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"L'algorithme au service de l'homme" à la Casina Pio IV au Vatican, avec le modérateur Giorgio Zanchini et le père Paolo Benanti. "L'algorithme au service de l'homme" à la Casina Pio IV au Vatican, avec le modérateur Giorgio Zanchini et le père Paolo Benanti.  (Vatican Media)

L'algorithme au service de l'homme, une conférence sur l'IA au Vatican

"Communiquer à l'ère de l'intelligence artificielle. Confronter les idées après le message du Pape François pour la Journée mondiale des communications sociales", tel est le thème de la rencontre organisée par le dicastère pour la Communication. Pour le père Paolo Benanti, professeur d'éthique et de bioéthique à l'Université pontificale grégorienne, «l'intelligence artificielle est inévitable, une réglementation est nécessaire, comme l'a fait l'Union européenne», a-t-il affirmé.

Michele Raviart - Cité du Vatican

L'intelligence artificielle traduit tout en calcul, mais peut-on tout réduire à une probabilité statistique? Comment protéger les professionnels et les travailleurs des médias de l'arrivée de l'IA et maintenir le droit d'informer et d'être informé sur la base de la vérité, de la liberté et de la responsabilité? Comment rendre interopérables les grandes plateformes qui investissent dans l'IA générative sans réduire l'humain à un réservoir de données à exploiter? Ce sont entre autres questions - inspirées des messages du Pape François pour la Journée mondiale de la paix et celle des communications sociales, ainsi que de son récent discours au G7 dans les Pouilles – qui ont été évoqués par le préfet du dicastère pour la Communication, Paolo Ruffini. Ces questions ont été soumises aux intervenants et aux participants de la conférence sur "L'algorithme au service de l'homme. Communiquer à l'ère de l'intelligence artificielle". Une initiative du même dicastère avec la collaboration de la Fondation Saint Jean XXIII, qui s'est tenue à la Casina Pio IV du Vatican, siège de l'Académie pontificale des sciences sociales.

L'Église chemine avec l'homme et sa culture

Les interventions du Pape François sur l'intelligence artificielle, a rappelé le père Lucio Ruiz, secrétaire du dicastère pour la Communication, témoignent du «flair» de l'Église pour accompagner l'homme dans sa culture à travers les changements de l'histoire. Ce fut le cas, a-t-il expliqué, lorsqu'il y a 500 ans, la première imprimerie du Vatican fut créée peu après la découverte de Gutenberg, avec la construction de Radio Vatican par l'inventeur de la communication sans fil Guglielmo Marconi en 1931, ou avec la création du site vatican.va en 1994, alors que le web venait juste d'apparaître sur les ordinateurs.

Un outil à réglementer

C'est précisément à partir de l'essence première des ordinateurs, qui est de faire des calculs, qu’a débutée l'intervention du père Paolo Benanti, professeur d'éthique et de bioéthique à l'Université pontificale grégorienne. Le président de la Commission de l'information de l'AI et membre du Comité de l'AI des Nations unies s’est exprimé lors du panel axé sur "L'éthique de l'algorithme et les défis de la communication". Il a rappelé comment la réalité a été changée par l'invention des transistors, mis à disposition par les États-Unis à ses alliés après les succès de la Seconde Guerre mondiale, lorsque les premiers prototypes informatiques ont contribué à la découverte de la bombe atomique et au décodage des codes secrets utilisés par l'Allemagne nazie.


À partir de cette vision centralisée de la technologie et grâce à la révolution des pionniers de la Silicon Valley dans les années 1970, l'informatique «personnelle» et intime a vu le jour, d'abord grâce aux PC, puis aux smartphones. Avec le ChatGPT et sa mise en œuvre dans les interfaces des téléphones d'Apple et de Microsoft, a souligné le père franciscain, «nous ne savons toujours pas quelle sera la part de l'informatique personnelle et celle de l’informatique centralisée dans le cloud», modèle informatique qui donne accès à des services informatiques (stockage, serveurs, mise en réseau, logiciels) par le biais d’internet. Pour cela, a-t-il ajouté, il faut une régulation, comme l'a fait l'Union européenne, afin de faire avec l'intelligence artificielle ce qui a été fait avec le code de la route pour les voitures.

Une révolution anthropologique

L'intelligence artificielle ne constitue pas en soi un saut technologique impressionnant, a pour sa part souligné Nunzia Ciardi, la directrice générale adjointe de l'Agence nationale italienne de cybersécurité. Ce qui fait de sa mise en œuvre quelque chose qui aura un impact anthropologique décisif sur la réalité, c'est le fait qu'elle se base sur une énorme quantité de données qui ont été «brutalement» collectées au cours des dernières décennies par les entreprises à travers des services gratuits ou des applications aujourd'hui indispensables.

D'autres aspects à souligner sont l'utilisation de la langue anglaise pour former les algorithmes - avec toutes les valeurs et expressions culturelles qu'un idiome a sur un autre - et le risque d'une difficulté croissante à décoder des messages complexes, ce qui peut être dangereux dans une démocratie. «La connaissance devient une propriété privée», a commenté le professeur Mario Rasetti, professeur émérite de physique théorique à l'université polytechnique de Turin et président du conseil scientifique du CENTAI, décrivant l'expérience d'OpenAI, une entreprise de scientifiques à but non lucratif qui a été rachetée par Microsoft pour 10 milliards d'euros. «Nous devons faire de l'intelligence artificielle une science avec des définitions rigoureuses, a-t-il ajouté, car elle est actuellement présentée comme un outil probabiliste, qui peut difficilement mesurer l'intelligence, la vérité et la cause».


Les intervenants du deuxième panel

Le deuxième panel de la conférence s'est concentré sur le thème "Où va l'IA, quelles sont les règles du jeu nécessaires", au cours duquel sont intervenus: Alberto Barachini, sous-secrétaire à la présidence du Conseil des ministres italien en charge de l'information et de la publication; Brando Benifei, député européen, rapporteur de la loi sur l'IA de l'Union européenne, l'un des premiers actes réglementaires en la matière; Elisabetta Belloni, directrice générale du Département italien du renseignement de sécurité (DIS) et Antonio Arcidiacono, directeur de la technologie et de l'innovation à l'Union européenne de radio-télévision (UER).

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28 juin 2024, 12:01