Liban: le patriarche Raï met en garde contre un effondrement du pays
Trois semaines après la chute du gouvernement, «les positions sont restées les mêmes» et le «bateau de la patrie coule»: c'est l’acte d'accusation, ferme, lancé par le patriarche maronite Bechara Raï. Au cours de son homélie dominicale, il est revenu sur la crise politique qui touche le pays et qui, un mois après le début des manifestations antigouvernementales du 17 octobre et la démission du Premier ministre Saad Hariri, semble loin d'être réglée. Le cardinal a renouvelé sa prière et sa solidarité «au peuple, aux jeunes, hommes et femmes» protagonistes de cette «révolte pacifique» marquée «par l'unité sous un seul drapeau».
Prise de conscience nécessaire
Selon le patriarche Raï, les politiques sont «responsables de la formation du nouveau gouvernement». Dans l'accomplissement de leur tâche, a-t-il ajouté, ils doivent être «libres d'intérêts, de comptes personnels et de factions». Il espère donc une «prise de conscience» de la gravité de la tâche et de la «responsabilité historique» que requiert la situation, car le Liban se trouve au bord de «l'effondrement économique et financier».
Le cardinal a conclu son homélie en condamnant le «grand crime» commis contre «la patrie et ses citoyens»: appauvrir le peuple et démanteler l'État constitue, selon lui, une «trahison».
Révolte historique
La crise politique, économique et sociale actuelle, qui est entrée dans sa «deuxième phase», a également fait l'objet d'une étude plus approfondie lors de la 53e session ordinaire du Conseil des patriarches et évêques catholiques, tenue du 11 au 15 novembre au siège patriarcal maronite à Bkerké. Patriarches et évêques ont ainsi parlé de la «révolte historique» en cours, qui a permis aux Libanais de «surmonter leur appartenance sectaire et partisane» en s'unissant sous une même «identité nationale». C'est là, soulignent-ils, «la base de la construction du Grand Liban il y a cent ans».
Parmi les raisons de la protestation, on peut citer la «corruption» et la «perte de confiance dans les dirigeants politiques», l'effondrement économique et social ainsi que la logique des «quotas et du favoritisme» dans les institutions publiques. D'où la nécessité d'un exécutif «crédible et efficace» pour mettre en œuvre les réformes, récupérer les fonds pillés au fil du temps et reprendre le contrôle des finances publiques.
Tensions sur le terrain
Le communiqué final de cette rencontre affirme que les sit-in sur les places représentent «un événement unique dans l'histoire du Liban»; on espère également que ce mouvement inédit soit exempt de toute récupération politique ou partisane. Le président de la République a pour mission de garantir «la souveraineté, l'indépendance et l'unité du peuple», ainsi que de «promouvoir l'économie» et «construire l'État de droit par le choix de personnes compétentes» en réponse aux «aspirations de tous les Libanais, en particulier des jeunes».
Sur le terrain, la situation se tend; à Beyrouth, forces de l’ordre et manifestants se sont fait face ce mardi; ces derniers avaient appelé à encercler le Parlement, dans le centre de la capitale, pour empêcher les députés d’examiner plusieurs lois controversées. La séance a été reportée sine die. Le président libanais Michel Aoun a, quant à lui, assuré être ouvert à un gouvernement incluant des représentants du mouvement populaire.
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