L'Église byzantine hongroise honorée par le Pape
Delphine Allaire - Envoyée spéciale à Budapest, Hongrie
L'Église d'Orient et d'Occident, les deux poumons de l'Europe. Cette image poétique et théologique inspirée par Jean-Paul II s’est manifestée place des Roses à Budapest, où les deux églises latines et byzantines se côtoient ensemble dans un même lieu. Une Église gréco-catholique hongroise réorganisée par François en 2015, procédant à l'élévation de l'éparchie de Hajdúdorog en éparchie métropolitaine sui iuris, i.e autonome dans la communion catholique.
«Nos martyrs sont morts non seulement pour leur foi chrétienne, mais surtout pour leur fidélité à l'Église catholique: au lieu de se plier aux diktats de la violence communiste, ils sont restés fidèles à l'Église catholique et sont morts pour elle. Par conséquent, personne ne peut douter que, tout en essayant de rester fidèles à nos racines orientales, nous ne souhaitons pas nous séparer, mais que nous avons l'intention de devenir un pont entre les deux Églises sœurs, puisque, dans un certain sens, nous appartenons aux deux», a rappelé le métropolite gréco-catholique hongrois, Mgr Fülöp Kocsis, rencontré à l’issue de sa rencontre avec le Successeur de Pierre. Le primat byzantin a fait partie de la délégation papale tout au long des trois jours de voyage, aux côtés du préfet du dicastère pour les Églises orientales, Mgr Claudio Gugerotti.
Quel sens a revêtu pour la petite communauté gréco-catholique hongroise la visite du Saint-Père?
Commençons par les liens historiques. L’Église gréco-catholique en Hongrie est une minorité, mais l’Église orientale était toujours attachée au peuple hongrois dans les années 1 000, même avant, à l’arrivée de notre nation dans le bassin des Carpates. Les premiers missionnaires étaient byzantins, ils se sont mêlés à l’Église grecque et ont vécu ensemble pendant deux cents ans. Après le schisme de 1054, les deux Églises orientales et occidentales ont vécu ensemble jusqu’au XIIIe siècle en Hongrie. L’origine des gréco-catholiques n’intervient pas à cette époque-là, la première union avec Rome arrive au XVIe siècle. Nous sommes gréco-catholiques, unis au Pape, mais notre origine et spiritualité est plutôt proche de l’Église orthodoxe. En visitant notre petite communauté samedi, le Pape a exprimé cette union. C’est un respect du Pape envers les Églises orientales.
Quelle est la réalité de l’Église gréco-catholique hongroise aujourd’hui, quels sont ses défis?
Notre langage, usage, tradition sont très anciens. Ce style de religion a quelque chose à dire aux hommes contemporains. Comment? Les jeunes expriment une certaine sensibilité et un intérêt pour nos chants, cérémonies, malgré nos liturgies très longues, nos vêtements, et textes très profonds et anciens, peu facilement appréhensibles au premier abord. Mais tout cela peut toucher l’homme d’aujourd’hui. L’écueil est la muséification. Il s’agit de présenter de façon adaptée, sans changer le rite, le texte, les mélodies, ni faire de spectacles, car les jeunes parfois sont attirés par le spectaculaire.
Quels sont vos liens aujourd’hui avec vos frères gréco-catholiques ukrainiens?
Parmi les réfugiés arrivés, la majorité sont des gréco-catholiques et des orthodoxes. Nous avons actuellement quatre prêtres ukrainiens qui font des travaux pastoraux pour eux. J’ai reçu récemment la demande de la part de Mgr Sviatoslav Schevchuk, primat de l’Église gréco-catholique ukrainienne, d’accueillir encore quelques prêtres ukrainiens, car la demande est forte chez nous en Hongrie.
Qu’en est-il de vos liens avec les chrétiens persécutés en Orient?
Nous avons des liens personnels puissants. Ils sont eux aussi gréco-catholiques, surtout les melkites. Pendant les guerres ayant ravagé le Moyen-Orient, nous avons initié des quêtes et me suis retrouvé grâce à de grandes difficultés pour envoyer ces récoltes financières. Je les ai donc portées personnellement. Chaque année, je fais un voyage à Damas. Il faut dire que le gouvernement hongrois aussi aide beaucoup sur le plan politique. Les racines sont très importantes pour tout homme. Il faut connaître et vivre de nos racines. Le christianisme provient de l’Orient, son berceau. C’est une tâche pour l’Europe de maintenir ces traditions orientales.
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