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Le Pape s'apprêtant à rencontrer les autorités politiques, la société civile et le corps diplomatique, ce jeudi 26 septembre 2024. Le Pape s'apprêtant à rencontrer les autorités politiques, la société civile et le corps diplomatique, ce jeudi 26 septembre 2024.  (VATICAN MEDIA Divisione Foto) Éditorial

L'Europe oublieuse et les «massacres inutiles»

Une relecture du discours du Pape François aux autorités luxembourgeoises, ce jeudi 26 septembre.

Andrea Tornielli* - Luxembourg

Paix, négociation, travail diplomatique, compromis honorables... Depuis le Luxembourg, petit pays au carrefour de nombreux événements historiques européens, le Pape François lance à l'Europe un appel à la paix, lui demandant de ne pas répéter les erreurs du passé, l'invitant à ne pas oublier. Et ce qui frappe dans les propos du Successeur de Pierre, c'est l'expression «massacre inutile», qui rappelle celle utilisée par Benoît XV pour définir le carnage de la Première Guerre mondiale.

S'adressant aux autorités luxembourgeoises, le Pape a constaté «la réapparition, même sur le continent européen, de dissensions et d'inimitiés qui, au lieu d'être résolues sur la base de la bonne volonté réciproque, des négociations et du travail diplomatique, aboutissent à des hostilités ouvertes, avec leur cortège de destructions et de morts». Comment ne pas penser à l'Ukraine attaquée par la Russie, une guerre qui a déjà fait un million de morts et de blessés et qui a dévasté le pays. Une guerre menée entre des chrétiens qui partagent la même foi, le même baptême et la même liturgie.

Le Pape lors de son discours aux autorités politiques, civiles et diplomatiques luxembourgeoises.
Le Pape lors de son discours aux autorités politiques, civiles et diplomatiques luxembourgeoises.

Puis François a constaté avec amertume que le cœur humain semble incapable de «chérir la mémoire». Oui, c'est bien une Europe oublieuse qui risque de retrouver les chemins de la guerre. Pour éviter de «nouveaux massacres inutiles», a-t-il ajouté, il faut «des valeurs spirituelles élevées et profondes, qui empêchent la folie de la raison et le retour irresponsable aux mêmes erreurs du passé, aggravées d'ailleurs par la plus grande puissance technologique dont l'être humain dispose aujourd'hui».

Mais l'évêque de Rome a également parlé de la responsabilité spécifique des gouvernants, de ceux qui détiennent l'autorité, qualifiant de «nécessité urgente» le fait de s'engager «avec constance et patience dans des négociations honnêtes en vue de résoudre les désaccords». Il a appelé les esprits à «trouver des compromis honorables, qui ne remettent rien en cause et qui peuvent au contraire construire la sécurité et la paix pour tous».

Paix, négociation, travail diplomatique, compromis honorable: des mots qui semblent avoir disparu du vocabulaire des dirigeants, y compris européens, à une époque où l'on ne parle que d'armes et du nombre de milliards à investir dans les instruments de mort. Alors que des dirigeants menacent d'utiliser des engins nucléaires, alors que le nombre de civils tués par des bombes pilotées par des drones augmente, alors que les États investissent des sommes énormes dans les armements, privant de ressources la lutte contre la faim, la santé, l'éducation, la protection de l'environnement. Ce sont les peuples qui doivent faire entendre leur voix. Les paroles prononcées par Paul VI le 29 janvier 1966 au sujet d'un arbitrage de l'ONU sur la guerre au Vietnam restent d'une actualité brûlante: «C'est une grave, très grave responsabilité que de refuser la négociation, seul moyen aujourd'hui de mettre fin au conflit, sans laisser la décision aux armes, aux armes de plus en plus terribles. Les peuples nous regardent et Dieu devra nous juger».

 

*Directeur éditorial des médias du Vatican

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26 septembre 2024, 18:38