Au Synode, l'invitation à se libérer de la peur de l'autre
Antonella Palermo - Cité du Vatican
Un appel urgent à la paix s’élève de l’assemblée du synode. Vendredi, au cours des travaux de la 16e Assemblée générale ordinaire du Synode des évêques, les participants ont condamné tous les fondamentalismes, «nous devons tous être des artisans de paix», et dénoncé les «causes principales de tous les maux», à savoir le commerce des armes. C'est ce qu'ont rapporté ce samedi le préfet Paolo Ruffini et Sheila Leocádia Pires, respectivement président et secrétaire de la Commission d'information du Synode.
Du Liban, le droit des peuples opprimés à décider de leur destin
«Malheureusement, le monde se tait ou donne le feu vert à toute cette violence parce qu'il y a trop d'intérêts politiques et économiques qui n'ont rien à voir avec les valeurs chrétiennes»: c'est le constat amer qu'a fait Mgr Mounir Khairallah, évêque de Batrun des Maronites, interrogé par les journalistes lors du briefing quotidien en Salle de Presse du Saint-Siège.
D'un Liban meurtri, sur lequel le témoignage du prélat a profondément touché tous les participants, l'espoir demeure cependant, que, grâce aussi à la diplomatie vaticane, le pays du cèdre continue d'être un message de paix. Mgr Kahirallah a rappelé le rejet israélien de la résolution sur la reconnaissance de deux États et de deux peuples (Israël et Palestine). «Je ne veux pas dire que tous les Israéliens sont pour la violence, mais que les intérêts priment et que l'Occident ne nous soutient pas, tout comme il ne soutient pas les peuples opprimés. Qu'ils aient le droit de décider de leur propre destin», a-t-il souligné. L'assemblée sur la synodalité est une bonne occasion de réaffirmer la centralité de ceux qui souffrent le plus de la violence et de la pauvreté, a-t-il réitéré à la presse: «La plus grande décision à prendre est que l'Église, à travers le Synode, soit un messager du vivre ensemble, du respect de l'autre et de la nécessité de se libérer de la peur de l'autre». Mgr Khairallah a conclu: «Ce serait un premier pas et une grande recommandation pour l'humanité».
En Haïti, «nous sommes désespérés»
Haïti vit dans un état d'insécurité chronique. C'est de là que vient le témoignage de Mgr Launay Saturné, archevêque de Cap-Haïtien. «Ceux qui devraient ramener l'ordre et la paix ont jusqu'à présent failli à leurs responsabilités», a-t-il déclaré sans ambages, parlant d'un respect de la dignité de la personne humaine qui «est loin d'être une réalité ici». Il a rappelé le dernier «massacre» en date, le 3 octobre, qui a fait soixante-dix morts, de nombreuses maisons incendiées et beaucoup de personnes déplacées. Des bandes armées en sont les auteurs, «elles l'ont même annoncé, a déclaré le prélat, mais rien n'a été fait pour l'empêcher. Nous sommes désespérés». Dans la capitale, 70% de la population est contrainte de fuir, a encore dénoncé Mgr Saturné, soulignant l'impact négatif sur la vie des jeunes et la mission de l'Église. De nombreuses paroisses ont été fermées dans le pays, mais la réflexion sur la synodalité s'est poursuivie. L'évêque a expliqué que même d'un point de vue économique, il n'y a pas eu de progrès au cours des cinq dernières années, que le pays est coupé en deux sans possibilité de communication entre le nord et le sud, et qu'il n'y a pas assez de stabilité pour préparer les élections.
Dans ce contexte, la mission, la communion et la participation sont des valeurs plus fondamentales que jamais à renforcer. De nombreux groupes religieux tentent de les transmettre aux nouvelles générations, dit-il, afin qu'elles puissent un jour construire une société qui s'y réfère. Entre-temps, la Conférence épiscopale haïtienne a demandé que le temps de la transition ne soit pas trop long et s'est faite le porte-parole auprès des «forces multinationales» de l'exigence d'assumer cette responsabilité. Les évêques, qui remercient vivement le Pape pour l'attention avec laquelle il suit les événements dans l'État des Caraïbes, ont également lancé un appel à l'ensemble de la population, car chacun doit apporter sa contribution.
Les Philippines et l'Église missionnaire dans les campagnes
Mgr Pablo Virgilio S. David, évêque de Kalookan, est membre de la Commission d'information du Synode. Lors du briefing, il a rendu compte de la consultation continentale avec les pasteurs qui s’est déroulée entre les deux sessions annuelles du synode. Il a en particulier parlé de la relation entre synodalité et mission à la lumière du phénomène migratoire qui affecte les Philippines: un phénomène qui n'est pas seulement international mais, ces derniers temps, surtout local, des provinces vers les grandes villes. L’évêque a rappelé quelques données pour souligner la hausse des flux en provenance des campagnes: de 1,5 à 4 millions de personnes en une dizaine d'années, se sont installées à Manille. Avec pour conséquence que certains habitants ont perçu les nouveaux arrivants comme une menace. «Quand le Pape est venu en 2015, il nous a dit d'aller dans les banlieues. Et c'est ce que nous avons fait. Nous avons créé 20 stations missionnaires dans mon diocèse», poursuit l'évêque. Les paroisses deviennent donc de plus en plus missionnaires.
Une caractéristique qui devra d'une certaine manière être mise en œuvre même dans une société complètement différente comme, par exemple, au Canada. Catherine Clifford, l'un des témoins du processus synodal, a l’a mentionné aux journalistes: «Nous constatons que le Sud global joue un rôle de plus en plus central dans nos conversations», a-t-elle admis. L'important, a-t-elle ajouté, est de faire comprendre que malgré les nombreux défis démographiques et la baisse de fréquentation des églises, «l'Église ne disparaît pas».
Les pauvres, les jeunes, les femmes, les laïcs
Nous devons écouter le cri des pauvres, les inclure en tant que sujets et non en tant que simples bénéficiaires. C'est l'un des points qui est revenu le plus souvent dans les échanges de vendredi. «Le chemin nous est montré par les derniers, nous devons écouter le cri de la terre et des peuples». De nombreuses interventions ont porté sur le rôle des femmes dans l'Église: il ne doit plus arriver, a-t-on entendu, que des femmes qui veulent servir l'Église et qui le font avec beaucoup d'engagement, se retrouvent marginalisées. Il en va de même pour les personnes Lgbtq+. L'une des questions au centre des différentes réflexions concernait les jeunes: qu'est-ce qui les attire dans l'Église aujourd'hui? Plusieurs participants se sont accordés pour répondre: «Le radicalisme évangélique». L'idée la plus répandue est que «les jeunes doivent respirer» et que les adultes doivent respirer avec eux, ce qui donnera probablement un sens complet et compréhensible à ce que l'on appelle la nouvelle évangélisation. L'œcuménisme, les synodes diocésains, le rôle du Pape dans les assemblées post-synodales ont été également au nombre des sujets abordés. De manière générale, il est apparu que la synodalité est un moyen de lutter contre le cléricalisme.
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