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Messe au stade Luna Park en mémoire du père Carlos Mugica. Messe au stade Luna Park en mémoire du père Carlos Mugica. 

Hommage du Pape au père Múgica, assassiné il y a 50 ans en Argentine

Dans un message envoyé à l’archevêque de Buenos Aires qui célébrait ce dimanche la messe de clôture d’une «Semaine Mujica», le Pape a jugé que la mémoire du prêtre-ouvrier assassiné par la Triple A en 1974, est un encouragement à se ranger du côté de ceux qui souffrent, à lutter contre les injustices pour faire communauté, en bonne intelligence avec les autorités publiques.

Marie Duhamel et Francesca Merlo – Cité du Vatican

Il y a 50 ans, «après avoir célébré la messe, après avoir bu le sang du Christ dans le calice, le père Carlos Múgica a également versé son sang pour ses amis», rappelait samedi le vicaire général de l’archidiocèse de Buenos Aires, lors d’une des messes célébrées ce week-end dans la capitale argentine, dans la paroisse Cristo Obrero située dans le bidonville Villas 31, où se trouve la tombe du prêtre ouvrier.

Le 11 mai 1974, le père Múgica est mort des suites de ses blessures. Son corps a été criblé de balles alors qu’il sortait de la paroisse San Francisco Solano, dans le quartier de Villa Luro. Là aussi une messe a été célébrée ce samedi.

Les hommages à cet «ami des pauvres» qui fut assassiné selon toute vraisemblance par un agent de l’Alliance anticommuniste argentine, furent nombreux. Le Pape y prit d’ailleurs part, envoyant une lettre à son successeur à l’archevêché de Buenos Aires, Mgr Jorge Ignacio García Cuerva qui présidait dimanche une célébration eucharistique au stade Luna Park, d’une capacité de 8000 places.

Au service de ceux qui souffrent de toutes sortes de pauvreté

«Aujourd’hui encore, le père Carlos encourage le renforcement d'une communauté dans chaque quartier, organisée pour accompagner la vie de notre peuple, et nous met au défi de lutter contre toutes sortes d'injustices, d'avoir un dialogue intelligent avec l'État et la société», écrit François. Dans sa lettre lue ce dimanche lors de la messe, le Pape souligne combien son témoignage «nous enseigne à ne pas nous laisser entraîner par la colonisation idéologique, ni par la culture de l'indifférence».

Suivant l’exemple du père Múgica, François invite «à ce que nous cherchions tous des lieux d'intégration, en rejetant la disqualification de l'autre» et demande que «le fossé cesse, non par le silence et la complicité, mais en se regardant dans les yeux, en reconnaissant les erreurs et en éradiquant l'exclusion». Il espère que «les principes de la Doctrine sociale de l'Église portent du fruit dans nos communautés et, à travers elles, dans toute la vie sociale».

Chaque fidèle fut hier encouragé à «continuer à mettre son cœur et son corps aux côtés de ceux qui souffrent de toutes sortes de pauvretés», une mission qui n’est pas toujours simple, comme en témoigne la mort du père Múgica. Et François rappelle que «dans chaque célébration de l'Église -qui est bien plus qu'une commémoration historique- il y a une occasion de renouveler la présence fraternelle et engagée auprès de ceux qui portent de lourdes croix».

Mgr García Cuerva: Continuer à revendiquer la paix et la justice

Dans son homélie lors de la messe au Luna Park, l'archevêque de Buenos Aires a également envisagé l’avenir. «Nous ne voulons pas rester le regard tourné vers le passé, ruminant nostalgie et mélancolie, ni le regard obscurci par des idéologies qui ne nous conduisent qu'à des discussions anachroniques, ni le regard chargé de préjugés et d'idées préconçues, ni le regard partial et partiel qui nous fait croire que nous sommes les détenteurs de la vérité et les mesureurs de la prophétie des autres», a lancé Mgr Jorge Ignacio García Cuerva. Cinquante ans après l'assassinat de Carlos Múgica, il souhaite que «nous prêtions nos voix pour continuer à exiger la paix et la justice, convaincus que la violence n'est pas la voie à suivre».

Né en 1930 dans une famille de Buenos Aires aisée et influente dans le monde politique, Carlos Múgica a renoncé à des études de droit pour entrer au séminaire. Il fut ordonné en 1959 et fut dès les débuts de sa mission au service de familles défavorisées. Il fait partie de l'équipe pionnière des prêtres des bidonvilles, à la Villas 31, dans le quartier de Retiro. Il est également associé au Mouvement des prêtres pour le Tiers monde. En Argentine, les actions du père Múgica, également proche des milieux estudiantins, reflètent l'activisme politique des mouvements péronistes de gauche après le coup d'État de 1955 qui a renversé le gouvernement du président Juan Domingo Perón et l'a contraint à l'exil.

La mort du père Múgica est due à des tensions au sein des mouvements péronistes. Bien qu'il ait rejeté la violence politique, il a été mortellement abattu le 11 mai 1974. Ses funérailles ont attiré 20 000 personnes, soulignant son importance pour les mouvements politiques et la communauté locale.

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13 mai 2024, 15:50