OSCE: le plaidoyer du Saint-Siège contre la traite humaine
Lundi, Mgr Urbańczyk a donc tout d'abord analysé les racines profondes de ce trafic, identifiant deux «facteurs clés, tous deux tragiques»: la pauvreté, avec le chômage et le manque d'opportunités qui en découlent, et «un système économique préoccupé uniquement par la maximisation du profit, qui sert la cupidité de quelques-uns plutôt que le développement digne de toute l'humanité». En dépit du fait que «96% des États ont adopté une législation pour lutter contre la traite des êtres humains», celle-ci «continue néanmoins à se développer et à réduire des personnes en esclavage», «encore plus pendant la pandémie actuelle» de Covid-19.
Ainsi, dans le sillage de ce que le Pape François a souvent répété, Mgr Urbańczyk a dénoncé les distorsions du «capitalisme néolibéral» et la «dérégulation des marchés visant à maximiser les profits sans limites éthiques, sociales et environnementales», et dans lequel «les personnes sont des numéros, à exploiter». Au contraire, a conclu le prélat, ce qu'il faut «c'est une économie qui promeut la justice, et non des intérêts particuliers exclusifs».
Les travailleurs informels, cibles faciles des réseaux criminels
Le 15 juin, l'Observateur permanent a axé son discours sur le lien entre la traite des êtres humains et le monde du travail. La crise sanitaire liée au coronavirus, a-t-il dit, «a fortement touché» le secteur de l'emploi, en particulier «les personnes les plus faibles, les plus fragiles, les moins protégées» qui ont vu leurs droits de plus en plus bafoués. Cela a entraîné une augmentation du trafic, car les travailleurs informels «ont été les premiers à voir leurs moyens de subsistance disparaître» et restent sans «filets de sécurité sociale, tels que les allocations de chômage et les soins de santé». «Poussées par le désespoir», de nombreuses personnes sont donc tombées dans les mailles du crime et du trafic.
L’Église catholique n'est pas restée en marge, a souligné le représentant du Saint-Siège: «Dans diverses parties du monde, les communautés catholiques locales ont donné refuge et aide à beaucoup de ces personnes, souvent trompées, arrachées à leurs terres, exploitées et abandonnées, puis incapables de retourner dans leur pays par manque de documents ou à cause d'interdictions». Mais tout cela ne suffit pas, a expliqué Mgr Urbańczyk, car la pandémie a non seulement «un impact immédiat» sur l'économie et la société, mais aussi «un impact à long terme», qui «aggravera avec le temps les causes profondes de la traite des êtres humains».
En effet, selon la Banque mondiale, on estime que la propagation du Covid-19 «a fait basculer 88 à 115 millions de personnes supplémentaires dans l'extrême pauvreté en 2020, le total atteignant 150 millions en 2021». C'est pourquoi l'observateur permanent a exhorté à promouvoir «des politiques capables de garantir le travail pour tous, dans le respect des droits de l'homme», afin que «les gens puissent voir leur dignité et leur reconnaissance sociale renforcées».
Lutter contre le fléau de l’exploitation sexuelle
Toujours le 15 juin, Mgr Urbańczyk a analysé un autre phénomène dramatique lié au trafic, à savoir l'exploitation sexuelle, un authentique «fléau qui fait des victimes dans tous les coins de la terre, chaque jour», et contre lequel «nous ne pouvons plus reporter les mesures capables de l'éradiquer». À l'origine, a expliqué le prélat, il y a «un manque de culture qui dégrade le corps de l'autre, principalement celui des femmes et de plus en plus celui des enfants, en en faisant un objet utilisable et en refusant la dignité humaine à ceux qui sont considérés comme inférieurs», également à travers «un langage qui humilie les personnes, confond les situations, minimise le problème et suscite une demande qui alimente une chaîne économico-criminelle».
Afin de contrer cette banalisation de la prostitution, l'Observateur permanent a indiqué deux voies possibles: d'une part, celle de «promouvoir une culture du respect et de la dignité, accompagnée d'une sensibilisation et d'une formation constantes»; d'autre part, celle d'une «législation de plus en plus rigoureuse pour réprimer l'exploitation sexuelle et promouvoir des instruments de protection pouvant soutenir les victimes». Dans ce contexte, le contrôle capillaire des «transactions monétaires» devient central également parce que, «grâce à l'ingéniosité et à la force économico-financière du crime», le trafic a impliqué le monde du web. Dans ce domaine également, il est urgent d'agir, a fait remarquer Mgr Urbańczyk, afin qu'Internet et les réseaux sociaux «favorisent la dignité de la personne humaine et ne deviennent pas un moyen qui alimente la violation des droits de l'homme».
Là encore, le prélat a rappelé l'engagement de longue date de l'Église catholique en faveur de la protection des victimes de l'exploitation sexuelle, ainsi que de l'éducation des personnes «afin que les stéréotypes véhiculés par la société puissent être dépassés». Ce sont «de petites gouttes dans un océan», a conclu le représentant du Saint-Siège, mais elles peuvent produire des exemples vertueux à diffuser dans la société civile, afin de «rendre plus efficace la lutte contre la demande qui alimente la traite des êtres humains».
Renforcer la coopération multilatérale
Hier, enfin, lors de la séance de clôture de la Conférence, le prélat a exigé de trouver de toute urgence «le courage et la volonté de changer les défauts de notre système économique», «de renouveler les réglementations et les instruments capables d'avoir une vision plus large», en investissant «plus que jamais dans les personnes plutôt que dans les profits», en limitant «la concentration du pouvoir et des richesses dans les mains de quelques-uns, et en renforçant la coopération multi et bilatérale qui prévient la violence et les conflits».
Vatican News Service - IP
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