autres…
Vous avez vu des catéchistes dans le monde entier accomplir leur mission, selon vous, de quels exemples les pays occidentaux pourraient-ils s’inspirer?
L’idée de ministre de la catéchèse vient des Églises africaines. Elles ont été pionnières depuis un siècle. Par exemple, au Burkina Faso, la titularisation des catéchistes a été instaurée en 1920. À l’époque, il s'agissait de couples, hommes et femmes, qui recevaient une formation pendant deux ans, et après ils devenaient responsables de la catèchèse, de l’animation paroissiale dans un village… Une sorte de "couple-curé" qui avait la responsabilité catéchétique. Tous les historiens du Burkina Faso et d’autres pays d’Afrique occidentale estiment que l’essentiel de l’évangélisation est fait par les catéchistes titulaires.
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