À Marseille, le plaidoyer de Mgr Gallagher pour la paix au Proche-Orient
Delphine Allaire – Cité du Vatican
Il n’avait pu faire partie de la délégation pontificale aux Rencontres méditerranéennes organisées à Marseille à la fin de l’été en raison de la 78e assemblée générale de l’ONU à New York. Mgr Gallagher est venu honorer la traditionnelle octave de la Chandeleur vendredi 2 février dans la cité phocéenne, invité par le cardinal Jean-Marc Aveline.
Après avoir embarqué dès l’aurore dans la procession, pris part à la messe, et bénit les traditionnelles navettes, le secrétaire du Saint-Siège pour les relations avec les États a livré un aperçu de la situation internationale actuelle depuis la basilique Notre-Dame de la Garde devant des représentants des communautés orientales, de prêtres et diacres et des responsables des services diocésains, mais aussi du corps consulaire. La cité phocéenne est la ville de France qui compte le plus grand nombre de consulats, signe d’un passé et d’un présent riche d’échanges extérieurs.
Les théâtres de guerre scrutés à Rome
Le diplomate a exposé la situation internationale actuelle et des finalités et objectifs principaux de la diplomatie du Saint-Siège, avant de se livrer à une session de questions-réponses avec l’auditoire. Du choc ressenti devant l’attaque du 7 octobre à la gravité de la situation humanitaire à Gaza suite à la riposte militaire israélienne, Mgr Gallagher a réitéré la position vaticane maintes fois exprimée par le Pape: cessez-le-feu sur tous les fronts, libération immédiate des otages, respect du droit humanitaire, solution à deux États «unique voie de résolution à ce conflit qui n’en finit pas, afin qu’Israéliens et Palestiniens puissent enfin vivre dans la paix et la sécurité».
Dans ce Moyen-Orient déchiré, le représentant du Vatican a évoqué les souffrances des peuples irakien et syrien, et les millions de réfugiés syriens qui se trouvent toujours en Jordanie et au Liban. Une autre tragédie préoccupe le Saint-Siège: l’enracinement du conflit de la Russie en Ukraine. Il demande la négociation et le respect du droit international, en particulier en ce qui concerne l’intégrité territoriale, la libération des prisonniers et le retour des enfants en Ukraine.
Mgr Gallagher a tourné son regard vers le Caucase méridional, où les relations tendues entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan et la situation humanitaire dramatique des déplacés au Haut-Karabakh restent une source d’inquiétude pour le Saint-Siège, qui a appelé à des discussions entre les parties afin d’aboutir à un accord durable qui mette fin à la crise humanitaire. Évoquant ensuite les Amériques sous tension, notamment entre le Venezuela et le Guyana, au Pérou, au Nicaragua, «où même s’il n’y a pas de guerre ouverte, l’on observe des phénomènes de polarisation qui affaiblissent les institutions démocratiques».
Quant au continent africain, il est frappé par de multiples crises humanitaires dues au terrorisme international -en particulier dans le Sahel-, aux problèmes sociopolitiques complexes et aux effets dévastateurs des changements climatiques, ainsi qu’aux conséquences de coups d’État militaires et de certains processus électoraux caractérisés par la corruption, l’intimidation et la violence, a-t-il égrainé.
La finalité d’une activité diplomatique atypique
Face à ces drames du monde, Mgr Gallagher s’est interrogé sur le rôle encore possible de la diplomatie vaticane, et de la section qu’il dirige dont les origines remontent à l’après-Révolution française. Tout d’abord nommée Congrégation pour les Affaires ecclésiastiques du Royaume de France par le Pape Pie VI en 1793, elle a vu sa compétence étendue au monde entier par le Pape Pie VII en 1814. Grâce aux Églises et communautés locales, ce réseau diplomatique -qui couvre la quasi-totalité de la planète- constitue une source d’information unique.
«La diplomatie est l’un des instruments par lesquels le Pape exerce sa mission au service de l’Évangile», a-t-il rappelé, évoquant des objectifs immuables de défense de la liberté de culte et de la liberté religieuse; la promotion d’une vision éthique des grandes questions touchant à l’humanité; la défense de la dignité et des droits fondamentaux; la promotion de la réconciliation et de la paix; la promotion du développement intégral de la personne humaine et des initiatives humanitaires.
«Travailler pour la paix. Ce mot est très fragile et, en même temps, exigeant et plein de sens», comme le rappelait encore le Saint-Père en début d’année, tout en soulignant la vocation de la diplomatie du Saint-Siège: «En un moment historique où la paix est de plus en plus menacée, affaiblie et en partie perdue… il revient au Saint-Siège, au sein de la communauté internationale, d’être une voix prophétique et un appel à la conscience.»
Selon lui, la diplomatie du Saint-Siège entend donc poursuivre «sa haute mission d’annonce de l’Évangile et d’établissement de la paix pour tous, tout en maintenant sa neutralité et même son impartialité», comme le rappelait un colloque international organisé en décembre dernier à Paris par les Missions étrangères de Paris (MEP), cité par Mgr Gallagher.
Les signes d'espérance de ces derniers mois
Il estime qu’il s’agit en pratique de tisser des réseaux; de promouvoir le dialogue entre les belligérants, quels qu’ils soient; de contribuer à résoudre les conflits géopolitiques sans humilier les vaincus, afin d’obtenir une paix durable; de lutter pour l’éradication de la pauvreté; d’appeler à une politique de désarmement, à une transition écologique, de construire la paix et de protéger la dignité humaine afin d’épargner les souffrances des populations.
Et Mgr Gallagher de mentionner des signes d’espérance ces derniers mois qui montrent que la diplomatie n’est pas inactive: la nomination en décembre dernier d’un représentant pontifical résident à Hanoi, après un accord conclu avec le Vietnam, grâce à la coopération de l’Église locale; la ratification l’an dernier de l’Accord complémentaire entre le Saint-Siège et le Kazakhstan, qui facilite la présence et l’emploi des agents pastoraux dans le pays; la célébration de quatre anniversaires importants: le 100e anniversaire des relations diplomatiques avec la République du Panama, le 70e anniversaire des relations avec la République islamique d’Iran, le 60e anniversaire des relations avec la République de Corée et le 50e anniversaire des relations avec l’Australie.
À cela s’ajoutent enfin la médiation d’influence exercée directement par le Pape, -récemment en Mongolie, en République démocratique du Congo, au Soudan du Sud et en Hongrie- et l’importance du dialogue interreligieux.
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