La cathédrale d'Ajaccio La cathédrale d'Ajaccio  (AFP or licensors)

Le Pape sera à Ajaccio pour exhorter à la prière, à la justice et à la responsabilité

Un voyage dans le sillage de la tradition chrétienne, du témoignage et de la rencontre. C'est ce qu'a déclaré le secrétaire d'État du Saint-Siège, le cardinal Pietro Parolin, à la veille du 47e voyage apostolique de François, qui le conduira en Corse. «J'imagine, a souligné le cardinal, que le Saint-Père réaffirmera que la mare nostrum ne doit pas être le “cimetero nostrum” pour ceux qui cherchent un avenir meilleur au péril de leur vie».

Massimiliano Menichetti – Cité du Vatican

Derniers préparatifs à Ajaccio, qui accueillera ce dimanche 15 décembre le successeur de Pierre, premier Pape à visiter l'île française au centre de la Méditerranée. L'évêque de la ville corse, le cardinal François-Xavier Bustillo, a souligné que la présence de François «n'est pas un privilège, mais une responsabilité». Il s'agit d'une visite courte, d'une douzaine d'heures, mais très intense et caractérisée par la beauté et la vivacité de la religiosité populaire, les thèmes de la rencontre, de l'accueil et de la sauvegarde de la création.

Entretien avec le secrétaire d'État du Saint-Siège, le cardinal Pietro Parolin, qui accompagnera le Saint Père dans ce voyage.

Comment la communauté locale pourra traduire ce qu'elle appelle «responsabilité» en actions concrètes pour l'avenir, tant au niveau spirituel que social?

Ce voyage du Saint-Père se déroule au cœur de l'Avent et dans l'imminence de l'ouverture de l'Année Sainte 2025, et nous pouvons donc l'inscrire dans la recommandation de saint Paul à Tite de «vivre dans le temps présent de manière raisonnable, avec justice et piété, en attendant que se réalise la bienheureuse espérance: la manifestation de la gloire de notre grand Dieu et Sauveur, Jésus Christ. (…) Voilà comment tu dois parler, exhorter et réfuter, en toute autorité» (Tt, 2,12-15).

Le Pape, par sa présence à Ajaccio, entend rappeler précisément cet appel et cette responsabilité, que l'Église locale -évêque, prêtres, diacres, consacrés et toutes les personnes impliquées aux différents niveaux de la vie ecclésiale- trouvera le moyen de traduire en gestes et en actions concrètes. Il me semble que les choix pratiques devraient s'inspirer précisément de ces trois attitudes fondamentales rappelées par saint Paul, caractéristiques de la vie et du témoignage du chrétien dans le monde: se comporter avec sobriété, justice et piété. En d'autres termes, la responsabilité doit signifier une conversion personnelle et communautaire, en revenant à orienter notre esprit vers le Seigneur qui vient, pour réaliser le «miracle» d'une vie nouvelle, d'une société nouvelle et d'un monde nouveau.

Éminence, le Pape clôturera la conférence sur la religiosité populaire en Méditerranée, à laquelle participeront des évêques de différentes nations; il s'agit d'une occasion unique de dialogue et d'unité. Quels fruits attendez-vous de cette rencontre qui voit une foi enracinée dans les traditions et ouverte à l'évangélisation?

Nous connaissons l'importance du dialogue pour le Pape François, «la culture de la rencontre», à la recherche d'une plus grande unité et harmonie entre les communautés, les Églises, les croyants, les pays et les nations, tout ce pour quoi le Seigneur Jésus a offert sa vie. «Qu’ils deviennent ainsi parfaitement un, afin que le monde sache que tu m’as envoyé, et que tu les as aimés comme tu m’as aimé.» (Jn 17,23). Et quelle importance a pour lui la piété populaire! C'est sur ces deux charnières que se déroule la conférence et c'est sur ces deux points qu'elle veut porter du fruit. Permettez-moi de rappeler -à propos de la piété populaire- ce que le Saint-Père écrit dans le chapitre sur l'annonce de l'Évangile de l'exhortation apostolique Evangelii Gaudium (n° 122-126). Il nous dit que la piété populaire est une force évangélisatrice, cachant une foi profonde qui s'exprime plus symboliquement que rationnellement, mais qui n'est pas dépourvue de contenu théologique. En effet, le Pape François nous invite à voir dans la mère qui prie le rosaire pour son enfant malade, dans les processions et les pèlerinages, dans la prière spontanée aux saints ou au crucifix, dans la dévotion à la Vierge dans un sanctuaire, de petits et grands gestes missionnaires qui témoignent d'un grand amour et d'une grande confiance dans le Christ crucifié et ressuscité.

À la fin du voyage, le Pape s’entretiendra avec le président français Emmanuel Macron à l'aéroport. Quelles questions pensez-vous voir émerger dans ce dialogue, en vue de construire des ponts et de la fraternité, mais dans un moment historique si complexe marqué par les guerres?

Je ne peux pas dire aujourd'hui quelles questions seront au centre de la rencontre du Saint-Père avec le président de la République, mais j'imagine que le thème de la paix, partout où elle est nécessaire et attendue aujourd'hui, sera crucial. À quelques jours de l'anniversaire du Noël du Prince de la Paix et dans les circonstances actuelles du monde, c'est certainement la paix qui sera une pensée dominante. Ensuite, on sait combien le respect de la vie humaine, de sa conception à sa fin naturelle, est cher à l'Église catholique, qui n'hésite pas à interpeller les dirigeants et les chefs d'État à chaque occasion, même si elle sait que cela ne leur plaira pas. En suivant, encore une fois, le conseil de Paul à Tite: «Voilà comment tu dois parler, exhorter et réfuter, en toute autorité».

La réunion aura lieu à l'aéroport d'Ajaccio, c'est-à-dire au milieu de la Méditerranée. J'imagine que le Saint-Père réaffirmera que la mare nostrum ne doit pas être le «cimetero nostrum» pour ceux qui cherchent un avenir meilleur au péril de leur vie.  Cela pose toujours la question de l'accueil, en frères et sœurs en humanité, de ceux qui frappent à la porte et qui participent souvent à la construction de la vie sociale et économique de nos pays, accueillant ainsi leurs talents et leurs énergies. Cette attitude nous permet d'établir des règles, d'exiger le respect de nos lois et de nos équilibres sociaux et culturels, mais aussi et surtout de travailler avec les pays de départ, afin que leurs enfants puissent rester et trouver ce dont ils ont besoin pour vivre dignement en tant que citoyens.

François rencontrera le clergé et célébrera une messe au cours de sa visite. Quels sont les messages que vous attendez du Souverain Pontife à l'égard des prêtres et des laïcs?

En général, et surtout lors des voyages apostoliques, le Saint-Père est particulièrement attentif à l'histoire des personnes qui se trouvent devant lui, à la culture dans laquelle elles sont insérées, aux questions, aux espoirs et aux souffrances que chacun porte dans son cœur. En ce sens, la meilleure attitude de la part de chacun d'entre nous n'est pas d'«attendre» quelque chose selon nos goûts, mais d'accueillir sa parole, d'écouter son magistère pour nous laisser encore une fois aider sur le chemin. Certainement, étant au cœur de l'Europe, le Pape François ne manquera pas d'encourager et de soutenir, avec sa proximité, l'engagement apostolique de l'Église et de ses agents pastoraux, prêtres et laïcs, en exhortant tant le monde croyant que les institutions civiles et politiques à dialoguer et à travailler ensemble pour le bien commun de la société, et en particulier des plus fragiles.

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14 décembre 2024, 15:00