Élection présidentielle en Algérie, après 11 mois de contestation
Entretien réalisé par Marine Henriot - Cité du Vatican
Tous les vendredis, puis deux fois par semaine et désormais même la nuit, les manifestants descendent dans les rues d’Algérie. Ils participent, sans manifester aucune lassitude, à un mouvement de contestation inédit dans le pays, le «Hirak», afin de demander le démantèlement du «système» politique algérien.
Ces dernières semaines, à l’approche du scrutin du 12 décembre, le mouvement s’est même renforcé. Dans les manifestations, les slogans dénoncent la tenue de l'élection présidentielle et pointent du doigt les cinq candidats briguant le poste de président, qui ont tous participé ou soutenu, plus ou moins longtemps, la présidence d’Abdelaziz Bouteflika. «Non à l’élection de la honte», «Parodie», «Mascarade», peut-on lire sur les pancartes brandies par les manifestants.
Depuis le 22 février, le régime est massivement contesté. Après avoir obtenu en avril la démission d'Abdelaziz Bouteflika à la tête de l'État depuis 20 ans, le Hirak exige le départ de l’ensemble de la classe politique au pouvoir depuis l'indépendance en 1962. La rue demande un renversement du système, et ce même système lui propose aujourd'hui des élections.
«La plupart des manifestants considèrent cette élection comme un moyen de pérenniser le système et non pas une réponse à leurs revendications», explique le géopolitologue Brahim Oumansour, chercheur associé à l’Iris, l'Institut de relations internationales et stratégiques.
Le rôle de l’armée
Faute de candidats, une présidentielle initialement prévue le 4 juillet avait dû être annulée et l'Algérie a depuis à sa tête un président par intérim effacé, Abdelkader Bensalah, dont le mandat légal a pris fin depuis cinq mois, et un gouvernement nommé par Abdelaziz Bouteflika deux jours avant sa démission pour gérer les affaires courantes, avec à sa tête un fidèle, Noureddine Bedoui.
Le «gardien du système», c’est le chef d'État major Ahmed Gaïd Salah, également vice-ministre de la Défense nationale, au premier rang depuis février. Une position inconfortable pour l’armée, «l'État major presse pour la mise en place d’élections, car celui-ci est désormais trop exposé publiquement», éclaire Brahim Oumansour, «cette élection est considérée par l'État major comme une normalisation de la situation dans le pays».
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