Tchad: les évêques appellent à cheminer «ensemble dans la vérité»

Jacques Ngol,SJ – Cité du Vatican

La Conférence épiscopale du tchad (CET) a conclu sa session ordinaire vendredi 09 décembre. Dans un document intitulé «marchons ensemble dans la vérité» rendu public ce même vendredi, les évêques unissent leurs voix pour livrer aux chrétiens et au peuple tchadien dans son ensemble un message d’espérance. Ils ont en outre porté leur attention sur la situation sociopolitique du Tchad, interpelant le gouvernement sur sa responsabilité dans ce contexte de crise et exhortant le peuple à la culture de la paix et de la cohabitation dans la vérité.

Noël, une raison d’espérance

«La fête de Noël est la célébration de l’événement joyeux de la naissance de Jésus, le Fils de Dieu», ont indiqué les évêques, affirmant que ce Jésus célébré à Noël est «la vraie Lumière, qui éclaire tout homme en venant dans le monde». Les pasteurs  invitent à avoir le regard sur le Christ qui est le motif de  l'espérance et qui conduit vers la lumière de la vérité. Rappelant leur habitude d'adresser un message avant la célébration de la Nativité, les prélats réitèrent leur responsabilité de guider le peuple de Dieu dans l'espérance. Cette année encore, disent-ils, «nous vous adressons un message d’espérance mais centré sur la nécessité et la beauté de marcher ensemble dans la vérité. En effet, c’est le seul chemin qui peut nous conduire à la liberté, à la paix profonde et durable». Cette vérité, c’est Jésus Christ, «Chemin, Vérité et Vie». Les pasteurs ont en outre rappelé l’appel incessant de saint Paul exigeant à se «débarrasser du mensonge, et à dire la vérité, chacun à son prochain, parce que nous sommes membres les uns des autres». L’épiscopat tchadien a par ailleurs convié les fidèles chrétiens à ne pas se lasser de rechercher cette vérité dans un esprit de «communion, participation et mission», suivant le processus qui conduit à une Eglise synodale qui invite à cheminer ensemble comme un seul peuple en marche. 

La vérité et le dialogue pour une cohabitation pacifique  

Analysant la crise que traverse le Tchad sur le plan social, politique et économique, les évêques n’ont pas hésité à réitérer leur appel à un dialogue franc, condition sine qua non pour sortir de cette crise. Ils ont rappelé en souvenir le dialogue national inclusif et souverain (DNIS) qui, pour eux devrait «permettre dans un débat franc et sincère, de jeter les jalons d’un Tchad nouveau, solide et démocratique». Les pasteurs ont constaté plusieurs obstacles qui entravent la marche du peuple tchadien dans la vérité vers la refondation du pays, notamment: «le manque d’écoute, l’individualisme, le manque d’engagement, etc.». Ces obstacles s’observent à tous les niveaux, notamment au sein de l’église et au niveau des acteurs politiques et de la société civile.

Les évêques, relèvent en outre la grande difficulté à laquelle est confronté le peuple tchadien dans son ensemble, à savoir: «la mauvaise gouvernance, les injustices, les inégalités et le chômage», ces maux qui tendent toujours à être voilés par «manipulation de la vérité, le non-respect des lois de la République, clientélisme, achat de conscience». L’épiscopat a rappelé «l'évènement du 20 octobre» comme une illustration de ce manque de vérité et de cette manipulation des consciences, alertant que «l’exploitation de ces événements caractérisée essentiellement par le mensonge risque de conduire le pays dans le chaos». Ils lancent un vibrant appel à tous, à développer une haine du mensonge et l’amour de la vérité pour construire un Tchad juste.

Ensemble pour un Tchad juste

Après un tour d’horizon qui leur a permit d’avoir une vue générale sur la situation du pays, les pasteurs ont procédé à un appel à tous les niveaux invitant à mettre ensemble les efforts pour construire un Tchad juste.

- Aux fidèles chrétiens, les évêques appellent à une lutte «contre les ténèbres, en vivant comme les fils et filles de la lumière et en témoignant de la vérité» et à «combattre le mensonge sous toutes ses formes et dans tous les domaines de la vie, notamment sur le plan politique et socioéconomique». C’est là, selon la conférence des évêques un culte au «Père en esprit et en vérité»;    

- Les familles sont invitées à assumer leur responsabilité pour l’éducation de leurs enfants. «Nous vous invitons à transmettre les valeurs d’honnêteté, d’amour, de vérité et de respect de l’autre à vos enfants», ont-ils insisté.

- «Chers jeunes, n’utilisez jamais la violence pour résoudre vos problèmes. Cherchez la voie de la non-violence», ont-ils recommané à la jeunesse, les exhortant à avoir «confiance en Dieu qui ne déçoit pas et en eux-mêmes». 

- L’épiscopat tchadien invite la société civile à continuer à se «mobiliser contre la cherté de la vie, l’impunité et l’absence d’alternance démocratique». C’est selon eux le rôle que doit jouer cette association qui défend les droits et la liberté des hommes et femmes.

- Aux acteurs politiques et aux gouvernants, les pasteurs ont réitéré leur appel à cultiver «l’amour de la vérité pour gagner la confiance du peuple», les appelant à «privilégier l’intérêt général de la nation». La conférence épiscopale a rappelé enfin au gouvernement son rôle primordial qui est de se mettre au service du peuple et d'assurer sa sécurité. «Prenez conscience que vous avez entre vos mains les rênes d’un des pays figurant parmi les plus pauvres de la planète et dans les derniers rangs de l’Indice de Développement Humain», ont-ils lancé, les conseillant d'«écouter la voix des hommes et des femmes» dans l’exercice de leur charge.

- La CET a enfin manifesté sa reconnaissance à la communauté internationale et aux pays amis du Tchad qui œuvrent aux côtés du gouvernement tchadien dans la consolidation de la paix. Ils invitent en outre les partenaires de leur pays à ne pas se focaliser que sur la relation avec le gouvernement, mais d'ouvrir aussi les yeux sur la souffrance du peuple tchadien. «Que votre attention ne s’arrête pas seulement au niveau des gouvernants, mais aussi au peuple qui souffre. Aussi, nous vous invitons à plus de cohérence et d’objectivité dans vos prises de position sur la situation du Tchad», ont-ils conclu.