Violences au Nigeria : l’archevêque de Lagos demande la fin de l'impunité
Marie Duhamel - Cité du Vatican
«Stop aux violences policières», «Sans justice, pas de paix», ou encore «Le changement arrive» : ce sont quelques-uns des slogans brandis par la jeunesse nigériane depuis plus d’une semaine dans les grandes villes du Nigéria.
Sans leader, mais hyper connectés, ils sont des centaines à se retrouver chaque jour, en suivant les instructions laissées sur les réseaux sociaux, avec le hashtag #EndSARS. Les jeunes exigent la suppression de la SARS, une unité de police créé pour lutter contre les vols à main armée et aujourd’hui accusée d'extorquer la population, d'arrestations illégales, de torture et même de meurtre.
La contestation est d’ailleurs née quand, avec effroi, les Nigérians ont découvert sur les réseaux sociaux une vidéo montrant des agents présumés de cette unité de police tuant un homme à Ughelli, dans l'Etat du Delta, au sud du pays.
Mobilisation malgré la fin de la SARS
«Ceci est incroyablement triste et préoccupant», a réagi l’archevêque de Lagos, Mgr Alfred Adewale Martins. «Il est triste qu'une bonne partie des personnes qui sont constitutionnellement autorisées à fournir de la sécurité et à garantir la paix et l'ordre se soient désormais révoltées contre les personnes mêmes qu'elles devraient protéger», écrit-il dans une déclaration.
Dimanche soir, le gouvernement a annoncé le démantèlement immédiat de la SARS, promettant une réforme de la police. Mais le mouvement à continuer.
Mardi soir, en réponse aux demandes des manifestants pour plus de transparence au sein de la police, le porte-parole de la police Franck Mba a a promis de faire passer des «tests psychologiques» aux officiers de la SARS «avant leur redéploiement dans d'autres organes de police». Il a également promis une nouvelle unité de police, l'unité spéciale d'armes et de tactique (Special Weapons and Tactics, SWAT). En quelques heures, le hashtag #EndSWAT avait remplacé #EndSARS sur les réseau sociaux. Et les manifestations ont continué ce mercredi.
Restaurer l'intégrité de la police
Pour l’archevêque de Lagos, «maintenant, la seule manière de calmer la colère dans le pays consiste à remettre les coupables à la justice et que cette dernière suive son cours. De tels crimes odieux ne doivent pas être amnistiés ou autorisés à se perpétuer».
Mgr Martins s’interroge par ailleurs sur la capacité de la police à se réformer de l’intérieur. «Nous savons que pas moins de quatre tentatives ont été faites par les hautes autorités de la police pour tenter de rappeler à l'ordre ces unités spéciales, mais sans succès. Nous nous demandons pourquoi», note l’archevêque. Reprenant à son compte une rumeur qui circule parmi la population, il se questionne sur la compromission des hautes autorités. «Cela serait triste de découvrir qu'il en est réellement ainsi». Le prélat en appelle ainsi au président du pays, Muhammadu Buhari afin qu’il persuade la Commission des Services de Police et l'Inspecteur général de la Police «de lancer une révision approfondie et réaliste de l'ensemble de la structure des forces de police afin d'en restaurer l'intégrité.»
Il y a trois ans, après de premières protestation contre la SARS, le chef de la police nigériane avait déjà ordonné une réorganisation de l'unité mais, selon une enquête d'Amnesty International publiée en juin dernier, «tortures et autres mauvais traitements» avaient continué dans une totale impunité. Entre janvier 2017 et mai 2020, l'ONG a documenté 82 cas de violence.
(avec Fides et AFP)
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