RD Congo: le drame d’une jeune fille albinos, doublement victime
Stanislas Kambashi,SJ – Cité du Vatican
Attrapée il y a quelques années par des hommes inconnus alors qu’elle avait douze ans, Nyota Mapendo Sarah a été emmenée, ensemble avec d'autres jeunes filles, dans une forêt, dans la localité de Kitshanga, dans le territoire de Masisi, à 90 kilomètres de Goma. Là elles ont subi des violences sexuelles pendant plusieurs jours. Tombée enceinte, elle a donné naissance à une fille dont elle prend soin. Ce calvaire qu’a connu la jeune Nyota, beaucoup d’autres femmes et hommes l’ont connu et continuent à en être victimes, particulièrement dans la partie Est de la RD Congo. Certaines d’entre eux ont témoigné devant le pape le 1er février et ont déposé des machettes et autres objets, signe qu’ils ont rejeté la vengeance.
Après avoir témoigné, «je me suis senti renforcée» et «j’ai pardonné»
Après avoir témoigné et vu le Pape, «je me suis senti heureuse et renforcée», a confié Nyota. «J’ai aussi pardonné, comme notre pape nous l’a dit», a-t-elle poursuivi. Elle exhorte d’autres survivants des violences à emprunter aussi la voie du pardon.
Au gouvernement congolais, la jeune survivante lance un cri d’alarme, celui d’«accompagner» les congolais de la région de l’Est du pays, en renforçant notamment la sécurité à travers la présence des forces qui sachent protéger la population. Elle lance également l’appel à toute personne de bonne volonté, afin d’aider les survivants de ces violences, de quelque manière que ce soit, à se ressaisir et à retrouver leur dignité.
Doublement victime: une albinos exposée aux conséquences des abus
Aujourd’hui, Nyota fait face à deux problèmes, qui pèsent psychologiquement et socialement sur elle. Pour avoir subi le viol, elle est la risée de certaines personnes. Certaines ne veulent plus s’approcher d’elle et elle aussi du mal à aller vers les autres. A cela s’ajoute la stigmatisation liée à la couleur de sa peau: étant albinos, elle est parfois mise à l’écart et se retrouve isolée, même à l’école où elle va suivre des cours. Elle se sent ainsi discriminée et se pose beaucoup de questions. «Dans mon cœur, j’ai même demandé à Dieu pourquoi Il m’a créée avec une peau différente des autres», a-t-elle confié.
C’est ce double calvaire que cette jeune congolaise vit au quotidien, tout en gardant courage et en cherchant la paix intérieure. Mais au retour de Kinshasa, Nyota n’a pu regagner son terroir d’origine, Kitshanga, localité d’environ 60.000 habitants situé à 90 kilomètres de Goma, capitale du Nord-Kivu, l’une des provinces les plus touchées par les violences armées, à cause notamment des richesses minières dont elle regorge. La localité de Kitshanga était tombée le 26 janvier sous le contrôle du groupe armé M23, considéré par Kinshasa comme un mouvement terroriste. La RDC accuse le Rwanda de le soutenir, ce qui est corroboré par des experts de l’ONU et certains pays occidentaux, des accusations que Kigali dément.
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